Los Angeles, terre mythique de sport et théâtre du Super Bowl 2022. Pour sa 56e édition, le Super Bowl verra cette année s’affronter deux équipes inattendues à ce stade de la compétition. Dans leur enceinte les Los Angeles Rams, face aux outsiders, les Cincinnati Bengals. En dépit d’une affiche privée de ses plus grandes stars, les revenus pour la NFL (National Football League) et la chaîne de télévision NBC, qui diffuse le match, pourraient bien battre des records.
Un Superbowl toujours star télévisuelle
Chaque année, le Super Bowl est l’une des attractions principales aux États-Unis. Sport télévisuel par excellence, l’évènement majeur du football américain est un roi du petit écran, avec cinq des dix plus grandes audiences de tous les temps. Et même si, en 2021, l’audience de l’évènement était au plus bas depuis 14 ans (91,6 millions de téléspectateurs sur CBS), le coût des publicités pendant le match et la mythique mi-temps a battu un record.

Pour 2022, NBC a annoncé avoir signé des contrats publicitaires d’un montant moyen inédit : 6,5 millions de dollars les 30 secondes. En 2021, 435 millions de dollars auraient été générés avec les publicités selon le cabinet Kantar, avec 96 spots publicitaires diffusés durant les 4h30 de retransmission.
Pourquoi des prix si élevés ? : « C’est la seule fois dans l’année où les consommateurs n’évitent pas les publicités. En fait, ils les recherchent, et il est important de ne pas leur faire regretter ça. » explique dans Business Insider l’agence de pub Chicago High Dive, qui compte à son actif plus de 50 diffusions au Super Bowl.
Les chaînes sont prêtes à tout pour maximiser la valeur de ces tranches publicitaires prisées : même à échanger les dates de leurs droits de diffusion ! CBS devait initialement diffuser le Super Bowl pour cette édition 2022, mais la chaîne a finalement conclu dès 2019 un accord avec NBC. Cette dernière, qui possède également les droits des JO de Pékin pour les Etats-Unis, voulait jumeler ces deux événements sportifs. Elle a donc renoncé aux droits de 2021 pour avoir ceux de 2022. Du coup, NBC, avec ses deux super-événements, est équipée pour attirer les publicitaires en leur proposant des offres publicitaires globales. L’intérêt pour les deux chaînes est clair : ne pas se concurrencer la même année, ce qui pourrait faire baisser les tarifs publicitaires.
Impossible pourtant de connaître la rentabilité exacte de la diffusion du Super Bowl pour les chaînes de télévision américaines : la diffusion de l’évènement est comprise dans l’ensemble des droits versés par les networks à la NFL sur une saison. Mais à l’évidence, les chaînes n’ont pas à se plaindre des revenus générés par la diffusion des rencontres de NFL.
En mars 2021, la ligue américaine a annoncé avoir signé avec CBS, Fox, ABC, NBC et ESPN un contrat sur les 11 prochaines années (2023-2033), qui dépasserait au total les 100 milliards de dollars, soit le double du précédent accord, qui prend fin cette année. Par exemple, Disney (propriétaire d’ESPN et ABC) déboursera 2,7 milliards de dollars par an dès 2023.
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C’est un montant plus de trois fois supérieur à celui de la ligue de basketball, la NBA. Celle-ci aligne pourtant 82 matchs par équipe dans une saison, contre seulement 17 pour le football américain. Les droits du football américain sont sont même supérieurs à l’ensemble des droits de retransmission de la dernière Coupe du monde en Russie, qui ont rapporté trois milliards de dollars à la Fédération internationale de football (notre football - soccer).
Les rencontres de NFL au sommet des audiences
Ce deal record s’explique par les audiences des rencontres tout au long de la saison de football américain, lors de l’automne américian. Selon le cabinet d’études Nielsen, 75 des 100 plus grandes audiences de l’année 2021 à la télévision américaine sont des matchs ou des émissions liés à la NFL.
Un tel succès économique ne pouvait laisser insensible les GAFAM. Dans le nouveau contrat, actif en 2023,, Amazon aura aussi sa part du gâteau dans le business NFL aux côtés des chaînes traditionnelles. Depuis 2017, le géant de l’e-commerce a des droits, diffusant le match du jeudi soir, le « Thursday Night Football ».
Mais avec ce nouvel accord, Amazon s’est cette fois-ci assuré l’exclusivité de ce match en direct. Une première dans ce sport pour un service vidéo à la demande. Selon CNBC, qui cite des sources proches du dossier, le groupe américain paiera environ 1 milliard de dollars par an.
Si l’essentiel des matchs reste diffusé par les chaînes « traditionnelles », cette entrée en force d’Amazon montre aussi la volonté de la ligue de football américain de se numériser et de conquérir de nouvelles audiences.
Dans le nouvel accord, la NFL s’est entendue avec ses autres diffuseurs pour que les matchs soient diffusés en direct sur leurs plateformes en ligne (Paramount + pour CBS, Tubi pour Fox, Peacock pour NBC et ESPN + pour ESPN). Dans le communiqué, le patron opérationnel de la NFL Roger Goodell a d’ailleurs salué ce développement : « Nous sommes fiers d’étendre nos partenariats avec les groupes de médias les plus innovants du marché. »
La marge de progression du football américain est grande sur ce point : la NFL est en retard par rapport à sa rivale de la balle orange, la NBA. Car 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, le basket américain se retrouve sur les réseaux sociaux avec un objectif clair : proposer aux fans le maximum de contenus viraux.
Cela fait déjà plus d’une dizaine d’années que la NBA inonde les réseaux sociaux de contenus spectaculaires : les tops 10 des actions font chaque nuit des centaines de milliers de vues sur leur chaîne YouTube. Un fonctionnement inégalé dans le monde entier, et que la NFL n’arrive pas à copier, pour le moment.
Ce n’est pas le seul défi du football américain. S’il est sans conteste le sport roi sur son territoire, il n’atteint pas la cheville du basketball quand il s’agit de passer les frontières et de conquérir le monde.
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