12 pages de contrat
Le contrat de concession tripartite, signé en janvier 1887 par la Ville de Paris, l’État et Gustave Eiffel, est un modèle de concision et de simplicité : Eiffel construit le monument et pour rémunération, il obtient le droit de l’exploiter, en percevant les recettes des entrées payées par les visiteurs, pendant l’Exposition universelle puis pendant les 20 ans qui suivront.
3 banques partenaires
La Ville de Paris ne peut subventionner la construction qu’à hauteur de 1,5 million de francs. Pour trouver les 5 millions manquants aux travaux, qu’il estime à 6,5 millions, Eiffel se tourne vers les banques. L’accord signé le 3 septembre 1888 (sept mois avant la fin de la construction) avec trois d’entre elles (la Banque franco-égyptienne, le Crédit industriel et commercial et la Société générale) implique la création de la Société de la tour Eiffel (STE), à laquelle Eiffel apporte son droit d’exploitation de la tour.
Ce droit vaut-il 5 millions ? Plutôt 16, selon Jules Charton, le commissaire aux apports chargé d’évaluer les recettes attendues.
12 pages de contrat
Le contrat de concession tripartite, signé en janvier 1887 par la Ville de Paris, l’État et Gustave Eiffel, est un modèle de concision et de simplicité : Eiffel construit le monument et pour rémunération, il obtient le droit de l’exploiter, en percevant les recettes des entrées payées par les visiteurs, pendant l’Exposition universelle puis pendant les 20 ans qui suivront.
3 banques partenaires
La Ville de Paris ne peut subventionner la construction qu’à hauteur de 1,5 million de francs. Pour trouver les 5 millions manquants aux travaux, qu’il estime à 6,5 millions, Eiffel se tourne vers les banques. L’accord signé le 3 septembre 1888 (sept mois avant la fin de la construction) avec trois d’entre elles (la Banque franco-égyptienne, le Crédit industriel et commercial et la Société générale) implique la création de la Société de la tour Eiffel (STE), à laquelle Eiffel apporte son droit d’exploitation de la tour.
Ce droit vaut-il 5 millions ? Plutôt 16, selon Jules Charton, le commissaire aux apports chargé d’évaluer les recettes attendues.
Son calcul prend en compte les visites constatées sur les attractions de l’exposition universelle de 1878, l’affluence escomptée pour celle de 1889 (et les 20 ans suivants), les tarifs différentiels prévus en fonction du jour de la semaine, les prévisions météorologiques, les heures de lumière du jour et les calculs faussés d’Eiffel sur le nombre de visiteurs qui prendront l’escalier ! La capacité des ascenseurs étant déterminante, la promesse d’Eiffel est stipulée dans le contrat : 2 350 passagers/heure du premier au deuxième étage, 750 personnes/heure du deuxième au troisième étage.
Créer 5 millions de francs
En change de l’apport de ses droits, Eiffel reçoit 10 000 « actions ordinaires » de 500 francs de nominal. Les banques s’engagent à lui en acheter la moitié à la livraison de la tour et le reste sera mis sur le marché, avec une plus-value d’au moins 270 francs. Il reçoit aussi 10 200 « parts de fondateur » pour rémunérer son rôle de développeur du projet.

Les actions ordinaires sont en réalité une sorte de prêt, elles ont vocation à être remboursées avec les premières recettes d’exploitation. Une fois que tous les investisseurs seront remboursés, elles se transformeront en actions de jouissance et leurs détenteurs partageront les dividendes d’exploitation avec les détenteurs des parts de fondateur.
100 % du risque
Eiffel est contraint de réussir son œuvre sous peine de faillite, puisque la subvention de l’État et la Ville de Paris ne sera versée, en trois fois, qu’à partir de la réalisation du premier étage. Le montage réalisé avec les banques veut qu’Eiffel ne reçoive pas de rémunération avant que le capital financé par les actionnaires de départ ne soit remboursé.
Pendant la durée de la construction, c’est bien Eiffel qui porte le risque. Celui-ci est ensuite transféré aux actionnaires. Les banques prêteuses ont pris au moins 50 % du risque d’exploitation, en acceptant d’acheter de manière ferme la moitié des actions de la STE. En échange, elles réclament 45 % des parts de fondateurs d’Eiffel, une opération qui sera très profitable.
Les 3 casquettes de Gustave
Le montage d’origine de la tour Eiffel appartiendrait aujourd’hui à la catégorie des « financements de projet », comme une autoroute à péage qui consiste à financer des actifs non pas sur la qualité du crédit d’une société ou des garanties apportées par ses actionnaires, mais sur la trésorerie dégagée par le projet lui-même.
La finance ou le financement
Activité consistant à fournir l'argent nécessaire à la réalisation d'une opération économique. Ce domaine concerne aussi bien les individus, les ménages que les entreprises publiques ou privées, mais aussi les États.
De tels projets sont isolés dans une société ad hoc dont la durée de vie coïncide avec le projet, comme la STE. Contrairement aux projets modernes, Eiffel joue plusieurs rôles : concessionnaire en son nom propre, responsable sur la totalité de son patrimoine des engagements de la société de construction de la tour, propriétaire des actions de la société d’exploitation, avant de les vendre aux banques. Ce financement tranche avec les modèles du XIXe siècle : émissions obligataires classiques pour les chemins de fer ou bons à lots pour l’Exposition universelle.
Un siècle d’accords
L’accord initial organise l’exploitation de la tour Eiffel pour une durée plus longue que prévu, pendant un siècle, au gré d’une succession d’extensions de contrat entrecoupées de réquisitions pendant les deux guerres mondiales. En 1979, l’intérêt accru, avec l’explosion du tourisme et un désir de rénovation, pousse la Ville de Paris à reprendre le contrôle de la tour.

Les insolites de la tour
1. Il a fallu 2 ans, 2 mois et 5 jours pour achever la construction, par 250 ouvriers sur le chantier et 150 en atelier ; 2 500 000 rivets ont été nécessaires pour assembler les 18 038 pièces en fer.
2. Tout juste 80 centimes de l’heure (env. 2,40 euros), c’est la rémunération des ouvriers ; deux grèves interviennent, la première donne lieu à une augmentation et une dotation en vêtements en peau de mouton.
3. Oups ! 6 millimètres d’écartement imprévu entre les quatre piliers au moment de leur jonction pour réaliser le second étage. Deux des piliers sont écartés et soulevés simultanément pour y remédier et parvenir à raccorder les pièces.
4. Une fraude à la fausse billetterie rapporte environ 1,5 million de francs à ses auteurs sur une période de neuf ans à partir des années 1980.
Pour aller plus loin
L’Aventure de la tour Eiffel. Réalisation et financement, Michel Lyonnet du Moutier, La Sorbonne, 2009