Pour arrêter l'hémorragie, le patron décide de fermer l'usine en 2015 : plan social, résiliation du bail de l'usine et levée de fonds pour combler les pertes.
Avant de prendre la décision de cesser cette activité, Nicolas de Bronac a affronté "une période de doutes énormes"."C'était très dur, il y avait toujours une partie de moi qui se disait que ça pouvait encore marcher. Mais il faut être réaliste. On perdait de l'argent avec cette usine".
Dans une PME, "le chef d'entreprise est proche de ses collaborateurs", assure Sonia Boussaguet, professeure d'entrepreneuriat de l'école de commerce Neoma. Pour elle, l'image du méchant patron qui licencie sans état d'âme pour augmenter ses profits ne représente pas la majorité des entreprises, dont 99% sont des TPE et PME en France. "Lorsqu'il y a des difficultés financières et que le chef d'entreprise prend la décision de licencier, il n'en dort pas la nuit. Il sait pertinemment que l'emploi perdu va mettre en difficulté le salarié, voire sa famille", explique-t-elle. "Il est conscient de son immense responsabilité".
En Chiffres
4 millions
Nombre de TPE et PME en France, soit 99% des entreprises.
Dans le cas de Sequoia pressing, Bronac affirme que "la plupart des 15 salariés ont été requalifiés dans d'autres pressings". Le patron a pu relancer son activité principale, le pressing, et poursuivre sa croissance. Sequoia pressing "se porte bien, l'entreprise devrait bien se sortir de la crise du covid-19 avec l'ouverture de nouvelles franchises", explique son fondateur.
Les difficultés financières ont poussé Taïg Khris à liquider deux de ses entreprises. Son magasin de roller d'abord, qui devenait de moins en moins rentable car "la mode du roller est retombée". "Mon père m'avait poussé à ouvrir ce magasin et s'en occupait pendant que je poursuivais ma carrière sportive", raconte l'ancien champion. La décision de fermer le magasin a été prise quand Taïg Khris a commencé à perdre de l'argent.
Lorsqu'il y a des difficultés financières et que le chef d'entreprise prend la décision de licencier, il n'en dort pas la nuit. Il est conscient de son immense responsabilité.
Sonia Boussaguet,Professeure d'entrepreneuriat de l'école de commerce Neoma
Sa deuxième entreprise, TK Concept, vendait des agendas, cahiers et autres articles scolaires, décorés de portraits de sportifs. Mais l'enseigne de papeterie a rencontré des difficultés quand Taïg Khris a perdu le droit d'utiliser l'image de Tony Parker, la star française de basket.
Puis la crise de 2008 a achevé la société. "On ne produisait que pour la rentrée scolaire, il n'y avait qu'une seule commande par an et en 2008 les distributeurs ont commandé 70 % de moins que l'année précédente". A ce niveau de commande, conserver l'entreprise lui aurait coûté 150 000 euros. "J'ai beaucoup regretté TK Concept, c'était la première boîte que je créais vraiment", raconte Taïg Khris.
Un pari et un peu de chance
L'entreprise d'Olivier Davenier est encore jeune. Même s'il ne se paye pas encore "des mille et des cents", l'artisan est confiant : Archi-boucher n'est pas en danger. Il lui faudra tout de même créer une seconde boucherie "pour que l'entreprise marche". "J'ai espoir de m'implanter dans une autre ville de banlieue parisienne, comme Pantin ou Aubervilliers, et d'ouvrir une autre boutique avec les mêmes viandes à faire découvrir".
Et ainsi rentabiliser les efforts fournis pour constituer ses troupeaux et élaborer des cahiers des charges avec les éleveurs. En particulier les vaches Hérens, une race qui produit "une viande avec un goût dément", pour laquelle il se passionne. "Une entreprise, c'est un pari", estime l'ancien architecte. "Moi, je parie sur ce que je vends dans ma boucherie."
Une entreprise, c'est toujours une part de chance.
Charlotte CadéCofondatrice de Selency (ex-Brocante Lab)
Un pari et "un alignement des planètes", "il y a toujours une part de chance" pour que ça marche, selon Charlotte Cadé. Sa start-up Selency "suit la veine d'un marché en pleine explosion". "On n'a jamais autant entendu parler de seconde main", analyse l'entrepreuneure de 33 ans. "Notre time to market est très très bon, la seconde main intéresse les fonds d'investissements et les entreprises".
Time to market
Désigne à la fois le délai de mise sur le marché d'un article et le lancement d'un nouveau produit. Dans le premier cas, l'enjeu est de vendre le produit avant la concurrence, en accélérant son développement. Dans le second cas, il s'agit de choisir le meilleur moment pour lancer la commercialisation d'une nouvelle offre et de déterminer quand le marché sera le plus réceptif à ce produit.
Créée il y a six ans, la plateforme de brocante en ligne recense aujourd'hui 3 000 vendeurs et un million d'utilisateurs. Charlotte Cadé va continuer à investir. "On voit de nouvelles opportunités, par exemple dans l'art et les meubles contemporains". Son objectif : la rentabilité dans deux ans.
La fondatrice de Selency, se "voit mener cette barque pendant un bon moment", à cause "des enjeux écologiques et environnementaux qui y sont liés". Mais pas jusqu'à la retraite : "Dans quinze ans, je ne pense pas être encore aux manettes. Il faut être capable de passer le flambeau à quelqu'un de neuf."
Cinq ans pour préparer la vente d'une entreprise
Sonia Boussaguet, la professeure en entrepreunariat, aussi spécialiste des transmissions et reprises de PME, estime qu'il faut "en moyenne cinq ans pour transmettre une entreprise". Le temps "d'embellir la mariée et de préparer le terrain pour que cela se passe bien pour le repreneur".
Nicolas de Bronac se pose aussi la question de "lancer autre chose". "Pour l'instant, il y a encore beaucoup de choses à faire, j'estime que je suis encore utile. Tant que je ne m'ennuie pas, je reste !"
Le patron est désormais à la tête d'un réseau d'une soixantaine de pressings, le n°2 en France. "Dans cinq ans, on espère être le leader du marché, avec 200 boutiques ouvertes".
En moyenne, il faut cinq ans pour transmettre une entreprise. Le temps d'embellir la mariée et de préparer le terrain pour que cela se passe bien pour le repreneur.
Sonia Boussaguet Professeure d'entrepreneuriat à la Neoma business school
Beaucoup d'ambitions également pour Taïg Khris, qui veut faire d'Onoff une entreprise mondiale. Aujourd'hui bien intégré dans l'écosystème des télécoms, il estime avoir "prouvé qu'il était capable d'atteindre un haut niveau dans cette industrie" et dans le numérique.
Même s'il n'a "aucune envie de vendre Onoff", il en est déjà au coup suivant. "Je vais créer une nouvelle boîte prochainement". "Il y a des gens qui gardent une entreprise toute leur vie, moi j'ai déjà eu plein de vies. Onoff est une aventure extraordinaire, mais il y en aura d'autres".
Vous avez suivi leurs aventures
Le patron de PME. Nicolas de Bronac, fondateur de la franchise Sequoia Pressing, 37 ans. Il a toujours voulu créer une entreprise et a été attiré par la franchise après son diplôme obtenu dans une école de commerce d'Anger.
Sequoia pressing fondé en 2008, 62 boutiques, 200 salariés.
La startuppeuse. Charlotte Cadé, cofondatrice de Selency (ex-Brocante Lab), 33 ans. Plutôt orientée vers une carrière de marketing, elle a eu l'idée de créer une plateforme de brocante en ligne et s'est lancée dans l'entrepreneuriat avec son conjoint Maxime Brousse comme associé.
Brocante Lab fondé en 2014, 50 salariés.
L'artisan. Olivier Davenier, boucher à Montreuil, en Seine-Saint-Denis, 52 ans. Ancien architecte, il n'était plus heureux dans son métier et a décidé de se reconvertir en boucher.
Boutique Archi-boucher ouverte en 2018, un salarié et un apprenti.
Le serial entrepreneur. Taïg Khris, fondateur de la start-up Onoff, de la gamme de papeterie TK Concept, d'un magasin de roller et associé d'une boisson énergisée, 45 ans. Ancien champion du monde de roller, il a créé plusieurs petites entreprises avant de se consacrer à 100 % à Onoff après une énième blessure.
Onoff fondé en 2014, 60 salariés.
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