Portraits d'Économistes
Daniel Cohen, l’économiste, le pédagogue et le formateur
Économiste et essayiste français, proche de la gauche sociale-démocrate, distingué pour ses ouvrages vulgarisant les enjeux économiques majeurs. Il a aussi marqué l’enseignement de sa discipline en formant et guidant la carrière de nombreux économistes reconnus.

© Bruno LEVY/CHALLENGES-REA
Qui suis-je ?
Né à Tunis en 1953 et décédé à Paris en août 2023, Daniel Cohen est un économiste et essayiste français. Il est notamment connu pour ses nombreux ouvrages grand public et son approche accessible des grands enjeux économiques, couvrant les thèmes de la mondialisation, la dette, l’éducation, la croissance ou l’économie numérique. Il a reçu à deux reprises le prix du livre d’économie (en 2000 pour "Nos temps modernes" puis en 2012 pour "Homo Economicus, prophète (égaré) des temps nouveaux".
Avec un pied dans le monde académique et un autre dans le conseil public, Daniel Cohen a toujours oscillé entre recherche, enseignement et implication dans les politiques publiques. Professeur à l’École normale supérieure et à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne, il est aussi membre fondateur de l’École d’économie de Paris (PSE). Il en a assuré la vice-présidence de 2007 à 2014, puis la présidence du conseil d’administration à partir de 2015.
Proche de la deuxième gauche, sociale-démocrate, signature du « Nouvel Observateur » ou du Monde, Daniel Cohen a égalément participé à l’animation de la vie des idées publique en devenant président du conseil scientifique de la Fondation Jean Jaurès.
Mes travaux
Ses travaux se distinguent par une volonté de rendre l'économie accessible au grand public, en utilisant un langage clair, des exemples concrets et des références culturelles. Parmi ses principaux ouvrages, on peut citer :
- Richesse du monde, pauvretés des nations (1997), où il analyse les causes et les conséquences de la divergence entre les pays riches et les pays pauvres. Il montre que la mondialisation n’a pas permis de réduire les inégalités entre les nations, mais au contraire les a accentuées. Il explique que les pays pauvres sont confrontés à des obstacles structurels, comme le manque d’infrastructures, d’éducation, de santé ou de démocratie, qui les empêchent de profiter des opportunités offertes par le commerce international. Il propose des pistes pour favoriser le développement des pays du Sud, en renforçant leur intégration régionale, leur capacité d’innovation et leur gouvernance.
- La mondialisation et ses ennemis (2004), où il déconstruit l’idée que la mondialisation est le principal responsable des inégalités croissantes et de la désindustrialisation des économies occidentales. Il soutient que si la mondialisation pose des défis, elle offre également des opportunités sans précédent pour la croissance et le développement. Il incite à une compréhension nuancée, défendant l’idée que c’est la réponse politique à la mondialisation, et non la mondialisation elle-même, qui détermine ses effets sur les sociétés.
- Nos temps modernes (2008), où il retrace l’histoire du capitalisme depuis la révolution industrielle jusqu’à nos jours. Il décrit les grandes transformations économiques et sociales qui ont marqué les deux derniers siècles, comme l’essor de la production de masse, la diffusion du salariat, l’apparition du fordisme, le choc pétrolier, la crise financière ou la révolution numérique. Il analyse les effets de ces mutations sur la croissance, l’emploi, les inégalités, le bien-être ou l’environnement. Il s’interroge sur les perspectives d’avenir du capitalisme, face aux défis du vieillissement démographique, de la dette publique ou du changement climatique.
- Homo economicus, prophète (égaré) des temps nouveaux (2012), où il explore les contradictions entre l’Homo economicus et l’Homo ethicus ; le mode compétitif et le mode coopératif. Il dépeint une société où les individus sont de plus en plus individualistes, rationnels et calculateurs, mais où paradoxalement, le bonheur semble insaisissable et plaide pour une approche pluridisciplinaire et anthropologique de l’économie, qui prenne en compte les motivations complexes et variées des individus.
- Homo numericus, la civilisation qui vient (2022), où il étudie les transformations économiques et sociales induites par le développement des technologies de l’information et de la communication. Il met en lumière les opportunités offertes par le numérique pour créer de nouveaux biens et services, favoriser l’apprentissage et l’innovation, renforcer les liens sociaux et participer à la transition écologique. Il alerte aussi sur les menaces que le numérique fait peser sur la concurrence, la fiscalité, la sécurité, l’éthique et l’identité humaine.
Ce n’est pas la richesse qui est la finalité de notre société, c’est la croissance, c’est-à-dire l’augmentation perpétuelle de la richesse. La promesse des sociétés démocratiques est d’offrir à chacun le moyen de se hisser au-dessus de sa condition quelle qu’elle soit. La question n’est pas d’être riche ou pauvre mais de s’élever socialement. On retrouve ici les intuitions de l’économiste Richard Easterlin. Une hausse du PIB ne se traduit pas nécessairement par une hausse du niveau de bien-être ressenti par les individus. Ce qui compte est de faire mieux que prévu, mieux que les autres. C’est la croissance qui donne à chacun l’illusion qu’il y parvient.Daniel Cohen,
Interview au Nouvel Observateur, août 2015
Sa double casquette d’enseignant et de chercheur, associée à son engagement envers la démocratisation de l’économie, a aussi fait de lui une figure centrale dans la formation économique des nouvelles générations.
Il a été un mentor pour de nombreux chercheurs en économie par les plus reconnus de la planète comme Thomas Piketty, Esther Duflo, Gabriel Zucman, Antoine Bozio, Camille Landais, Augustin Landier ou Emmanuel Saez.
Mes dates clés
1953 : Naissance à Tunis.
1973-76 : Études à l’École normale supérieure et obtient son doctorat en économie.
1976 : Agrégation de mathématiques
1980-2000 : S’affirme comme une voix importante dans le milieu académique français, tout en contribuant régulièrement à des publications grand public.
2000 : Prix du livre d’économie pour Nos temps modernes
2006 : Membre fondateur de l’École d’économie de Paris (PSE)
2012 - Publication de "Homo Economicus", où Cohen explore les ressorts psychologiques et sociétaux de l’homme économique moderne. Prix du livre d’économie
2022 : Publication de Homo numericus, la civilisation qui vient
2023 - Mort à Paris
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