Dans la rubrique Histoire d'un couac, découvrez chaque mois, la chute d'une entreprise et les leçons à en retenir.
Fondée par le charonnier Louis Heuliez, l’entreprise créée en 1920 à Cerizay porte son nom. Elle fabrique et répare des chars destinés aux agriculteurs.
Contemporain de l’invention de l’automobile à essence, Louis Heuliez perçoit son potentiel et décide de devenir carrossier. En 1925, Heuliez présente sa première carrosserie automobile sur un châssis Peugeot.
L’année suivante, il habille quelques châssis Ford. À la pointe de la technique, la marque se distingue, mais la Seconde Guerre mondiale bride son élan.
1947. Décès du fondateur. Ses fils, Henri et Pierre, prennent les commandes. De grands concurrents sont sur le déclin et Heuliez fait le choix du véhicule utilitaire, tout en conservant la sous-traitance en carrosserie. C’est grâce aux autobus que l’entreprise renaît, à la fin des années 60, en coopérant avec Mercedes.
L’aventure autobus
La qualité du produit et les prix compétitifs séduisent les municipalités en train de s’équiper en réseaux d’autobus. Mais Renault, grande entreprise publique, contre-attaque et crée Renault Véhicules Industriels.
RVI lance une campagne de lobbying auprès des collectivités pour la promotion des bus « français ». Deux ans après la naissance d’Heuliez Bus, RVI monte à son capital, jusqu’à devenir son actionnaire principal, à la fin des années 1990.
Les dirigeants du groupe familial fondent de gros espoirs sur leurs partenariats dans l’automobile, mais ils n’aspirent pas à devenir un constructeur, un objectif hors de leur portée. Spécialisé dans l’équipement, Heuliez devient un fournisseur reconnu de Citroën, Peugeot, Renault, Ford…
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Le piège de la sous-traitance
Entreprise de taille intermédiaire et fournisseur de qualité, Heuliez va pourtant connaître les difficultés liées à son statut de sous-traitant, qui induit une relation de dépendance technique et commerciale. Et la concurrence se durcit avec l’arrivée sur le marché des anciens pays de l’Europe de l’Est, qui bénéficient, en plus, de fonds publics européens.
Et puis certains commanditaires reprennent en interne la production sous-traitée jusque-là. À l’instar de PSA, qui décide de réintégrer la production sur les chaînes modernisées des usines Citroën.
Autre revirement, celui de Renault, pour qui les véhicules industriels, activité trop déficitaire et trop hexagonale, ont perdu de leur caractère stratégique. Heuliez Bus perd le contact avec Renault et passe sous la coupe du groupe CNH.
Tentatives de sauvetage et procédures judiciaires
Pour ce qu’il reste du groupe, l’espoir renaît avec un projet de voiture électrique, mais il est trop tard. Heuliez n’en finit plus de plonger.
La région Poitou-Charentes et le Fonds stratégique d’investissement (FSI) lui apportent un concours financier, mais la somme est insuffisante. Il faudrait trouver 15 millions pour sauver le groupe. Son chiffre d’affaires est tombé de 559 millions d’euros à une soixantaine de millions, avec près de 30 millions de pertes.
En octobre 2007, l’équipementier demande l’ouverture d’une procédure de sauvegarde. En 2009, le redressement judiciaire est décidé par le tribunal de commerce de Niort. En 2010, c’est la scission d’Heuliez en deux entités distinctes, avec la nouvelle structure baptisée Mia Electric (spécialisée dans la voiture électrique).
En avril 2013, l’usine historique de Cerizay ferme ses portes. Au printemps 2014, c’est au tour de Mia Electric d’être liquidée, malgré le soutien financier du Conseil régional.