Cet article est extrait de notre magazine consacré aux super-pouvoirs économiques des politiques. À retrouver en kiosque et en ligne.
Dès son plus jeune âge, Laurent De La Clergerie a su que le salariat ne serait pas pour lui. L’entrepreneuriat n’est pourtant pas une histoire de famille. Après des études d’ingénieur et de commerce, il se lance par hasard dans l’informatique, alors un simple hobby, avec l’idée de vendre un logiciel à Renault, l’entreprise où travaille son père.
Ce logiciel, il ne le vendra jamais, mais son destin est tracé. En 1997, Laurent De La Clergerie lance un site de commerce informatique en ligne. Son nom, LDLC, lui vient un peu par hasard. Il aurait préféré EasySoft, mais c’était déjà pris. « À un moment, j’en ai eu marre de chercher, j’ai mis mes initiales. »
Ce sigle, pas forcément facile à retenir, finira par être un avantage. « Il s’est construit dans le temps et puis ça fait plus “marque” que Rue du commerce. » L’entrepreneur ouvre une première boutique, en 1998, pour les particuliers (en B2C).
Cet article est extrait de notre magazine consacré aux super-pouvoirs économiques des politiques. À retrouver en kiosque et en ligne.
Dès son plus jeune âge, Laurent De La Clergerie a su que le salariat ne serait pas pour lui. L’entrepreneuriat n’est pourtant pas une histoire de famille. Après des études d’ingénieur et de commerce, il se lance par hasard dans l’informatique, alors un simple hobby, avec l’idée de vendre un logiciel à Renault, l’entreprise où travaille son père.
Ce logiciel, il ne le vendra jamais, mais son destin est tracé. En 1997, Laurent De La Clergerie lance un site de commerce informatique en ligne. Son nom, LDLC, lui vient un peu par hasard. Il aurait préféré EasySoft, mais c’était déjà pris. « À un moment, j’en ai eu marre de chercher, j’ai mis mes initiales. »
Ce sigle, pas forcément facile à retenir, finira par être un avantage. « Il s’est construit dans le temps et puis ça fait plus “marque” que Rue du commerce. » L’entrepreneur ouvre une première boutique, en 1998, pour les particuliers (en B2C).
Mais peu à peu, le B2B – la vente aux entreprises – se développe, là non plus sans préméditation : les start-up lyonnaises qu’il connaît viennent se fournir chez lui. C’est en 1999-2000 que l’entreprise décolle vraiment. Pour passer la vitesse supérieure, il entre en Bourse (où il lève trois millions d’euros).
Objectif : l’autonomie. Il aura moins de comptes à rendre et de contrôles à subir qu’avec des investisseurs privés. Et si aujourd’hui, 60 % du capital appartient à des investisseurs étrangers, la famille conserve 55 % des droits de vote. Son frère et sa sœur ont investi dans le capital dès le départ, puis ont pris des responsabilités – son frère, Olivier, est encore là aujourd’hui.
Si les débats peuvent être plus houleux qu’avec une équipe de direction lambda, ils sont aussi beaucoup plus éphémères. « Parce que la confiance est aussi plus forte. »
Chiffres
725 millions de chiffres d’affaires en 2021
70 millions d’euros d’EBE (Excédent brut d'exploitation)
1 000 salariés
Salaire minimum : 1 945 euros bruts sur 13 mois en 2021, prévu à 2000 euros en 2022
32 heures de travail sur quatre jours pour tous
La semaine de quatre jours payée cinq
L’autonomie et la responsabilité, il les veut aussi pour ses salariés. LDLC multiplie les innovations managériales pour de meilleures conditions de travail. « J’essaye de rendre aux gens ce qu’ils donnent : soit un meilleur salaire, soit des mesures qui n’existent pas ailleurs. C’est parce qu’on est bien ensemble qu’on a envie d’aller loin, pas l’inverse. »
En 2020, Laurent De La Clergerie a donc mis en place la semaine de quatre jours, payée cinq. Tout en augmentant en 2021 les plus bas salaires de 10 %.

« Ça en a surpris plus d’un : j’ai tout fait à l’envers de ce qui se pratique habituellement parce que pour moi, le travail d’un gars qui prépare les colis est pénible, mais indispensable à l’entreprise. Son poste est stratégique. Qu’il soit payé au Smic sous prétexte que son poste vaut le Smic sur le marché du travail, je trouve ça injuste. »
Mais il ne s’agit pas de jouer au Bisounours au détriment de la santé financière de l’entreprise. « Quand j’ai mis en place les 32 heures sur quatre jours, je me suis d’abord demandé si c’était viable et rentable. La boîte doit prospérer pour pouvoir lancer les futurs projets. » CQFD.
« Cette mesure est super-efficace, les salariés font en 32 heures le travail qu’ils faisaient en 35 heures et ils sont plus reposés, donc c’est génial. Maintenant que je vois les effets sur les équipes, je suis encore plus convaincu qu’avant. La com’, c’est pas mon truc, mais c’est important pour moi de parler de ce sujet et que d’autres entreprises comprennent que ça marche. »
L’indictaur clé
L’Excédent brut d’exploitation (EBE) est le chiffre d’affaires encaissé duquel on soustrait les consommations intermédiaires, les frais de personnel et certaines taxes. Rapporter l’EBE au chiffre d’affaires permet d’obtenir la marge EBE, ou rentabilité opérationnelle.
S’il est moins connu que le chiffre d’affaires, cet indicateur donne une meilleure image des performances de l’entreprise, de ce que lui rapporte réellement son activité. Sur 2021, LDLC prévoyait un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros. « On a raté cette cible, on a fait seulement 725 millions d’euros. Mais on a explosé la rentabilité. Elle était prévue à 6 % (60 millions d’euros sur un milliard), on a fait 70 millions d’EBE, soit une rentabilité opérationnelle de 10 %. »
Encourager l’entrepreneuriat
Il supprime aussi les bonus des commerciaux, convaincu que le système induit des perversités, des inégalités et décourage le travail collectif. « Ça n’a pas été facile à mettre en place, mais lors d’un séminaire, les commerciaux eux-mêmes m’ont remercié. »
Il permet aussi aux projets d’entreprise de certains salariés de se monter au sein de LDLC. C’est le cas d’Anikop, Blue Screen ou encore LDLC Connect, originellement « des idées de salariés venus nous demander si on pouvait les aider. On leur laisse une vraie autonomie. S’ils demandent un conseil, on est là, mais on ne se mêle pas de la gestion de la boîte au quotidien ».
Pour lui, si LDLC fait aujourd’hui partie des leaders, c’est grâce à l’état d’esprit non-conformiste de l’entreprise. « J’ai toujours des projets en tête. Mais il faudrait que je me clone, je ne peux pas tout faire. »
Ne faites pas la même erreur…
« En 2005, on a eu un grave problème logistique qui a failli couler la boîte. LDLC devait déménager son entrepôt. Le responsable logistique de l’époque gérait tout, sans vraiment de contrôle.
À la mise en route, à cause du logiciel de gestion de l’entrepôt, qui était mal configuré, aucun produit n’a pu en sortir durant quatre mois ! L’entreprise s’est alors retrouvée avec un chiffre d’affaires à l’arrêt et 35 000 commandes de retard. Cette catastrophe aurait pu nous tuer !
Finalement, nous avons développé un nouvel outil fonctionnel et le dirigeant suit maintenant les réunions qui concernent les déménagements. Sur un micro-projet, on peut laisser les gens faire des erreurs, ça permet de progresser. Mais sur des projets aussi stratégiques, impossible de tout déléguer sous prétexte qu’on a confiance. »