Economie

Subventionner pour réindustrialiser, est-ce que ça vaut le coup ?

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Les États font tout pour attirer les industriels de demain sur leur territoire. Ces derniers en profitent pour faire monter les enchères. 

Lucile Chevalier
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Illustration de l'article Subventionner pour réindustrialiser, est-ce que ça vaut le coup ?

© REUTERS

La négociation a été rondement menée. Pat Gelsinger, le directeur général d’Intel, a obtenu de Berlin une rallonge de 3 milliards d’euros, pour venir implanter Outre-Rhin, sa méga-usine de semi-conducteurs. Avec les 7 milliards, déjà accordés l’an dernier, cela en fait dix. Victorieux, Intel s’en est ensuite allé en Italie pour obtenir là aussi un geste supplémentaire, pour bâtir, dans la région de Venise, une usine d’assemblage. Pas sûr que l’État italien résiste bien longtemps. « En implantant de gros sites, ces groupes réindustrialisent un territoire, créent des milliers d’emplois et contribuent à la souveraineté économique d’un pays » explique Anaïs Voy-Gillis, directrice associée du cabinet de conseils aux entreprises June Partners, et auteure de Renaissance industrielle : des mots aux actes (ed. Cahier Français, 2022).

Quel État ferait la fine bouche ? Pas la France, qui aurait allongé un milliard d’euros d’aides publiques pour que le taïwanais ProLogium installe son usine à batteries à Dunkerque. À croire que désormais, le seul argument valable des États pour attirer les industriels, c’est le carnet de chèques. « Le 1er facteur décisif c’est l’existence d’un marché. Ainsi, ProLogium cherchait à s’implanter en Europe, car le marché de la voiture électrique y étant mature, il bénéficiera de nombreux débouchés. Il a choisi la France. Le 2e facteur, ce sont les infrastructures et les équipements. Sur ce volet, l’Europe, avec la flambée et l’imprévisibilité des coûts de l’énergie, est nettement moins attractive que l’Amérique du Nord. Les semi-conducteurs voyageant très bien, Intel a probablement dû insister sur cette faiblesse dans ses négociations avec le gouvernement allemand. Sont également pris en compte dans le choix d’implantation, la disponibilité du foncier et de personnels qualifiés. Enfin, viennent les subventions », nuance Vincent Charlet, délégué général du think-tank « La Fabrique de l’industrie ». Pas le premier ni l’unique argument donc, mais argument quand même, qui sonne et trébuche dans le cas d’Intel.

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