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David Ricardo et l'avantage comparatif
Portraits d'Économistes
David Ricardo et l'avantage comparatif
Célèbre pour sa théorie des avantages comparatifs. Son influence était très large, des économistes classiques à Karl Marx. Ses analyses portent sur le circuit de production, les relations entre les profits et les salaire, la rente et la monnaie.

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Qui suis-je ?
David Ricardo a exercé comme agent de change et agriculteur. Ricardo est surtout connu comme un des plus grands économistes de l’histoire, célèbre pour sa théorie des avantages comparatifs mais aussi un des pères, avec Smith et Malthus, de la science économique moderne. Son influence était très large, elle allait des économistes classiques jusqu’à Karl Marx. Ses analyses portent sur le circuit de production, les relations entre les profits et les salaire, la rente et la monnaie.
Ricardo distingue trois classes : les propriétaires terriens qui perçoivent des rentes, les capitalistes qui perçoivent des profits et les travailleurs qui perçoivent des salaires. Il est l’auteur notamment de Essai sur le haut prix des lingots (1811), Essai sur l’influence des bas prix du blé sur les profits du capital (1815) et Des principes de l’économie politique et de l’impôt (1817).
Supposons deux ouvriers sachant l’un et l’autre faire des souliers et des chapeaux : l’un d’eux peut exceller dans les deux métiers ; soit en faisant des chapeaux, il ne l’emporte sur son rival que d’un cinquième ou de 20%, tandis qu’en travaillant à des souliers, il a sur lui un avantage d’un tiers, ou de 33%. Ne serait-il pas de l’intérêt de tous les deux que l’ouvrier le plus habille se livrât exclusivement à l’état de cordonnier, et le moins adroit à celui de chapelier ?David Ricardo
Ma théorie phare : Les avantages comparatifs
Tous les pays peuvent être gagnants dans un système de libre-échange s’ils se spécialisent, peu importe qu’ils aient des avantages absolus de coûts de production ou pas. Leur spécialisation doit porter sur la production des biens pour lesquels leur avantage comparatif est le plus élevé, ou leur désavantage le moins élevé en termes de coûts « relatifs ». Ils peuvent échanger les biens qu’ils ne produisent pas, les échanges s’expliquent alors par des écarts de productivité du travail.
Pour illustrer sa théorie, il a donné l'exemple du vin portugais et des draps britanniques. De manière très schématique, il est beaucoup plus simple de faire du bon vin grâce au soleil au Portugal qu'en Angleterre. Il vaut donc mieux que le pays se spécialise dans la production viticole puis de l'échanger contre les draps britanniques plutôt que d'essayer de produire les deux en même temps.
L’avantage « comparatif » est envisagé par rapport aux autres pays et surtout par rapport aux autres biens que le pays est susceptible de produire. Les nouvelles théories montrent que les avantages comparatifs se construisent. Ainsi, les dépenses en innovation, en recherche et développement, en formation, ou bien les législations peuvent permettre à un pays de se créer des avantages qui ne sont pas donnés une fois pour toutes.
Cette loi de Ricardo montre les gains à l’échange, les avantages de la DIT (Division internationale du travail) et de la spécialisation, assurant gains de productivité et compétitivité. La question reste de savoir si tous les avantages comparatifs se valent et si les gains sont également distribués entre tous les pays.
Une hausse de la dette publique est sans effet sur l’activité économique.David Ricardo
Mes dates clés
- Naissance : En 1772, dans une famille bourgeoise anglaise d’origine portugaise, à Londres, au Royaume-Uni
- Mort : En 1823, à l'âge de 51 ans au sud de l'Angleterre.
Neutre, la dette ? C’est Ricardo qui le dit
Le fameux « théorème d’équivalence ricardienne » (établi formellement par Barro en 1974) est une proposition paradoxale, presque choquante. Il affirme qu’en principe, une hausse de la dette publique est sans effet sur l’activité économique. Le raisonnement est simple : augmenter la dette publique de cent euros aujourd’hui, c’est s’engager à augmenter les impôts d’un montant équivalent à l’avenir. Anticipant ces hausses d’impôts nécessaires au remboursement de la dette, les citoyens vont épargner un montant équivalent. Leur comportement de consommation sera donc le même que si, plutôt qu’émettre de la dette, le gouvernement augmentait les impôts de cent euros dès aujourd’hui.
Le mode de financement des dépenses publiques (impôts versus dette publique) n’a donc pas d’effet sur l’épargne nationale ; à partir de là, il est facile de montrer que les autres grandeurs économiques (investissement, taux d’intérêt, PIB) sont également inchangées. Cette neutralité de la dette publique reflète le fait qu’à travers la dette publique, les citoyens empruntent en réalité à eux-mêmes. En empruntant, l’État émet des actifs détenus par les agents privés, mais son passif augmente du même montant. Si l’on consolide les comptes de l’État et du secteur privé, on en conclut que rien n’est changé au niveau de la nation. De même que me faire un chèque à moi-même ne me rend pas plus riche, puisque c’est mon compte qui sera débité pour créditer le dit chèque.
Ce résultat renvoie dos à dos les « progressistes », qui prônent la relance par les déficits, et les « conservateurs » pour lesquels l’accumulation de dette publique compromet l’avenir de la nation en réduisant les fonds disponibles pour l’investissement et donc le stock de capital productif dans le futur.
Il importe de bien comprendre la portée du débat : on s’intéresse ici au mode de financement d’un niveau donné des dépenses publiques. Selon le théorème d’équivalence ricardienne, que ces dépenses soient financées par la dette ou par l’impôt est indifférent. En revanche, si l’augmentation de la dette est due à une hausse des dépenses publiques, cette hausse produira en elle-même un effet sur l’activité (relance en situation de sous-emploi, réduction des investissements en situation de plein emploi), mais cet effet serait le même si c’était par l’impôt que nous financions les dépenses publiques supplémentaires.
Il est amusant de noter que bien que ce théorème ait été attribué à Ricardo, ce dernier rejetait sa validité. Dans le passage qui suit, il considère que les individus ne sont pas, dans la réalité, capables d’anticiper les hausses d’impôt futures induites par la dette. En conséquence, pour une hausse donnée des dépenses, ils consommeront plus si cette hausse est financée par la dette que si elle est financée par l’impôt :
« On aurait tort de conclure de tout ce que je viens de dire que je regarde le système des emprunts comme le meilleur moyen de fournir aux dépenses extraordinaires de l’État. C’est un système qui tend à nous rendre moins industrieux, à nous aveugler sur notre situation. Si les frais d’une guerre se montent à 40 millions de livres par an, et que la part d’un particulier, pour subvenir à cette dépense annuelle, soit de 100 livres, il tâchera, si l’on exige de lui le paiement total et immédiat de cette somme, d‘épargner promptement 100 livres sur son revenu. Par le système des emprunts, on n’exige de lui que l’intérêt de ces 100 livres, soit 5 livres par an. Il croit qu’il lui suffit d’épargner ces 5 livres sur sa dépense, et il se fait illusion, se croyant aussi riche en fonds que par le passé. La nation et son gouvernement, en raisonnant et en agissant de la sorte, n’épargnent que les intérêts de ces 40 millions, soit 2 millions. Et ils perdent non seulement tous les intérêts ou le profit que 40 millions de capital employés productivement auraient rendus, mais ils perdent encore 38 millions, différence entre leur épargne et leur dépense ordinaire. » (Ricardo, Principes de l’Économie Politique et de l’impôt, chapitre XVII).
En outre, Ricardo fait valoir que la neutralité de la dette ne tient plus si l’on considère l’effet désincitatif des impôts sur l’activité économique. Pour lui, une dette publique trop élevée provoque l’évasion fiscale des contribuables :
« Un pays qui a laissé une grande dette s’accumuler, se trouve placé dans une situation artificielle. (…) Il est de l’intérêt de tout contribuable de se soustraire à cette charge, en en rejetant le paiement sur les autres. Le désir de transporter sa personne et son capital dans un autre pays où on soit exempt de pareilles charges, devient à la longue irrésistible, et finit par vaincre la répugnance naturelle que tout le monde éprouve à renoncer à son pays natal et aux objets de ses premières affections. Un pays qui s’est plongé dans les embarras qu’entraîne ce système artificiel, ferait bien de s’en débarrasser par le sacrifice même d’une portion de son capital, suffisante pour racheter sa dette. » (Ricardo, Op. Cit.).
Quel intérêt présente ce « théorème de Ricardo » de nos jours ? Celui de faire valoir qu’une baisse de l’épargne publique (c’est-à-dire une hausse des déficits) sera accompagnée d’une hausse de l’épargne privée, dans la mesure où les agents anticipent qu’ils paieront plus d’impôts à l’avenir, donc que leurs revenus disponibles futurs seront plus faibles. Plus cet effet compensateur est fort, moins la dette publique a d’effets sur l’activité. Si l’épargne privée augmente de 60 quand le déficit public augmente de 100, la baisse de l’épargne nationale, et donc de l’investissement, n’est que de 40. (Dans le cas extrême où l’épargne privée augmenterait de 100, l’épargne nationale serait inchangée et l’on retomberait sur le résultat d’équivalence ricardienne).
Empiriquement, le verre est à moitié vide, donc à moitié plein : la corrélation entre épargne publique et épargne privée dans les pays de l’OCDE est d’environ - 0.5, ce qui signifie qu’un euro supplémentaire de déficit public est en moyenne compensé par une hausse de l’épargne privée de 50 cents. On est donc à mi-chemin entre une situation d’équivalence ricardienne stricte et une situation dans laquelle une hausse de la dette réduit du même montant les fonds disponibles pour l’investissement.
Dessin de Gilles Rapaport