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La rénovation thermique pour les familles précaires : 5 chiffres pour tout comprendre

La loi Climat entend transformer les logements les plus énergivores. Classés F et G, ils sont souvent habités par des familles précaires. Les mesures gouvernementales sont-elles efficaces pour optimiser la rénovation énergétique des bâtiments, même auprès des ménages les moins aisés ? Réponse en 5 chiffres.

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Le 4 mai 2021 a marqué l'aboutissement de discussions entre le gouvernement et les membres de la Convention citoyenne pour la transition écologique. Les députés ont voté la loi Climat et Résilience à l’Assemblée nationale. Les débats se poursuivent désormais au Sénat. Un point a particulièrement retenu notre attention : la rénovation énergétique de l'habitat, particulièrement privé.

En France, le bâtiment est le secteur qui consomme le plus d’énergie, avec 45% de la consommation finale d’énergie, selon le ministère de l'Environnement. 

Pour forcer les propriétaires à réduire leur consommation d'énergie, les députés proposent d'interdire progressivement à la location les passoires thermiques, c'est-à-dire les logements dont la performance énergétique est la plus basse, F et G. 

Ces rénovations représentent à la fois un enjeu environnemental et social, car c’est là qu’habitent souvent les familles les précaires. Tout l'enjeu réside dans l'incitation des propriétaires aux travaux, par le biais d'avantages (des aides sociales) ou des contraintes (des sanctions). 

DATA - Les logements sociaux, moins énergivores que le parc privé

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La performance énergétique des logements sociaux est globalement meilleure que celle de l’ensemble des logements français : un logement social sur trois (37 %) est étiqueté A, B ou C) contre seulement un logement sur quatre (25 %) si l’on considère l'ensemble du parc. Aussi, 17% des logements français sont des « passoires énergétiques » (étiquette énergie F ou G), contre seulement 7 % des logements sociaux.

En partenariat avec Spallian, révélateur de data.

16 000€ pour gagner une classe énergétique 

D’après une étude de prix publiée par L’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) en 2019, une maison individuelle a besoin de en moyenne 16 000 euros pour gagner une classe énergétique (de F à E, par exemple) et de en moyenne 26 000 euros pour en gagner deux, car évidemment, le prix dépend des matériaux utilisés, de l’état initial de l’habitation et de l’intensité des travaux réalisés.

De manière générale, les occupants rénovent leur habitation en plusieurs étapes, chaque opération étant comprise entre 5 000 et 7 000€ pour un logement de moins de 80m2. 

8,7 millions

Selon l’étude de 2016 de l’Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE), il existe 8,7 millions de ménages en précarité énergétique, soit près d’un ménage sur trois.

Créé en 2011, l’ONPE dispose de plusieurs indicateurs pour calculer l’ampleur de la précarité énergétique.

D’abord le taux d’effort énergétique (TEE) reflète le fait que tout foyer consacrant plus de 10% de son revenu aux dépenses énergétiques est considéré en situation de précarité énergétique : en 2013, 2,8 millions de ménages en France se trouvent dans cette situation.

Un autre indicateur est celui des bas revenus, dépenses élevées (BRDE). Il affecte les familles dont les dépenses énergétiques sont élevées par rapport à leur salaire. Ils sont 4,3 millions en France. 

Finalement l’indicateur du ressenti d’inconfort révèle la sensation de froid dans le logement, par exemple. 1,6 million de Français en souffrent.

2028, fin de la classe F

Sur 36 millions de logements en 2020, 4,8 millions étaient des passoires thermiques F et G, aux rendement énergétiqus les plus bas.

La loi Climat et Résilience s’inscrit dans la stratégie qui consiste à réduire de 40% d’ici 2050, par rapport à 1990, les émissions de gaz à effet de serre.

La loi prévoit d’interdire à terme la location des logements aux performances énergétiques trop basses. Un “décret décence” distinguera les logements dignes d’être habités de ceux qui ne le sont pas. 

À compter de 2025, 600 000 logements classés G seront considérés comme inaptes à l’habitat, auxquels s’ajouteront 1,2 million de logements de classe F à partir de 2028.

L'amendement proposé par le rapporteur Mickael Nogal (LREM) a permis d’élargir cette mesure aux 2,6 millions de logements classés E, à partir de 2034. 

Pour l’instant, le gouvernement a préféré cibler les propriétaires bailleurs, privés ou sociaux, qui mettent leur bien en location.

Danyel Dubreuil, responsable de l’initiative Rénovons !, qui lutte contre la précarité énergétique, explique pourquoi : “ces bailleurs à plus de 80% possèdent des revenus importants. Investir dans leur logement ne leur pose pas de problèmes financiers”. 

Mickaël Nogal corrige : “Nous ne sommes pas favorables à une obligation généralisée de rénovation, qui toucherait les propriétaires occupants eux-mêmes leur logement".

Si les propriétaires concernés louent quand même malgré une mauvaise performance, alors le tribunal pourra appliquer des sanctions, comme par exemple permettre au locataire de ne pas payer le loyer.

220 000 dossiers 

Depuis le 1er janvier 2021, l'aide MaPrimeRenov’ a été demandée par 220 000 ménages. Cette aide a été lancée en 2020 dans le but d’aider tous les propriétaires occupants à rénover leur logement pour le rendre énergétiquement viable. 

Emmanuelle Wargon, ministre du Logement, se félicite de la réussite de cette aide qui permettrait d’atteindre les 800 000 dossiers déposés en fin d’année, soit le double de l’objectif fixé par le gouvernement. 

La nouveauté en 2021, c'est que MaPrimeRenov' a été élargie aux propriétaires bailleurs. Ce sont eux et pas leurs locataires qui peuvent la demander. 

Tout dépendra donc de la relation établie entre le propriétaire et le ou les locataires. Un système pas très efficace "qui dépend de la bonne volonté du propriétaire", se désole Danyel Dubreuil. 

“Les aides telles qu’elles sont conçues aujourd’hui sont adressées à ceux qui en ont le moins besoin : les propriétaires qui n’habitent pas dans des passoires thermiques, qui ne sont pas dans des situations de précarité, qui ont la possibilité de se renseigner par eux mêmes, qui savent utiliser les dispositifs d’aides financières et qui ont moins besoin d'accompagnement" rajoute-t-il.

2 715 euros 

L’aide MaPrimeRenov se monte “en moyenne 2 715 euros”, selon les déclarations de la ministre du Logement dans une interview accordée au Parisien

Le montant de cette aide peut aller jusqu’à 90% du devis pour les ménages les plus modestes.

Elle est cumulable avec d’autres aides énergétiques comme le chèque énergie, la prime Effy, l’Éco-prêt à Taux Zéro ou les aides d’Action Logement.

Mais l’opposition considère qu’elle reste insuffisante. À ses yeux les montants des aides sociales devraient être relevés. 

Le système tel qu’il a été conçu “incite davantage à la rénovation par geste, c’est-à-dire élément par élément, au détriment d’une rénovation énergétique totale”, poursuit l’expert. 

À ce système d’aides insuffisant, s’ajoute l’état du secteur de la construction en lui-même qui n’est pas préparé pour répondre à l’objectif du gouvernement, fixé à 500 000 rénovations par an. 

Les professionnels ne sont pas assez accompagnés dans l’adaptation de leur métier aux nouvelles problématiques climatiques. Par exemple, dans ce projet de loi, on ne précise pas ce qui va être mis en place pour permettre aux entreprises du secteur et notamment aux artisans d’adapter leur capacité à ce futur marché.
Danyel Dubreuil

Responsable de l’initiative Rénovons !

Dans un marché qui comptait 471 300 entreprises en 2017, selon les chiffres de l’INSEE, uniquement 72 900 parmis elles ont obtenu la certification de l’organisme Qualibat. 

Ce dernier permet de certifier les entreprises de travaux dans le domaine de la rénovation énergétique pour qu’elles soient en mesure de demander la part d’aide publique liée à la réalisation des travaux.   

Le secteur de la construction demeure attaché en priorité au maintient de l’emploi existant. Il a tendance à négliger la transformation de ses métiers.