Economie
Streamflation et élasticité prix. La hausse des prix de Netflix ou Disney fera-t-elle fuir les consommateurs ?
Disney+, Netflix... Les services de streaming vidéo voient leur prix considérablement augmenter. Une stratégie assumée par les plateformes. Mais les consommateurs vont-ils suivre ?
Clément Rouget
Les prix des service de streaming ne cessent d'augmenter.
© Midjourney
« On fait quoi ce soir ? Netflix and chill ? » Le streaming a pris une telle place dans notre société qu'une marque de glace a même lancé une ligne de produit du même nom.
Mais ce loisir coûte de plus en plus cher : le prix moyen de l’abonnement à un service de streaming sans publicité a augmenté de près de 25 % sur un an.
Et ce n'est pas fini. Plusieurs plateformes mondiales, vidéos comme musicales (Amazon, Spotify...), ont annoncé cet été des hausses de prix considérables pour leurs abonnements.
En France, les abonnés de Disney+ verront par exemple passer le prix de leur offre sans pub de 8,99 euros à 11,99 euros par mois à partir du 1er novembre 2023, soit une hausse de plus de 30% pour continuer de regarder princesses et Jedi !
Face à ces augmentations tout azimut, certains observateurs ont inventé un nouveau terme : la “streamflation”, un néologisme formé à partir des mots “streaming” et “inflation”.
Les Français possèdant en moyenne 1,9 abonnement à des services de streaming, l'effet sur le portefeuille n'est pas neutre.
Vont-ils rester abonnés malgré la hausse des prix ? C'est tout le pari des géants du streaming.
Ces hausses de tarif posent la question de l’élasticité-prix de la demande de streaming, c'est-à-dire la sensibilité de la demande à une variation du prix.
Le plus souvent, l'élasticité-prix est de signe négatif, car la demande est généralement une fonction décroissante du prix. C'est logique : plus un bien ou un service coûte cher, moins il est acheté.
Ceci étant, ce n'est pas toujours le cas. C'est même parfois l'inverse. Dans le secteur du luxe par exemple, une augmentation des prix peut entraîner une hausse des ventes.
Pour aller plus loin > Thorstein Veblen et la consommation ostentatoire
En bref, l’élasticité-prix dépend de plusieurs facteurs, comme le niveau de revenu des consommateurs, le caractère essentiel ou superflu du bien ou du service, ou encore le nombre et la qualité des substituts disponibles.
Le risque pour les plateformes de streaming, c'est que l'on peut supposer que la demande est relativement élastique : il s’agit d’un loisir non indispensable et il existe une multitude d’offres alternatives (autres plateformes, télévision gratuite ou payante, DVD…).
Plusieurs éléments peuvent malgré tout expliquer l'optimisme des plateformes.
Le premier vient de Netflix. Au printemps, la plateforme star a durci ses règles de partage de compte. Ce n'était pas une hausse des tarifs à proprement parler : il s'agissait plutôt de shrinkflation - c'est-à-dire une baisse de la qualité d'un service pour le même prix -, mais le risque était similaire.
Or, contrairement aux attentes et preuve de l'addiction des consommateurs à la plateforme, 6 millions de personnes supplémentaires se sont abonnées en trois mois !
Pour aller plus loin > C'est quoi, la shrinkflation ?
L'autre élément est plus stratégique. En réalité, les plateformes veulent que vous vous désabonniez... de leurs offres sans publicité ! Et que vous souscriviez à leurs offres avec publicité, bien plus rentables pour elles. Ces offres avec pub, elles, ne voient pas leurs tarifs augmenter (5,99€ par mois chez Disney par exemple).
Ou comment utiliser la théorie économique pour augmenter ses marges... Malines ces plateformes !
« Nous ne cherchons pas à attirer n’importe quel abonné. Nous voulons être sûrs d'être payés et d'être payés équitablement. »
David Zaslav
Directeur général de Warner Bros Discovery, dans une enquête du Wall Street Journal.
Utile pour ces chapitres
Première SES : « Comment un marché concurrentiel fonctionne-t-il ? »
Seconde SES : « Comment se forment les prix sur un marché ? »
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