Moins de 5 %. Valérie Pécresse, Yannick Jadot et six autres candidats à l’élection présidentielle ne sont pas parvenus à obtenir le nombre de voix nécessaire pour obtenir le remboursement maximal de leurs frais électoraux. Tous les cinq ans, pour les candidats les plus plébiscités, l’État prend en charge 47,5 % du plafond des dépenses de campagne, soit environ 8 millions sur les 16,851 millions d’euros autorisés. Les autres candidats (moins de 5% des voix) doivent se contenter de 4,75 % du plafond, soit autour de 800 000 euros. On parle de « remboursement forfaitaire versé par l’État ».
Pour certains, leur mauvais score est une surprise, au point qu’ils lancent un appel aux dons pour financer les dépenses déjà engagées mais d’autres s’y attendaient : Anne Hidalgo avait calibré ses dépenses de campagne d’après les résultats des sondages et les petits partis, eux, sont habitués à briguer la présidentielle à moindres frais.
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Alors, pour l’État, 2022 sera-t-elle l’élection la moins chère ? Pour l’Éco a tenu les comptes.
Commission nationale des comptes de campagne et du financement des partis politiques
Autorité administrative mise en place le 19 juin 1990 pour réguler les revenus et dépenses des partis politiques, notamment en période électorale.
En 2022, 12 candidats se sont présentés à l’élection présidentielle et trois, Emmanuel Macron, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, ont trusté plus de 70 % des votes. Éric Zemmour a réalisé 7,1 %.
Jean-Luc Mélenchon et Éric Zemmour, parce qu'ils ont réalisé plus de 5 % mais raté le second tour, peuvent prétendre à 8 millions d'euros de financement étatique.
Avec deux semaines de campagne supplémentaires, les deux candidats présents au second tour, Emmanuel Macron et Marine Le Pen, ont droit à un plafond de dépenses plus élevé. Comme ce dernier constitue la base du remboursement, ils ont donc chacun le droit, non pas à 8 millions d'euros comme leurs collègues vaincus, mais 10 millions d'euros de la part de l'État.
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Huit candidats ne sont pas parvenus à franchir la barre des 5 % et n’accèdent donc pas au remboursement maximal de leur frais de campagne. Si leurs comptes sont approuvés, ils recevront chacun 800 000 euros, pour une enveloppe globale de 6,4 millions d’euros.
En Chiffres
3e
présidentielle la moins chère depuis 1990
Le verdict tombera en décembre, mais la Commission estime le montant maximal de l’enveloppe à 43,4 millions d’euros.
« Ces calculs sont, pour le moment, théoriques » nous répond la CNCCFP, « car le remboursement dépend également de l’apport personnel utilisé pour les dépenses électorales ». Le Covid-19 et la guerre en Ukraine ayant bousculé la campagne, entraînant une diminution du nombre de meetings et peu de tractages, il est probable que les candidats n’ont pas dépensé à hauteur du plafond autorisé.
Bien que les partis traditionnels soient tombés sous la barre fatidique des 5 %, donnant l'impression d'une élection exceptionnelle, 2022 n'est pas la campagne la moins chère depuis la loi sur les dépenses électorales de 1990.
Quand les Français ont élu Macron en 2017, il affrontait 10 autres candidats. Sept ne sont pas parvenus aux 5 % des suffrages, portant à 41 millions d’euros le montant du remboursement des dépenses de campagne.
Mais c'est 2012 qui remporte la médaille, à cause de l’Affaire Bygmalion.
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Nicolas Sarkozy, le président de la République alors en poste a obtenu 27,18 % des suffrages au premier tour, mais ses comptes ont été rejetés par la Commission pour un dépassement du plafond autorisé. Il n’a donc pas été remboursé de ses dépenses électorales.
Cette année-là, 10 candidats s’étaient présentés et 5 avaient obtenu plus de 5 % des voix. Le montant du remboursement forfaitaire versé par l’État s’est élevé à 36,23 millions d’euros. Cette élection aurait coûté 10 millions d’euros supplémentaires si les comptes du prétendant à l'Élysée avaient été conformes.
L’élection présidentielle la plus chère de l’Histoire a eu lieu en 2002. Le nombre de prétendants a été exceptionnel cette année-là : 16 candidats se sont présentés, et sept ont dépassé le seuil fatidique.
Les plafonds de dépenses autorisés étaient aussi plus élevés : 14,8 millions d’euros pour les candidats du premier tour, 19,76 pour les deux présents au second tour, portant les remboursements maximums respectivement à 9,88 millions et 7,4 millions - 739 800 euros pour ceux ayant obtenu moins de 5 % du suffrage. Bruno Mégret (FN) n’a pas reçu son remboursement : après épluchage de ses comptes, il s’est avéré qu’il avait reçu en nature plus que ce qu’il avait déclaré. Le montant total du remboursement s’est finalement élevé à 53,4 millions d’euros.
Le coût de la défiscalisation des dons aux candidats
Le score de Valérie Pécresse est-il une bonne nouvelle pour les finances publiques ? La réponse est nuancée. Avec 4,8 % des suffrages, elle ne sera remboursée que de 800 000 euros par l’État. Or, elle n’avait pas prévu un tel échec : sa campagne a coûté environ 15 millions d’euros selon BFM-TV. La candidate du parti Les Républicains en appelle donc aux dons et ce mode de financement a aussi un coût pour l’État.
Les dons aux partis politiques ouvrent en effet droit à une réduction d’impôt de 66 %. Si jamais, elle parvenait à lever les cinq millions d’euros pour lesquels elle est personnellemnt endettée, cela pourrait coûter in fine jusqu’à 3,3 millions d’euros aux finances publiques.
C'est là un montant théorique maximal car tous les donateurs ne sont pas imposables (seuls 43 % des foyers fiscaux français le sont, mais a priori, l’électorat des Républicains en fait partie) et impossible de savoir si les donateurs se souviendront de demander cette réduction d’impôt au moment de remplir leur déclaration de revenus.
Dans tous les cas, le manque à gagner fiscal pour l’État restera inférieur au coût du remboursement de la moitié des frais de campagne (8 millions d’euros).