La quatrième révolution industrielle est en marche. Portée par la vague du numérique, elle se manifeste au travers de technologies de rupture, au premier rang desquelles les imprimantes 3D.
Avec elles, un fichier virtuel de données se transforme en objet physique bien réel. Un vrai tour de magie. Au lieu d’injecter de l’encre sur du papier, ces imprimantes ajoutent de la matière, couche après couche, en suivant les instructions du fichier. D’où le nom de « fabrication additive » également utilisé pour ce procédé né il y a une trentaine d’années. Il se déroule à l’inverse de l’usinage traditionnel, qui part d’un bloc pour fabriquer une pièce par enlèvement de matière.
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grands systèmes d'impression 3D métal en 2017 contre 983 en 2016, soit une hausse de 80%
La médecine a aussi été parmi les premières à faire appel à ces machines pour réaliser des prothèses sur mesure (en chirurgie, dentisterie, audition…). Elles trouvent place également chez certains artisans (bijoutiers, chocolatiers…). Et elles commencent à se développer dans le bâtiment.
La médecine a aussi été parmi les premières à faire appel à ces machines pour réaliser des prothèses sur mesure (en chirurgie, dentisterie, audition…). Elles trouvent place également chez certains artisans (bijoutiers, chocolatiers…). Et elles commencent à se développer dans le bâtiment.
Leurs limites sont sans cesse repoussées comme le montrent les recherches en matière de bio-impression d’organes ou de circuits électroniques flexibles.
L’imprimante 3D alimente ainsi le rêve d’une production personnalisée, qui, au même prix, remplacerait la production de masse inaugurée par la deuxième révolution industrielle.

À quand l’impression maison ?
D’usines géantes situées dans les pays à bas coûts salariaux, on passerait à des mini-usines automatisées, relocalisées au plus près des consommateurs afin de répondre quasiment en direct à leur besoin de customisation.
D’autres scénarios sont possibles comme la fabrication dans des boutiques spécialisées, implantées à proximité. Certains envisagent même une production à domicile, via des imprimantes 3D personnelles, pour les objets du quotidien. Ce scénario a fait beaucoup de buzz, il y a quelques années, mais il ne devrait pas se concrétiser pleinement avant 2030.
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imprimantes 3D personnelles vendues en 2017 contre 278 000 en 2015
Un boom à relativiser
On n’achèterait plus des produits, mais des idées de produits, sous forme de fichiers. Il est d’ailleurs déjà possible de télécharger de tels fichiers sur des sites spécialisés. La géographie de l’industrie mondiale pourrait en être bouleversée, supprimant au passage des flux entiers de transports de marchandises et de matières premières. De quoi contribuer grandement à l’objectif d’une croissance durable. On n’en est toutefois qu’au début du processus…Malgré le boom réel des ventes d’imprimantes 3D, la fabrication additive ne représente en effet qu’une goutte d’eau dans l’ensemble de la production manufacturière mondiale : moins de 1 % des pièces fabriquées ! Cela n’empêche pas le cabinet A.T. Kearney, dans une étude réalisée pour le fabricant d’imprimantes HP, de prédire que la technologie « pourrait affecter, dans les 10 ans à venir, jusqu’à 42 % de la production dans l’équipement industriel, l’automobile, les produits de consommation, la santé et le médical et l’aéronautique ».
La fabrication additive ne va toutefois pas remplacer la fabrication traditionnelle. Malgré des progrès continus, les imprimantes 3D sont encore trop lentes pour sortir en très grande série des voitures ou des smartphones. De plus, les pièces qu’elles produisent nécessitent un travail de finition. Nul doute, en revanche, qu’elles se trouveront en bonne place, parmi d’autres machines robotisées, dans l’usine du futur, située à proximité des clients.
Ce mouvement de relocalisation semble faire consensus parmi les experts. A.T. Kearney a pour sa part identifié les gagnants et les perdants potentiels de cette révolution. D’après le cabinet, les pays dont la consommation par habitant est élevée et disposant d’une main-d’œuvre qualifiée, comme la France, devraient bénéficier de ces nouveaux emplois industriels. Les États-Unis se projettent même sur trois à cinq millions de postes dans les 10 ans (soit 20 % des effectifs du secteur manufacturier américain !).
À l’inverse, des pays comme la Chine risqueraient de perdre des emplois… s’ils n’agissent pas. Une mise en garde superflue : la première puissance industrielle mondiale a déjà lancé un plan massif pour rattraper les pays leaders dans l’impression 3D
Fabrication additive : les risques juridiques
L’arrivée des imprimantes 3D chez les particuliers fait faire des cauchemars aux juristes. Le partage illégal de modèles 3D, voire la simple copie privée autorisée dans le cadre familial, risquent en effet de nuire à leurs concepteurs, comme les industries du film et du disque ont pu s’en apercevoir lors de leur propre passage au numérique…
Les pièces imprimées par les particuliers – pour une voiture, par exemple – posent par ailleurs un problème de sécurité. Elles sont fabriquées en dehors de tout circuit de contrôle. « Qui serait responsable en cas d’accident dû à une pièce défaillante : le fabricant de l’imprimante, celui du matériau, le concepteur du modèle 3D ou la personne qui a imprimé l’objet ? », s’interroge la députée LREM Huguette Tiegna, auteure d’un rapport sur l’impression 3D.