2022, année activiste ? Sur les marchés financiers, en tout cas, c’est incontestable : 235 campagnes ont été menées par des investisseurs activistes l’année passée. Tout proche du record connu (249) de 2018. Ces investisseurs « activistes » prennent des parts dans le capital d’une entreprise (le plus souvent, entre 5 et 10 %) pour en attaquer la stratégie.
Leur but est clair : améliorer la performance de l’entreprise, faire monter le cours de son action en Bourse et in fine, s’enrichir, eux et les clients qui leur ont confié leur épargne.
La cible type des activistes ? En 2022, c’est une entreprise de la tech ou de l’industrie. Car face aux tensions d’approvisionnement et au ralentissement post-Covid, leur valorisation boursière a baissé.
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Des méthodes qui varient
Plus généralement, les fonds « activistes » cherchent un décalage : une entreprise aux comptes et au potentiel solides, mais dont le cours de Bourse est jugé trop bas – du fait d’erreurs stratégiques, selon eux.
Les méthodes, elles, varient du tout au tout. Le plus souvent, l’investisseur activiste cherche à empêcher ou encourager une opération (acquisition, fusion, cession d’une activité).
Il peut aussi réclamer le départ d’un dirigeant, comme ce fut le cas chez Danone en 2021 : deux fonds, Bluebell Capital Partners et Artisan Partners, ont obtenu l’éviction de son P.-D.G. Emmanuel Faber après avoir martelé qu’il ne parvenait pas à concilier ambition écologique et performance en Bourse.
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L'activisme se répand
Dans un autre cas d’école, Amber Capital s’est attaqué, entre 2018 et 2021, au groupe de médias et d’édition Lagardère. Après avoir cherché à changer sa structure et sa gouvernance, le fonds a été jusqu’à porter plainte contre son dirigeant, Arnaud Lagardère, l’accusant d’abus de biens sociaux, d’irrégularités dans ses comptes personnels ou d’acheter les votes d’autres actionnaires lors des conseils d’administration.
S’il est traditionnellement l’apanage des très spéculatifs hedge funds, l’activisme se répand. Face à la concurrence de la gestion dite « passive » (des fonds qui ne font qu’imiter les mouvements de la Bourse), moins chère, certains gestionnaires de fonds plus sages émettent aussi des exigences auprès des entreprises, pour conserver leurs clients avec ces méthodes plus audacieuses.
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Dégâts humains
L’impact de l’activisme reste, lui, un vrai sujet de controverse scientifique : si des études historiques jugent que les campagnes créent de la valeur boursière, une étude menée à HEC en 2021 concluait à une baisse de 4,9 % de la valeur de l’action quatre ans après, soulignant le court-termisme des fonds activistes.
Ces derniers provoqueraient aussi des dégâts humains (en accélérant les départs) et écologiques (en abaissant les engagements de responsabilité sociale des entreprises).
À moins qu’ils ne militent justement pour plus d’engagements : le fonds britannique TCI a imposé à Vinci de publier ses émissions de CO2 en 2021. Selon Lazard, 4 % des campagnes réclamaient ainsi, en 2022, plus d’engagements écologiques et sociaux.
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