Rester indépendant tout en jouissant du statut de salarié, est-ce possible ? La réponse, méconnue depuis 25 ans, est « oui ». Avec le statut d’entrepreneur-salarié en CAE, l’indépendant mène une activité autonome, mais il est officiellement salarié de la coopérative, sans lien de hiérarchie ni plafond de chiffre d’affaires.
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Ses factures sont converties en salaire et il bénéficie de la protection sociale des salariés, de revenus lissés, d’une réserve de trésorerie, d’une gestion administrative, d’un accompagnement personnalisé et de formations.
Depuis 10 ans, dans son agence de communication en Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), Audrey Julienne travaille avec des free-lances. Elle a voulu les associer davantage, car elles contribuaient à la réussite de l’agence.
« Elles aimaient le travail en commun, mais redoutaient la dépendance et la subordination à une entreprise classique. » Elles finissent par opter pour la CAE, ce qui leur « permet d’être libres ensemble. On a dû apprendre à être associées. On s’oblige, sans trop d’efforts, à échanger chaque semaine, à mener une gestion horizontale. Même si c’est parfois un peu compliqué, ça se passe bien ».
Rester indépendant tout en jouissant du statut de salarié, est-ce possible ? La réponse, méconnue depuis 25 ans, est « oui ». Avec le statut d’entrepreneur-salarié en CAE, l’indépendant mène une activité autonome, mais il est officiellement salarié de la coopérative, sans lien de hiérarchie ni plafond de chiffre d’affaires.
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Ses factures sont converties en salaire et il bénéficie de la protection sociale des salariés, de revenus lissés, d’une réserve de trésorerie, d’une gestion administrative, d’un accompagnement personnalisé et de formations.
Depuis 10 ans, dans son agence de communication en Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), Audrey Julienne travaille avec des free-lances. Elle a voulu les associer davantage, car elles contribuaient à la réussite de l’agence.
« Elles aimaient le travail en commun, mais redoutaient la dépendance et la subordination à une entreprise classique. » Elles finissent par opter pour la CAE, ce qui leur « permet d’être libres ensemble. On a dû apprendre à être associées. On s’oblige, sans trop d’efforts, à échanger chaque semaine, à mener une gestion horizontale. Même si c’est parfois un peu compliqué, ça se passe bien ».
Baptiste Betinas, administrateur de la CAE du bâtiment Cabestan, et Cécile Malaterre, gérante de la CAE Suite 126, sont coprésidents de la jeune Fédération des CAE.
Selon lui, « certains rentrent surtout par opportunisme pour le côté administratif, d’autres par militantisme. L’idée est d’animer la coopérative pour leur donner à tous envie de participer ». À elle, son arrivée en CAE a permis un « apprentissage de la démocratie en entreprise » avec des « décisions coconstruites. Parfois, ça grince un peu des dents, mais c’est le jeu ».
Un homme, une voix
Les indépendants commencent souvent par le Contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE), « phase d’apprentissage de ce que sont une coopérative et la gouvernance partagée », selon Cécile Malaterre.
Baptiste Betinas raconte : « Les plus gros problèmes, nous les avons eus avec des gens ayant déjà une activité entrepreneuriale, mais sans vraie envie de rendre compte au collectif. Le CAPE sécurise l’avenir de la coopérative, acculture. On est entrepreneur avec une solidarité et une responsabilité envers le collectif. »
Éco-mots
Contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE)
Convention – qui n’est pas un contrat de travail – liant un porteur de projet à une structure l’accompagnant (entreprise ou association) dans son développement. Il permet de tester la viabilité de son projet en étant affilié aux assurances sociales du régime général de sécurité sociale et à la couverture obligatoire pour les accidents du travail. Il est notamment utilisé par les CAE et les couveuses d’entreprise.
Pour les décisions collectives (services mutualisés, niveau de contribution…), « tout le monde a la même voix, explique Audrey Julienne, contrairement à une entreprise classique. La vie démocratique fonctionne aussi parce que nous sommes une petite structure ». Chez Boots & Cats « la plus grosse partie du chiffre d’affaires est collective, à la différence de beaucoup de CAE rencontrées ».
Claire Hatala Le Roy, consultante en handicap et entrepreneuse-salariée dans la CAE généraliste Coopaname, n’a pas assez « investi » cette possibilité, faute d’affinités professionnelles et de réel besoin.
Elle juge l’aspect démocratique « passionnant » et se dit « un peu plus engagée depuis que je suis associée » mais « mauvaise élève. Cela m’intéresserait, mais avec une activité à faire tourner, c’est compliqué de dégager du temps ».
La moitié du chiffre d’affaires !
Là où les indépendants grincent des dents, c’est sur le coût élevé de la participation : cotisations sociales, frais de fonctionnement, réserve de trésorerie. « La moitié du chiffre d’affaires part ailleurs que dans notre poche. Quand on a l’habitude des 20 % de charges, ça fait mal au début, reconnaît Audrey Julienne. Mais au bout d’un an, on n’a pas perdu tant que ça. »
Et surtout, elle voit un « changement de posture » des anciennes free-lances. « Elles se sont réévaluées et ne se bradent plus. »
Claire Hatala Le Roy a commencé comme autoentrepreneuse. La CAE l’a obligée à « repenser mon business model, mes objectifs, à changer de posture, à passer de “je réponds à la demande” à “qu’est-ce que j’ai envie de proposer ?”. »
Cela ne convient pas à tout le monde. Une free-lance qui avait rejoint Boots & Cats a « décidé que ce n’était pas pour elle, parce qu’elle avait du mal à accepter de ne plus être seule maître à bord ». Claire Hatala Le Roy a parfois envie de « repartir en solo, mais il n’y a pas photo : l’autoentrepreneur n’est pas du tout un statut possible sur le long cours. »
Même si les entrepreneurs-salariés sont privés de nombreuses aides aux entreprises, ce à quoi la fédération des CAE veut remédier, Audrey Julienne estime que passer sous ce statut a favorisé son développement. « S’associer nous permet d’avoir des clients plus gros avec plus de budget et de création. »
Selon Baptiste Betinas, « les CAE correspondent mieux aux aspirations des travailleurs qu’il y a 20 ans. Il y a une remise en question du salariat, sans pourtant accepter la loi de la jungle ».
Le site de la Fédération des CAE