Alors que la production et la consommation de viande ne cessent d’augmenter au niveau mondial, la viande issue de l’élevage conventionnel est régulièrement pointée du doigt pour des raisons environnementales, de santé et de bien-être animal.
Les promoteurs de l’agriculture cellulaire veulent produire des protéines animales sans ces inconvénients. Pourtant, il est extrêmement peu probable que la viande cultivée en laboratoire remplace complètement la viande issue d’animaux. Alors, comment l’élevage conventionnel peut-il devenir plus durable ?
Selon l’angle adopté, il existe des réponses différentes.
« S’il s’agit de réduire les émissions de Gaz à effet de serre (GES), les scénarios étudiés conduisent tous à une diminution de l’élevage de ruminants (par exemple les vaches) », rapporte Jean-Louis Peyraud, directeur scientifique adjoint du département Agriculture de l’Inrae.
Selon la FAO (Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), l’élevage est responsable de 14,5 % des émissions de GES, un chiffre qui englobe les émissions directes et indirectes du secteur au niveau mondial.
« Mais l’élevage de ruminants, lorsqu’il occupe des terres non cultivables comme les zones de montagne ou des prairies en plaine, a alors des vertus, dont l’entretien de ces sols qui stockent plus de carbone, filtrent mieux les eaux et sont plus riches en biodiversité », poursuit Jean-Louis Peyraud.
Pour Léopoldine Charbonneaux, directrice de Compassion in World Farming (CIWF) France, le problème réside dans les élevages intensifs et industriels, qui sont « non durables par essence » : quand les bêtes n’ont pas accès aux pâturages, il n’y a plus de complémentarité entre les sols et les animaux et il y a une concurrence avec l’alimentation humaine, puisque des cultures sont alors dédiées à la production des aliments pour animaux.
Actuellement, en France, « 80 % des animaux sont dans des élevages intensifs », déplore la directrice de cette ONG qui œuvre pour encourager l’élevage durable. La tendance générale est nettement à l’industrialisation des exploitations, même si certains éleveurs reviennent à des systèmes basés sur les pâturages et le plein air.
« La demande sociétale est forte pour des pratiques d’élevage plus respectueuses du bien-être animal et de la planète, une demande en partie entendue par les professionnels, ce qui freinera peut-être l’industrialisation », espère Léopoldine Charbonneaux.
L’un des leviers est donc l’information des consommateurs. L’étiquetage obligatoire des œufs en fonction du mode d’élevage a eu un impact important sur cette filière, en faisant diminuer le pourcentage de poules en cage (actuellement autour de 60 % en France, contre 97 % des porcs qui sont en élevage intensif). Une démarche volontaire d’étiquetage est en développement pour les poulets de chair et pourrait s’étendre à d’autres filières animales3.
Il existe d’autres leviers pour faire évoluer l’élevage conventionnel vers des pratiques plus durables, dont « la réorientation des subventions vers des systèmes plus vertueux, les fonds de la Politique agricole commune (PAC) ayant beaucoup contribué à l’industrialisation des exploitations », souligne Léopoldine Charbonneaux.
Diminuer la production et la consommation semble par ailleurs indispensable. « Tous les animaux existant actuellement en France ne peuvent pas tous être en plein air, assure la directrice de CIWF France. Il faudra obligatoirement une baisse du nombre d’animaux, car aux niveaux actuels, il est matériellement impossible qu’ils soient tous élevés dans de bonnes conditions. »