En matière de culture, les politiques français sont attachés à une expression forte : « l’exception culturelle ». Même si les avis divergent quant à la façon de la promouvoir et de l’utiliser, elle est régulièrement brandie pour défendre ce secteur, pour le mettre à l’abri de la concurrence normale, dans une bulle protectrice, où la création doit pouvoir s’exprimer plus librement.
Année après année, les gouvernements successifs ont eu tendance à l’entretenir, voire à la renforcer. À ce sujet, 2005 pourrait faire office de point de départ d’un nouveau paradigme.
Cette année-là, l’Unesco a légalisé le protectionnisme culturel en stipulant dans son article 35 que les « activités, biens et services culturels ne doivent pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale ».
L’organisme international précise même un peu plus loin que les pays sont autorisés à prendre les mesures de protection qu’ils jugent nécessaires, donc à subventionner la culture, au mépris des règles habituelles de concurrence.
En matière de culture, les politiques français sont attachés à une expression forte : « l’exception culturelle ». Même si les avis divergent quant à la façon de la promouvoir et de l’utiliser, elle est régulièrement brandie pour défendre ce secteur, pour le mettre à l’abri de la concurrence normale, dans une bulle protectrice, où la création doit pouvoir s’exprimer plus librement.
Année après année, les gouvernements successifs ont eu tendance à l’entretenir, voire à la renforcer. À ce sujet, 2005 pourrait faire office de point de départ d’un nouveau paradigme.
Cette année-là, l’Unesco a légalisé le protectionnisme culturel en stipulant dans son article 35 que les « activités, biens et services culturels ne doivent pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale ».
L’organisme international précise même un peu plus loin que les pays sont autorisés à prendre les mesures de protection qu’ils jugent nécessaires, donc à subventionner la culture, au mépris des règles habituelles de concurrence.
Soufflée et soutenue par le président de l’époque, Jacques Chirac, cette petite révolution régit aujourd’hui encore le secteur. Même si certains politiques ou économistes critiquent régulièrement ce protectionnisme, considérant qu’un tel soutien fragilise à terme les acteurs concernés, le concept perdure.
La culture exclue des accords de libre-échange
Plus récemment, au cours de son mandat François Hollande a choisi d’écarter l’audiovisuel des négociations de l’accord de libre-échange entre l’UE et les États-Unis, toujours en s’appuyant sur le principe d’exception culturelle.
Résultat, les subventions sont légales et nombreuses en France pour soutenir le cinéma, le théâtre, le livre, les arts du cirque ou les réseaux de distribution qui leur donnent de la voix (salles de cinéma d’art et essai, festivals, etc.).
Pour le cinéma, le Centre national du cinéma (CNC) a ainsi distribué quelque 679 millions d'euros de subventions en 2016, dont presque la moitié au cinéma, devant l’audiovisuel et le multimédia.
À lire : Combien ça coûte, une place de cinéma ?
Le ticket de cinéma qui finance le prochain film
Le concept :
Créé en 1946 et rattaché au ministère de la Culture treize ans plus tard, le Centre national du cinéma (CNC) est un établissement public qui a vocation à promouvoir et soutenir la création française par des aides ciblées. Son objectif : le CNC agit comme régulateur du secteur et participe au financement du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia.
L’idée initiale étant de répartir les ressources, l’essentiel du budget du CNC provient de taxes sur les acteurs les plus solides du secteur que sont les exploitants de salles de cinéma ou les chaînes de télévision.
Concrètement : il existe trois taxes principales. La taxe spéciale additionnelle (TSA), prélevée sur la billetterie des salles de cinéma, représente un peu plus de 10 % du prix du billet.
La taxe sur les services de télévision (TST), financée notamment par les chaînes. Et la taxe sur la location, qui oblige les loueurs à verser près de 2 % des recettes.
Même si l’impact sur le billet de cinéma est le plus visible pour le consommateur, la TSA ne rapporte que 21 % de son budget au CNC, quand la TST sur la télévision lui assure 76 % de son financement. En 2015, le CNC a distribué 332 M€ au cinéma.
Mais cette protection de principe n’empêche pas les géants – américains ou non – d’attaquer régulièrement le système et de tenter de contourner ces mécanismes de protection, pour faire entrer davantage de concurrence dans la culture. Et pour y prendre des parts de marché plus importantes !
De fait, Amazon ou Netflix, avec des modèles nouveaux et des sièges sociaux installés à l’étranger, ne sont pas soumis aux mêmes obligations que les distributeurs de contenus français.
Régulièrement, les élus tentent de créer une taxe Youtube, Netflix ou Amazon, mais sans vraiment y parvenir.
Ainsi, en décembre 2007, en jouant sur le nom de l’ancien ministre de la Culture à l’origine de la loi de 1981 sur le prix du livre, l’essayiste Mathieu Laine signait une chronique titrée « La France tire la Lang à Amazon » , dénonçant « l’archaïsme corporatiste français ».
La France était alors le seul pays au monde où le libraire en ligne ne pouvait pas offrir la livraison gratuite des livres… que le tribunal de grande instance de Versailles venait de déclarer illégale.
Quelques jours plus tard, Amazon passait ses frais de livraison sur le livre à 0,01 €, encourageant la plupart de ses concurrents à s’aligner…
À lire : Combien ça coûte, un livre ?
Le prix du livre qui n’est pas libre
Ce que dit la loi : concrètement, la loi du 10 août 1981, dite loi Lang, du nom de Jack Lang, alors ministre de la Culture, a instauré le concept de prix unique du livre en France.
Celui-ci doit être imprimé sur la couverture par l’éditeur et la remise maximum autorisée par le distributeur est de 5 %. Si d’autres subventions publiques (exonération de taxes locales pour les librairies indépendantes, soutien à la création…) existent, cette loi est le pivot principal du régime dérogatoire dont bénéficie le livre.
Son objectif : le législateur a voulu apporter son soutien au pluralisme de la création, promouvoir l’égalité des citoyens devant l’accès au livre, et favoriser le maintien d’un réseau de proximité : les librairies.
Concrètement : si cette loi semble relativement consensuelle, même auprès des associations de consommateurs, elle reste fréquemment attaquée par des acteurs comme Leclerc ou Amazon qui estiment que cette absence de concurrence nuit au consommateur.
La livraison gratuite de livre par Amazon ayant été considérée par la justice comme illégale, le géant américain la facture désormais 0,01 €