Une personne célèbre est une personne qui est connue par plus d’individus qu’elle n’en connaît elle-même. Par exemple, un très grand nombre de Français savent qui est le footballeur Kylian Mbappé, mais lui-même ne connaît probablement pas beaucoup plus de personnes que n’importe quel lecteur de Pour l’Éco.
Ainsi, le niveau de notoriété d’un individu peut être mesuré en calculant la différence entre le nombre de personnes qui la connaissent et le nombre de personnes qu’elle connaît de son côté. Plus cette différence est élevée, plus sa notoriété est grande.
À lire > Le prize money, reflet de la valorisation économique à instant T d’un sport
Une image qui a un prix
Être célèbre a évidemment d’importantes conséquences sociales. Pour le sociologue Pierre Bourdieu, la notoriété d’un individu fait d’ailleurs partie de son capital social1. Comme tout capital individuel, le « capital de notoriété » peut être converti en capital économique, c’est-à-dire en argent. C’est ce que l’on observe facilement chez les stars du sport.
En effet, une bonne part de leurs revenus provient de la publicité : les sommes que les sponsors sont disposés à dépenser pour associer leur image à celle d’un sportif sont fonction de l’attention publique captée par ce dernier.
Il en va de même pour les célébrités du show-business qui, en plus des recettes issues de leur activité artistique, capitalisent sur leur image via divers supports publicitaires.
À lire > Nabilla, l’influence et la pratique commerciale trompeuse en quatre questions
Le marché de la conférence
À côté de ces authentiques célébrités, il est d’autres personnes qui parviennent à convertir économiquement leur notoriété de façon plus surprenante.
C’est le cas, par exemple, de journalistes, d’entrepreneurs, de scientifiques, d’universitaires et d’« experts » en tout genre qui sont amenés à donner des conférences rémunérées en entreprise – une activité professionnelle annexe.
Ces conférences sont commandées par de grandes entreprises à destination de leurs employés, dans le but de favoriser l’éclosion d’idées nouvelles ou de renforcer l’esprit d’équipe. L’an dernier, plus de 12 000 conférences de ce type auraient été organisées en France2.
La rémunération des conférenciers varie du simple au centuple, l’un des critères étant leur notoriété pour un tiers de la variation du prix des conférences3. C’est assez surprenant, car ces intervenants ne sont pas des « célébrités » à proprement parler.
Pourtant, même une faible notoriété, due par exemple à quelques passages à la télévision ou à la radio, peut être convertie en capital économique sur le marché de la conférence rémunérée.
Les nouvelles notoriétés digitales
Internet a favorisé l’apparition de nouvelles formes de célébrité. N’importe qui peut utiliser le Web pour rendre accessibles au monde entier les contenus qu’il produit. La terrible concurrence qui y règne aboutit bien entendu à ce que la majorité des contenus diffusés par les internautes lambda ne sera vue par personne ou presque.
À lire : Combien ça coûte, de scroller sur Instagram ?
À l’opposé, une faible proportion des productions mises en ligne monopolise la quasi-totalité de l’attention. Par exemple, les vidéos de certaines YouTubeuses spécialisées dans les « conseils beauté » totalisent des centaines de milliers de vues chacune.
Ces YouTubeuses sont donc célèbres auprès d’une plus ou moins grande communauté de jeunes gens. Bien que leur notoriété ne s’étende guère au-delà de ce cercle, elles parviennent à la convertir économiquement : YouTube les rémunère en fonction du nombre de vues obtenues par leurs vidéos et des marques de cosmétiques les payent pour qu’elles en fassent la promotion.
À lire : YouTube paie sa course à la méga-audience
Le fait de pouvoir convertir sa notoriété en capital économique n’est en rien une nouveauté. Ce qui l’est peut-être, c’est qu’il semble désormais possible de développer une notoriété qui ne repose sur aucune compétence spécifique – artistique, sportive, intellectuelle, ou autre.
Ainsi, les participants à certaines émissions de téléréalité peuvent accéder à une célébrité lucrative sans qu’il leur soit demandé autre chose que d’échanger des ragots au bord d’une piscine.
Mais tout bien considéré, n’est-ce pas également une forme de compétence particulière que de parvenir à capter l’attention du public en exploitant son goût quelque peu voyeuriste pour les aléas de la vie sociale des autres ?