Janvier 2020, une tornade s’abat sur Digitevent, une PME parisienne de 25 salariés. L’entreprise, créée en 2013 par deux amis, Lucien Derhy et Jonathan Astruc, accompagne les entreprises dans l’organisation de leurs événements internes (colloques, conventions, assemblées générales) et externes (soirées de lancement de produits, inaugurations et salons professionnels).
« Nous fournissons un logiciel pour envoyer les invitations et gérer les inscriptions, nous créons un site internet dédié à l’événement et le jour J, sur place, nous nous occupons de contrôler l’accès. Nos clients, du moins avant le Covid, étaient des grands groupes qui nous sollicitaient trois ou quatre mois en amont de l’événement », décrit Jonathan Astruc.
Trois mille clients dans plus de 30 pays et un bureau au Brésil : les affaires se portent plutôt bien… jusqu’à ce fameux mois de janvier 2020. « D’un coup, les annulations sont arrivées en cascade et nous n’engrangions plus de nouvelles commandes, aucune suite n’était donnée à nos devis », se souvient le cofondateur de Digitevent, qui a dû, avec ses équipes, monter en deux mois une offre d’événements 100 % virtuels pour ne pas couler.
Janvier 2020, une tornade s’abat sur Digitevent, une PME parisienne de 25 salariés. L’entreprise, créée en 2013 par deux amis, Lucien Derhy et Jonathan Astruc, accompagne les entreprises dans l’organisation de leurs événements internes (colloques, conventions, assemblées générales) et externes (soirées de lancement de produits, inaugurations et salons professionnels).
« Nous fournissons un logiciel pour envoyer les invitations et gérer les inscriptions, nous créons un site internet dédié à l’événement et le jour J, sur place, nous nous occupons de contrôler l’accès. Nos clients, du moins avant le Covid, étaient des grands groupes qui nous sollicitaient trois ou quatre mois en amont de l’événement », décrit Jonathan Astruc.
Trois mille clients dans plus de 30 pays et un bureau au Brésil : les affaires se portent plutôt bien… jusqu’à ce fameux mois de janvier 2020. « D’un coup, les annulations sont arrivées en cascade et nous n’engrangions plus de nouvelles commandes, aucune suite n’était donnée à nos devis », se souvient le cofondateur de Digitevent, qui a dû, avec ses équipes, monter en deux mois une offre d’événements 100 % virtuels pour ne pas couler.
Dans les grandes entreprises, c’est au printemps 2020 que les travel managers ont commencé à sérieusement broyer du noir. Les frontières ferment, les quarantaines éclosent de-ci de-là, Air France déprogramme 360 vols rien qu’en mars et le budget que les entreprises consacrent aux voyages d’affaires chute de manière vertigineuse, passant de 29,9 milliards d’euros, en 2019, à 8,9 milliards, en 2020*.
Travel manager
« Celui qui gère l’ensemble de l’activité “Voyages et déplacements” de son entreprise », définit l’Apec, qui l’a intégré en 2014 dans son référentiel des métiers. La fonction existe depuis 1980, mais le « chargé de voyage » avait alors moins d’envergure et un(e) assistant(e) s’occupait de réserver les vols et les hôtels de son supérieur.
« Nous avons senti poindre chez nos adhérents une grande inquiétude sur l’avenir de leur métier », relate Michel Dieleman, président de l’Association française du travel management (AFTM). Une fois la page du virus tournée, les salariés voudront-ils de nouveau passer quatre ou cinq jours par mois en déplacement professionnel à l’autre bout du pays ou du monde ? Les entreprises vont-elles renouer avec les rencontres en chair et en os, cinq fois plus coûteuses que le virtuel ?
Le dogme du voyage utile
Pour le cabinet de conseil Epsa, le Covid laissera des traces. Certes, les affaires repartent : en 2021, les entreprises françaises devraient dépenser entre 11,5 et 14,6 milliards pour leurs voyages d’affaires, soit de 29 % à 64 % de plus qu’en 2020.
Mais c’est toujours moitié moins qu’en 2019*, et « à terme, entre 20 % et 30 % des déplacements n’auront plus lieu, du fait des outils digitaux, des nouvelles habitudes, et des enjeux environnementaux », anticipe le cabinet de conseil. « Cette crise tue moins les déplacements professionnels qu’elle n’installe durablement la notion de “voyage utile” », juge Michel Dieleman, président de l’AFTM.
À terme, entre 20 % et 30 % des déplacements n’auront plus lieu.
Epsa,cabinet de conseil.
Depuis 2020, Willis Towers Watson, un groupe international de courtage en assurance employant 45 000 salariés – dont 18 000 voyageurs réguliers –, réfléchit à deux fois avant d’envoyer un des siens en déplacement. Auparavant, l’entreprise faisait comme tout le monde : pour évaluer son budget « voyages », elle regardait les dépenses de l’année précédente et procédait à quelques ajustements mineurs.
Désormais, « nous mesurons l’impact des déplacements sur les revenus de l’entreprise pour identifier ceux qui doivent être maintenus et les rencontres qui peuvent se faire virtuellement », explique Emma Jones, la directrice des achats. Une négociation commerciale se prépare en visio, mais le contrat se signe sur place.
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Trouver le bon mix
Cette « parenthèse à distance » a fait prendre conscience aux entreprises ce qu’elles gagnaient ou perdaient avec le virtuel.
« Avant, pour séduire de nouveaux clients, les entreprises nous sollicitaient pour l’organisation de petits déjeuners dans des hôtels. Les webinaires se sont avérés plus efficaces, car ils coûtent moins cher, attirent plus de monde et génèrent plus de données. À l’inverse, pour fidéliser les clients, il faut du contact, une complicité. Les événements corporate, les assemblées générales et, de manière générale, toutes les manifestations à fort contenu s’adaptent très bien au virtuel. En revanche, cela n’a aucun sens pour les team buildings », conclut Jonathan Astruc, de Digitevent.
En septembre, la PME a réalisé son meilleur mois depuis sa création grâce, sans doute à ses trois offres : virtuelle, présentielle et un mix des deux l
* Selon les baromètres 2020 et 2021 du voyage d’affaires réalisés chaque année par le cabinet de conseil Epsa pour le salon des professionnels du tourisme IFTM. Méthode : un panel de 530 voyageurs d’affaires, travaillant dans des entreprises de toutes tailles, interrogés par questionnaire en ligne.
Pour les mathématiciens du monde entier, finies les retrouvailles à Marseille
Pascal Hubert, 52 ans, mathématicien, aime participer aux colloques organisés au Centre international de rencontres mathématiques (CIRM) sur le campus de Luminy, à Marseille. Chaque année, 4 700 participants, dont la moitié d’étrangers, y viennent et restent en général une semaine pour terminer un article, lancer un projet, échanger avec leurs pairs.
Le CIRM a son propre hôtel de 120 lits et son restaurant de 140 places. L’immersion est totale. En mars 2020 pourtant, le Covid a débarqué. Le CIRM a fermé ses portes, rouvert, refermé et rouvert à nouveau au fil des confinements. Les échanges ont continué… en virtuel.
Pascal Hubert raconte : « Sur la petite centaine d’événements organisés par an, une bonne moitié a été maintenue grâce au travail de mon prédécesseur, Patrick Foulon, qui a, dès 2013, équipé le centre pour filmer les conférences et les diffuser sur YouTube. Il a bien sûr fallu un peu s’adapter : mettre des bandes passantes plus larges, acheter des disques de stockage. Mais cela a fonctionné, et rapidement. » Et pour la suite ? « Nous allons maintenir un format hybride. Le virtuel ne remplacera jamais le présentiel, mais il a le mérite de pouvoir toucher plus de participants. »