Sociologie
L’effet de Asch, quand le conformisme pousse à l’erreur
Influencés par l’avis d’un groupe majoritaire, les individus sont poussés à l’erreur par crainte de la désapprobation sociale et le désir de ne pas être exclu du groupe.
Martine Peyrard-Moulard
© Midjourney
Solomon Asch (1907-1996), professeur américain d’origine polonaise, est considéré comme le pionnier de la psychologie sociale. En 1951, pour étudier le phénomène de l’influence sociale et du consentement, il réalise une expérience et démontre que le besoin de se conformer à un groupe conduit à des choix « délibérément » erronés. « Un individu est susceptible de faire sien un jugement qu’il sait contraire au bon sens et à la réalité et cela sans que quiconque ne lui délivre la moindre récompense ou punition », explique Asch.
Dans l’expérience de Asch, plusieurs participants doivent observer trois lignes tracées sur une feuille et indiquer laquelle correspond à la ligne modèle. Interrogés à tour de rôle, ils donnent la bonne réponse, puis l’expérience est reconduite plusieurs fois, mais avec des sujets complices de l’expérience, sauf un seul. Les complices vont tous donner la même mauvaise réponse et le candide va se conformer à l’avis du groupe dans 37 % des cas, même si la réponse est d’évidence incorrecte. Sur l’ensemble des expériences, 75 % des sujets reprennent la mauvaise réponse de la majorité, au moins une fois, alors que, dans le groupe-contrôle sans complices, le taux d’erreur n’est que de 0,0045 %.
Poussé au conformisme
Pourquoi abandonner son propre jugement ? La crainte de la désapprobation sociale, la faible estime de soi et le désir de ne pas être exclu poussent au conformisme : c’est « l’influence normative » exercée par le groupe. De plus, en cas de doute ou de manque de confiance en soi, cet avis réconforte : c’est « l’influence informationnelle », la majorité devant sûrement avoir raison. Il s’agit là de distorsions de jugement et de perception liées à l’unanimité des avis du groupe.
Ces réactions montrent que les façons de penser, de percevoir la réalité et donc les comportements et décisions des individus peuvent être manipulées par mimétisme, notamment dans le monde du travail et sur les réseaux sociaux, même si cela va à l’encontre de leurs principes et valeurs, et conduire à un véritable mal-être social et professionnel.
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