Sociologie

Managers, méfions-nous de la première impression !

Nous souffrons tous de biais qui altèrent notre objectivité. Les vrais leaders savent mettre en œuvre les moyens de les contourner.

Isabelle Barth, professeure des universités en management
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Illustration de l'article Managers, <span class="highlighted">méfions</span>-nous de la <span class="highlighted">première impression</span> !

© Getty Images/iStockphoto

« La première impression est toujours la bonne », « On n’a qu’une seule chance de faire une bonne première impression »… On a tant entendu ces phrases qu’elles s’imposent presque comme des évidences. Car oui, on peut être séduit de prime abord par un candidat qui a fière allure en costume-cravate, se méfier d’une personne avec des piercings, forcément marginale …

La première impression, cela consiste à « juger avant », en bien ou en mal. On a beau s’en défendre, les préjugés nous habitent, d’autant plus prégnants qu’ils sont invisibles, impensés et donc difficiles à combattre.

Préjugés préjudiciables 

La première impression n’a été mise en évidence scientifiquement qu’en 1973 par Margaret M. Clifford et Elaine Walster, deux psychologues américaines spécialistes de l’éducation. Elles ont démontré que les maîtres d’école attendent davantage des enfants qu’ils jugent plus beaux que les autres.

Disons-le tout net, se fier à sa première impression conduit à passer à côté de mille opportunités, de choix beaucoup plus intéressants. Cela peut conduire à la catastrophe ou faire souffrir des personnes sans raison. Dans la vie professionnelle, obéir à la première impression, c’est souvent se tromper dans un recrutement, passer à côté d’un partenariat intéressant, se priver d’une expertise, d’un talent… Et bien sûr, on peut se faire avoir par un escroc qui « présente bien » !

Mythe 1 et mythe 2

Penser en leader, c’est justement savoir résister à cette fameuse première impression et s’octroyer la possibilité d’explorer d’autres options comme de découvrir des potentiels ignorés. La première impression relève en effet de deux mythes. Le premier consiste à penser que nous aurions des intuitions géniales.

En quelques secondes, nous pourrions évaluer à la perfection une personne ou une situation… Sauf danger imminent, ce qui est tout de même assez rare, nul besoin de surréagir quand il faut prendre une décision qui engage à moyen ou long terme.

Dans notre imaginaire, la marque d’un grand leader, c’est de décider vite. Vite, peut-être, mais pas dans la précipitation ! Le second mythe est que notre première impression reflète un jugement objectif. Erreur … Nos premières impressions ne sont pas si « premières » que ça.

Loin de l’objectivité, elles proviennent de sensations préalables, de croyances partagées, de convictions intimes, d’informations non vérifiées : les gens à lunettes sont intelligents, les personnes en surpoids manquent de maîtrise, les blondes sont futiles, les seniors nuls en informatique…

Les professionnels du recrutement sont conscients de ces biais et développent des techniques pour dépasser la première impression, par exemple en consacrant suffisamment de temps aux candidats en écoute active, à l’aide d’un questionnement élaboré. 

De même, les commerciaux aguerris savent qu’une allure négligée peut cacher un client à fort potentiel. Méfions-nous donc de notre première impression, car elle est souvent mauvaise conseillère. Le vrai leader voit au-delà des apparences !

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