L’être humain vit en société depuis toujours1. En effet, notre espèce a hérité ce mode de vie de ses ancêtres évolutifs, à savoir les espèces de primates pré-humains dont elle descend. Si la vie en groupe a été choisie au cours de notre histoire évolutive, c’est qu’elle procure des avantages certains.
Entourés de leurs semblables, nos ancêtres pouvaient par exemple compter sur eux pour les alerter de la proximité d’un prédateur ou pour associer leurs forces afin d’attraper un gibier trop dangereux pour un individu isolé.
La vie en société n’a cependant pas que des avantages. Les individus qui vivent au contact de leurs congénères sont aussi bien souvent en concurrence avec eux, notamment pour accéder à leur nourriture. Tous les membres d’une même espèce se nourrissent du même type d’aliments – principalement des fruits, pour les primates.
Or, dans la nature, les fruits comestibles ne se trouvent pas en quantités illimitées. Il faut parfois parcourir de grandes distances avant d’en découvrir.
L’être humain vit en société depuis toujours1. En effet, notre espèce a hérité ce mode de vie de ses ancêtres évolutifs, à savoir les espèces de primates pré-humains dont elle descend. Si la vie en groupe a été choisie au cours de notre histoire évolutive, c’est qu’elle procure des avantages certains.
Entourés de leurs semblables, nos ancêtres pouvaient par exemple compter sur eux pour les alerter de la proximité d’un prédateur ou pour associer leurs forces afin d’attraper un gibier trop dangereux pour un individu isolé.
La vie en société n’a cependant pas que des avantages. Les individus qui vivent au contact de leurs congénères sont aussi bien souvent en concurrence avec eux, notamment pour accéder à leur nourriture. Tous les membres d’une même espèce se nourrissent du même type d’aliments – principalement des fruits, pour les primates.
Or, dans la nature, les fruits comestibles ne se trouvent pas en quantités illimitées. Il faut parfois parcourir de grandes distances avant d’en découvrir.
Lorsque cela se produit, chaque membre du groupe va chercher à s’en approprier une quantité suffisante pour satisfaire son appétit. Mais il n’y en a pas toujours assez pour tout le monde. Certains individus, victimes de la concurrence de leurs congénères, ne parviendront donc pas à s’alimenter.
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Anticiper les actions des autres
La vie en société est ainsi à la fois coopérative et compétitive : dans certains cas, les membres du groupe s’entraident pour, par exemple, chasser un gibier. Dans d’autres cas, ils sont en concurrence pour obtenir leur nourriture ou toute autre ressource convoitée. C’est dans ce contexte social que le cerveau de nos ancêtres a progressivement évolué.
Les individus qui parvenaient à tirer profit de la vie en groupe sans trop souffrir de la concurrence imposée par la présence de leurs semblables vivaient plus longtemps et se reproduisaient davantage que les autres. C’est donc d’eux dont nous descendons et dont nous avons hérité notre cerveau actuel.
Ces individus se distinguaient de leurs congénères par de meilleures compétences de cognition sociale. La cognition sociale désigne l’ensemble des processus mentaux qui permettent à un individu d’interagir avec ses semblables. Une fonction centrale de la cognition sociale est de parvenir à anticiper les actions des autres membres du groupe selon la situation dans laquelle ils se trouvent.
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Cette capacité d’anticipation est extrêmement utile tant pour coopérer avec les autres que pour l’emporter sur eux dans les situations de concurrence.
Par exemple, lorsque les membres d’un groupe chassent ensemble, il est nécessaire qu’ils puissent anticiper les actions des autres pour se coordonner efficacement. De même, chercher à tromper ses congénères afin de se saisir d’un fruit à leurs dépens demande de pouvoir comprendre la manière dont ils s’apprêtent à agir.
Dès cinq ans, la « théorie de l’esprit »
Notre capacité à adopter le point de vue des autres pour anticiper leurs comportements est appelée « théorie de l’esprit ». Si tous les adultes sains disposent de cette capacité, les nouveau-nés n’en sont pas encore dotés. Ce n’est que vers l’âge de 4 ou 5 ans que les enfants deviennent pleinement compétents en la matière. Ce développement semble se produire autour du même âge, quelle que soit la culture dans laquelle grandissent les enfants2.
Sous la pression sélective, nos ancêtres évolutifs ont donc développé, au fil des générations, des mécanismes cognitifs de plus en plus adaptés à l’anticipation des actions de leurs semblables. C’est ainsi qu’est progressivement apparue une compétence de cognition sociale remarquable, dont nous sommes aujourd’hui équipés.
Cette compétence, que les chercheurs nomment « théorie de l’esprit », nous permet de prendre en compte le point de vue des autres, d’imaginer ce qu’ils désirent, ce qu’ils savent ou ne savent pas dans une situation donnée, et d’en déduire les comportements qu’ils s’apprêtent alors à adopter.
Naturel ne veut pas dire bon
On le voit, notre cerveau a été façonné au cours de l’évolution par et pour la vie en société. Ces adaptations issues de la sélection naturelle nous sont évidemment toujours fort utiles. Mais il en est aussi qui se trouvent à l’origine de phénomènes sociaux que l’on peut juger indésirables.
C’est le cas, par exemple, de notre tendance héritée de l’évolution à faire preuve de moins d’empathie pour des individus qui nous sont socialement éloignés que pour ceux dont nous sommes proches. Il nous est dès lors plus facile de nous montrer généreux à l’égard de concitoyens dans la détresse qu’à l’égard de personnes ayant besoin d’aide à l’autre bout du monde.
Si l’on peut comprendre les raisons évolutives de cette tendance, ses conséquences n’en sont pas moins moralement discutables. La nature nous a faits, ce n’est pas pour autant qu’elle est toujours bonne conseillère !
Notes
1. La Nature du social. L’apport ignoré des sciences cognitives, de Laurent Cordonier, Presses Universitaires de France, 2018.
2. « Synchrony in the onset of mental-state reasoning », Callaghan et al., Psychological Science, 16 (5), 2005.