Notes : Technique : 4/5 – Environnement : 5/5 – Insertion : 5/5.
L’hydrogène, c’est le H dans H2O, la molécule de l’eau. Ce gaz, inconnu du grand public il y a peine un an, suscite depuis beaucoup d’espoir : celui d’une industrie non seulement verte, mais créatrice d’emplois. « Les énergies fossiles vont disparaître un jour, les ressources s’épuisent. Le nucléaire fait débat. L’hydrogène, c’est l’énergie de demain », résume Julien Weyrich, responsable de la division Ingénieurs et techniciens du cabinet de recrutement Page Personnel.
Séparé de l’oxygène, l’hydrogène permet de produire de l’énergie de manière quasi illimitée au vu de l’abondance d’eau sur terre, pour faire fonctionner les usines, chauffer nos maisons, faire rouler nos voitures, voguer les navires ou encore faire voler les avions.
En Chiffres
7,2 milliards
D'euros seront investis d'ici à 2030 par la France pour développer la filière hydrogène vert.
On le dit « vert » car pour séparer le O (oxygène) du H (hydrogène), on s’appuie sur les énergies renouvelables (éolien, hydraulique). Et « la combustion de l’hydrogène ne produit aucun gaz carbonique, uniquement de l’eau », souligne l’Association française pour l’hydrogène et les piles à combustibles (AFHYPAC).
Des projets et quelques expériences existent déjà depuis plusieurs années. Il y a un an, le gouvernement français a affiché sa volonté de passer à la vitesse supérieure. Le 8 septembre 2020, il a annoncé investir d’ici à 2030, 7,2 milliards d’euros pour développer sa production, démocratiser ses usages et construire une nouvelle filière de « portée internationale » créatrice de « 50 000 à 100 000 emplois ».
Prospecter les entreprises de fret
Nous n’y sommes pas encore. « Aujourd’hui, l’hydrogène vert, c’est 5 % des projets de recrutements dans le domaine de l’énergie. Mais cela va prendre de l’ampleur », juge Jens Bicking, dirigeant d’Elatos, cabinet de recrutement spécialisé dans les métiers de l’énergie et de l’environnement.
Les premiers sollicités pour construire cette filière sont les chefs de projet. Serge Meyblum, pas encore trentenaire, en fait partie. Il est chargé des projets Innovation au sein de l’Agence régionale énergie climat (Arec) de l’Occitanie. « Mon rôle est d’identifier, de monter et de développer des projets autour de l’hydrogène dans lesquels l’Arec pourrait investir », explique-t-il.
La région consacre une enveloppe de 150 millions d’euros sur la période 2019-2030 pour soutenir le déploiement sur son territoire d’usines produisant de l’hydrogène et de stations de distribution. Serge a ainsi participé à l’implantation, au sein de l’aéroport de Toulouse, d’une station de production et de distribution d’hydrogène vert (projet baptisé HyPort) qui sera mise en service à la fin de l’année et dans laquelle la région a investi 2,6 millions d’euros.
« J’identifie d’abord les potentiels utilisateurs, autrement dit ceux qui pourraient utiliser l’hydrogène. Les entreprises de fret, avec leur flotte de camions sont par exemple de potentiels clients. Ensuite, je cherche les structures, entreprises et acteurs sur lesquels nous pourrions nous appuyer pour développer l’offre. Enfin, je soutiens le dossier auprès de la commission de financement de l’Arec », résume-t-il.
Serge est ingénieur de formation, avec une spécialisation en énergie et environnement et a un master 2 d’économie spécialisé dans le secteur de l’énergie.
Quelles formations ?
« Neuf fois sur dix, les entreprises recherchent des profils techniques », observe le cabinet Page Personnel. La filière étant en train d’émerger, elle a besoin d’ingénieurs avec une expertise en énergie (gaz et énergies renouvelables) ou en batteries pour déchiffrer le terrain et trouver des solutions techniques aux nouveaux problèmes qui se présentent.
Un chef de projet n’est pas seulement un expert, c’est aussi un manager. Il pilote une équipe, analyse, anticipe et tranche. N’espérez donc pas décrocher le poste à l’issue de vos études. Il faut un peu de bouteille – cinq à six ans d’expérience comme assistant de chef de projet – pour se voir confier une équipe.
La source éolienne
« Nous sommes dans une industrie naissante, le terrain est à défricher, les problèmes sont nouveaux. Les ingénieurs sont capables de trouver les solutions pour surmonter des défis qui sont d’abord techniques. L’enjeu est de pouvoir produire et transporter un gaz, donc potentiellement explosif, en toute sécurité », explique Julien Weyrich de Page Personnel.
Nous avons deux types de chefs de projet : ceux qui se chargent de concevoir et de déployer les usines, et ceux en R & D qui trouvent des solutions techniques comme exploiter l’énergie des éoliennes offshore pour produire l’hydrogène.
Antoine Hamon,directeur des opérations de Lhyfe.
Chez Lhyfe, entreprise nantaise créée en 2017 qui conçoit, construit et exploitera des usines de production d’hydrogène, les cinq chefs de projet sont tous ingénieurs et issus majoritairement du secteur des énergies renouvelables, avec de cinq à 10 ans d’expérience au compteur.
« Ils gèrent des équipes de 10 personnes, il faut avoir un peu de bouteille pour être un bien manager », justifie Antoine Hamon, le directeur des opérations, avant de poursuivre. « Nous avons deux types de chefs de projet : ceux qui se chargent de concevoir et de déployer les usines, et ceux en R & D qui trouvent des solutions techniques comme exploiter l’énergie des éoliennes offshore pour produire l’hydrogène. »
En 2022, l’entreprise passera de 45 à 100 salariés et cinq nouveaux chefs de projets seront recrutés.
Les applications de l’hydrogène vert
« L’hydrogène, en théorie, peut s’utiliser partout », avance Serge Meyblum, chargé de projet innovation chez l’Arec Occitanie. Ce gaz fait rouler les taxis parisiens, chauffe les logements et fera voler un jour des avions.
Taxis Ils sont bleus, avec de-ci de-là quelques nuages et roulent à l’hydrogène sur les routes d’Île-de-France. Ce sont les taxis de la compagnie Hype, créée en décembre 2015. Aujourd’hui, il existe 600 de ces Toyota Mirai. Mathieu Gardies, fondateur et dirigeant de cette flotte de taxis à hydrogène, ambitionne de présenter 10 000 véhicules à l’été 2024, pour les Jeux olympiques de Paris.
Habitat 100 logements sont chauffés par un mix hydrogène (20 %) et de gaz naturel, à Cappelle-la-Grande, près de Dunkerque. Ce projet Grhyd (Gestion des réseaux par l’injection d’hydrogène pour décarboner les énergies), lancé en 2018 par les collectivités locales et l’Ademe, est coordonné par Engie. Avec ce mélange, l’énergéticien français estime que les émissions de dioxyde de carbone lors de la combustion de gaz pourraient être réduites de 7 à 8 %.
Aérien L’« avion à hydrogène » d’Airbus devrait voler à partir de 2035. La crise sanitaire a accéléré le projet. Le gouvernement a imposé qu’un dixième des 15 milliards d’euros d’aides soit consacré au développement d’un « avion vert ».