En novembre dernier, les laboratoires Pfizer et Moderna annoncent tous deux avoir développé un vaccin très efficace contre le Covid-19. Dans le monde entier, c’est le soulagement. Mais en France, l’espoir s’accompagne immédiatement d’une crainte.
La population acceptera-t-elle de se faire vacciner dans une proportion suffisante pour enrayer l’épidémie ? L’Organisation mondiale de la santé considère que la défiance à l’égard de la vaccination représente un risque global pour la santé publique. La France semble toutefois être particulièrement touchée par le phénomène.
Pasteur, où es-tu ?
Selon une étude de 2018, l’Hexagone serait le pays où la méfiance envers les vaccins est la plus élevée au monde, 33 % de nos concitoyens estimant que ces derniers ne sont pas sûrs. Pour comparaison, cette proportion est de 13 % en Allemagne et de 9 % au Royaume-Uni1.

Cette situation peut surprendre, quand on sait que la France de Louis Pasteur (1822-1895) fut l’un des pays pionniers dans le développement des vaccins, dont les immenses bénéfices pour la santé ne sont plus à démontrer2.
En novembre dernier, les laboratoires Pfizer et Moderna annoncent tous deux avoir développé un vaccin très efficace contre le Covid-19. Dans le monde entier, c’est le soulagement. Mais en France, l’espoir s’accompagne immédiatement d’une crainte.
La population acceptera-t-elle de se faire vacciner dans une proportion suffisante pour enrayer l’épidémie ? L’Organisation mondiale de la santé considère que la défiance à l’égard de la vaccination représente un risque global pour la santé publique. La France semble toutefois être particulièrement touchée par le phénomène.
Pasteur, où es-tu ?
Selon une étude de 2018, l’Hexagone serait le pays où la méfiance envers les vaccins est la plus élevée au monde, 33 % de nos concitoyens estimant que ces derniers ne sont pas sûrs. Pour comparaison, cette proportion est de 13 % en Allemagne et de 9 % au Royaume-Uni1.

Cette situation peut surprendre, quand on sait que la France de Louis Pasteur (1822-1895) fut l’un des pays pionniers dans le développement des vaccins, dont les immenses bénéfices pour la santé ne sont plus à démontrer2.
Les Français n’ont pas toujours été méfiants à l’égard des vaccins. Ce n’est qu’à partir de la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1), en 2009, que cette méfiance s’est installée.
En effet, les controverses autour de la sécurité des vaccins se sont alors multipliées, certains d’entre eux étant vus par une partie croissante de la population comme inutiles, voire dangereux.
Si entre 2000 et 2005, moins de 10 % des Français se disaient « plutôt pas » ou « pas du tout » favorables aux vaccins en général, cette proportion est passée à 38 % en 2010 et demeurait de 23 % en 20163.
En Chiffres
Jusqu'à 50 %
Pourcentage de Français hésitants à la vaccination
« Anti-vax » : 2 % seulement
Selon les spécialistes, ces chiffres masquent l’existence de deux types bien distincts de défiance à l’égard des vaccins.
Le premier concerne les personnes opposées à tous les vaccins – les « anti-vaccins » ou « anti-vax ». Le second type de défiance renvoie à une attitude moins tranchée, celle des personnes réticentes à l’égard d’un ou de quelques vaccins en particulier, qu’elles jugent inutile(s) ou dangereux. Cette attitude peut être qualifiée « d’hésitation vaccinale ». En France, on estime qu’il y aurait environ 2 % d’anti-vax, tandis que les hésitants vaccinaux seraient bien plus nombreux (jusqu’à 50 % de la population)4.
Opérer cette distinction permet de mettre au jour le fait que le profil des personnes concernées n’est pas le même. Les anti-vax sont plus souvent des hommes, âgés, isolés, avec de faibles niveaux d’éducation et de revenus. Les hésitants vaccinaux sont plutôt des femmes d’âge intermédiaire, avec des niveaux d’éducation et de revenus plus élevés que la moyenne5.
Les facteurs de l'opposition
Une telle différence de profils laisse penser que les facteurs qui conduisent ces personnes à s’opposer à la vaccination ne sont pas les mêmes.
Les anti-vax le font probablement en raison de la défiance qu’ils entretiennent à l’égard des autorités sanitaires et, plus globalement, envers les institutions et le gouvernement, par lesquels ils se sentent abandonnés.
Les théories du complot qui mettent en scène des ententes malveillantes entre autorités sanitaires et laboratoires pharmaceutiques jouent certainement un rôle dans le développement de leur attitude négative envers la vaccination.
Le profil des hésitants vaccinaux correspond davantage à celui des personnes qui s’investissent particulièrement dans les décisions de santé les concernant6. Cela peut les inciter à rechercher des informations médicales sur internet et dans des groupes de discussion dédiés sur les réseaux sociaux.
Or, les informations qui y circulent sont loin d’être toujours fiables et peuvent les conduire à développer des craintes infondées à l’égard de certains vaccins.
La réticence face à la vaccination, quelle que soit son origine, rappelle que la santé publique n’est pas uniquement une notion médicale, mais également une question sociologique.
Un vaccin, aussi bon soit-il, ne sera efficace que si les gens acceptent de le recevoir !
1. “How Does the World Feel about Science and Health ?” Wellcome Trust, Gallup, 2019, Wellcome Global Monitor 2019, https://wellcome.org/reports/wellcome-global-monitor/2018
2. www.unicef.org/french/pon96/hevaccin.htm
3. 4. 5. et 6. "Comprendre la méfiance vis-à-vis des vaccins : des biais de perception aux controverses", Ward et Peretti-Watel, Revue française de sociologie n°61, 2020
Et pourtant… les vaccins sauvent deux à trois millions de vies par an
En 2019, l’OMS1 faisait de l’hésitation vaccinale un enjeu de santé publique majeur : « La méfiance à l’égard des vaccins – c’est-à-dire la réticence à se faire vacciner ou le refus de vaccination alors que les vaccins sont disponibles – risque de remettre en cause certains des progrès obtenus dans la lutte contre des maladies à prévention vaccinale. La vaccination offre un des moyens de prévention les plus rentables et permet d’éviter deux à trois millions de décès annuels ; en améliorant encore la couverture vaccinale, on pourrait sauver 1,5 million de vies de plus chaque année. »
(1) « Dix ennemis que l’OMS devra affronter cette année », OMS, 2019