« Le premier dessin que j’ai vendu, c’était une reproduction de planches Mickey d’un magazine Picsou, j’étais en CM1. J’avais décalqué ça en format A4. J’entravais le droit d’auteur à l’époque, c’est mal ! Un copain me l’avait acheté 20 francs. Pour lui, ça ne représentait pas grand-chose. Pour moi, c’était tout mon argent de poche !
Mais après cette transaction précoce, j’ai mis du temps à oser me lancer comme illustratrice. Donc j’ai intégré le monde du travail en tant que graphiste et j’ai touché mon premier salaire en travaillant pour une boutique en ligne de vin. J’ai ensuite été directrice artistique pour le média Madmoizelle. Ce n’est qu’après ces expériences que j’ai fait le grand saut : cesser d’être salariée pour publier mon premier livre : Le Vrai Sexe de la vraie vie1.
Ça a été un parcours du combattant. Je diffusais déjà les planches en ligne, elles rencontraient un certain succès. En 2015, les sujets sexo et féministes intéressaient moins les éditeurs. C’est aussi à ce moment-là que j’ai vendu mon premier vrai dessin : pas assez cher !
« Le premier dessin que j’ai vendu, c’était une reproduction de planches Mickey d’un magazine Picsou, j’étais en CM1. J’avais décalqué ça en format A4. J’entravais le droit d’auteur à l’époque, c’est mal ! Un copain me l’avait acheté 20 francs. Pour lui, ça ne représentait pas grand-chose. Pour moi, c’était tout mon argent de poche !
Mais après cette transaction précoce, j’ai mis du temps à oser me lancer comme illustratrice. Donc j’ai intégré le monde du travail en tant que graphiste et j’ai touché mon premier salaire en travaillant pour une boutique en ligne de vin. J’ai ensuite été directrice artistique pour le média Madmoizelle. Ce n’est qu’après ces expériences que j’ai fait le grand saut : cesser d’être salariée pour publier mon premier livre : Le Vrai Sexe de la vraie vie1.
Ça a été un parcours du combattant. Je diffusais déjà les planches en ligne, elles rencontraient un certain succès. En 2015, les sujets sexo et féministes intéressaient moins les éditeurs. C’est aussi à ce moment-là que j’ai vendu mon premier vrai dessin : pas assez cher !

Les artistes ont toujours du mal à négocier la valeur de leur travail. Pas besoin d’être mécène pour s’offrir des dessins de BD originaux. En plus, ça évite d'avoir la reproduction Ikea que tout le monde a, et c’est un bon moyen de soutenir un artiste qu’on apprécie. »
Patron-binôme
« Il y a une surproduction monstrueuse de BD. La concurrence est telle en librairie qu’une BD doit trouver son public en deux semaines. Sinon, elle est retirée du rayon. Vous savez, autrice de bande dessinée, c’est un vrai métier. Et pourtant, les gens voient ça comme un hobby. En France, 36 % des auteurs de BD vivent en dessous du seuil de pauvreté (50 % pour les femmes) 2.
Seuil de pauvreté
Il s’agit du revenu minimal en dessous duquel un foyer est considéré comme « pauvre ». En 2018, il s’établit à 1 063 euros mensuels et concerne 14,5 % de la population – sans doute 18 % en 2021 à cause de la crise.
On touche une avance une fois le contrat signé avec la maison d’édition. Ensuite, il faut espérer que la BD se vende assez bien pour que les bénéfices dépassent l’avance… L’éditeur ne nous verse les droits qu’une à deux fois par an. Pour vivre, il faut gérer au cordeau. J’ai dû me former auprès de “Girls in web” pour établir un budget avec les revenus, les cotisations, etc. Pour manger et rembourser mon prêt immobilier. Pour l’instant, je fais mes courses sans trop regarder les prix, c’est un signe de tranquillité d’esprit.
Depuis, je partage ces infos avec les copains. La BD est un métier qui isole (je casse la solitude en streamant mes après-midi de travail sur Twitch !) et l’économie, finalement, c’est d’abord l’échange, qu’il soit pécuniaire ou pas. Elle peut être vertueuse, circulaire, sans hiérarchie pyramidale.
Personnellement, j’avoue reproduire la culture salariée dans ma petite entreprise, avec des horaires de bureau. Mon éditeur n’est ni mon patron ni mon client, plutôt mon binôme. Il me verse 10 % sur la vente de chaque livre, soit 1,80 euro. Ce seuil dépend du projet, du nombre d’exemplaires imprimés, de la notoriété…
Avec ce que je touchais dans la publicité, je pourrais faire trois BD. Un seul de leur budget dépasse largement les avances perçues pour mes deux premiers livres. La rémunération idéale ? Comme ça, je dirais à la planche, mais tout dépend du projet. »
Notes
1. Éditions Lapin, 17 000 exemplaires. Sa dernière BD, Radium Girls s'est vendue à 42 000 exemplaires.
2. États généraux de la BD
Ils et elles racontent leur économie
En cette rentrée 2021, Pour l’Éco publie les témoignages de deux femmes et deux hommes. Chacun d’entre eux crée de la richesse, la consomme, la partage. Bref, ce sont des agents économiques. Vous
aussi. Nous aussi. Depuis trois ans, nous déclinons avec vous, grâce à vous, cette conviction : l’économie est présente tout le temps, partout, pour tout le monde.
Avant même d’exister sous ce nom, c’est-à-dire avant Adam Smith, elle était déjà bien là. Les grands enjeux collectifs ou individuels qui nous mobilisent ont tous une dimension économique. Voilà le sens de notre devise : pour agir, l’économie compte.
Épisode 1 – Gilles Cohen : « Si le rôle est formidable, je peux accepter un cachet plus faible »
Épisode 2 – Nicolas Truelle : « La clé, en économie, c’est de bien définir l’efficacité »
Épisode 3 – Sissy Mua : « Oui, je suis influenceuse, je dirige 30 personnes »