Economie
Chronique. Du besoin de mieux gouverner les technologies pour sauver le climat
Pour Rohinton P. Medhora, économiste canadien, l'innovation peut jouer un rôle clé dans la lutte contre le changement climatique. Seulement, le système actuel d'innovation n'est pas adapté pour diffuser les technologies prometteuses et des réformes sont nécessaires pour promouvoir la recherche, comme cela a été fait pour les vaccins COVID-19. Chronique.
Rohinton P. Medhora, Économiste canadien, spécialiste des relations internationales et l’économie du développement, il est membre et ancien président du Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale (CIGI)
© Dall-E
En octobre, en amont de la COP 27, j’ai participé à la conférence inaugurale des Dolomites sur la gouvernance mondiale du changement climatique. Parmi la myriade de sujets abordés, l’un d’eux m’a marqué : le rôle que l’innovation et la technologie peuvent jouer dans la création d’un monde meilleur, si certaines conditions sont réunies.
Prenons les vaccins contre le Covid-19. Grâce à des années de recherche fondamentale sur l’ARN messager, ils ont été développés et mis à la disposition du public en un temps record. C’est le résultat d’une convergence d’urgence entre une recherche fondamentale, de généreuses subventions publiques, des régimes de test assouplis et des marchés garantis pour le produit final. Le privé et le public ont travaillé main dans la main pour réduire les risques inhérents au processus coûteux et risqué du développement pharmaceutique.
À l’échelle mondiale, on a lancé l’accélérateur d’accès aux outils Covid-19 (ACT) pour raccourcir les délais de développement, de production et d’accès équitable aux tests, traitements et vaccins. L’Inde et l’Afrique du Sud ont proposé d’assouplir les règles de la propriété intellectuelle – « dérogation ADPIC » – pour permettre une diffusion globale, rapide et bon marché des vaccins. Certes, l’accélérateur ACT reste terriblement sous-financé et les taux de vaccination sont encore très bas dans les pays les moins avancés, mais ce faisceau de dispositifs est inspirant.
Contre le changement climatique, le progrès technologique joue et jouera un rôle de premier plan.Rohinton P. Medhora
Considérons maintenant la lutte contre le changement climatique. S’il émerge une technologie révolutionnaire – dans la séquestration du carbone ou le stockage des cellules solaires –, nous voudrions qu’elle soit utilisée partout et rapidement (comme le vaccin !).
Mais notre système d’innovation actuel n’est pas conçu pour cela. La recherche est concentrée dans quelques régions avancées du monde et les régimes de propriété intellectuelle entravent, au lieu de promouvoir, un accès rapide aux nouvelles technologies – même quand, comme pour le Covid, des ressources considérables sont mobilisées. Comment avancer ?
Parmi les exemples célèbres de coopération scientifique utilisée pour atteindre un objectif d’intérêt public, on trouve le CGIAR, réseau mondial de centres de recherche agricole qui a produit des avancées significatives dans les technologies et les politiques alimentaires et agricoles ; le CERN, consortium de pays pratiquant la recherche fondamentale et appliquée en physique ; et bien sûr, la mission sur la Lune.
Chaque initiative a ses propres caractéristiques, aucun modèle ne peut se plaquer sur la science du climat. Mais tous ces modèles ont des points communs : identification d’un objectif, exploitation de la meilleure science possible, financement adéquat, gestion efficace et production de résultats concrets qui appartiennent à l’humanité.
La technologie n’est pas la seule réponse au changement climatique. Mais c’est une partie essentielle de l’ensemble des solutions requises si nous voulons éloigner notre planète d’un effondrement total. La gouvernance de la technologie est donc une compétence vitale pour la planète.
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