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Ludwig von Mises et l'analyse de l'action humaine
Portraits d'Économistes
Ludwig von Mises et l'analyse de l'action humaine
Économiste austro-américain très influent au sein du mouvement libéral et libertarien. Sa pensée met en évidence l'importance des opinions subjectives des individus dans la formation des phénomènes sociaux et sur les déséquilibres qui en découlent.

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Qui suis-je ?
Ludwig von Mises est un économiste austro-américain très influent au sein du mouvement libéral et libertarien.
Membre d’une famille juive de Galicie (Ukraine), il a enseigné à Vienne, où il a fondé un institut de recherche, et à Genève jusqu’en 1940, avant de se réfugier aux États-Unis où il a enseigné à l’université de New York.
Il est mort en 1973 à l’âge de 92 ans. Peu favorable à la macroéconomie et aux statistiques, il se concentre sur la subjectivité des individus pour expliquer la formation des tendances sociales et sur le rôle central des entreprises : « Le sujet de l’économie, ce n'est pas les biens et les services, c’est les actions des hommes vivants. Son but n’est pas de s’étendre sur des constructions imaginaires telles que l'équilibre. Ces constructions ne sont que des outils de raisonnement. La seule tâche de l’économie, c’est d’analyser les actions des hommes, d'analyser des processus. »
Dans son dernier livre majeur, Le Fondement ultime de la science économique (1962), il critique sévèrement les méthodes de la science économique.
Quand l’offre disponible sera épuisée, les stocks vides ne seront pas reconstitués.Ludwig von Mises
Mes dates clés
- Naissance : 29 septembre 1881 à Lviv, Ukraine
- Décès : le 10 octobre 1973, à l'âge de 92 ans, à New York, Etats-Unis
Mes principaux ouvrages
- The Anti-capitalistic Mentality, 1956 (« La mentalité anti-capitaliste »)
- Theory and History, 1957 (« Théorie et histoire : une interprétation de l'évolution économique et sociale »)
- The Ultimate Foundation of Economic Science, 1962 (« Le Fondement ultime de la science économique »)
Comprendre une de mes théories en quelques lignes : Contrôle des prix, intentions et conséquences
« Considérons d’abord le plafond, ou le prix maximum. Le prix naturel qui émergerait dans un marché non entravé correspondrait à un équilibre de tous les prix. À ce moment-là, le prix et le coût coïncident. Maintenant, si le gouvernement impose un plafond inférieur à ce prix de marché, le prix tombe au-dessous du coût de production. Par conséquent, les vendeurs s’abstiendront de vendre – à l’exception des marchandises qui gâchent ou perdent de la valeur rapidement – et conserveront leurs marchandises dans l’espoir que la réglementation gouvernementale sera bientôt levée. Les acheteurs potentiels seront donc incapables d’acheter les marchandises désirées.
Mais le gouvernement n’a jamais voulu ces effets. Il voulait que les acheteurs profitent des biens à des prix inférieurs, pas les priver de la possibilité de les acheter. Il aura donc tendance à compléter sa politique de prix plafond par une obligation faite aux producteurs de mettre sur le marché toute l’offre disponible. (…) À ce stade, les contrôles des prix rencontrent leur plus grande difficulté. (…)
L’offre et la demande ne coïncident plus; la demande dépasse l’offre, et le mécanisme du marché, qui tend à rapprocher l’offre et la demande à travers les variations de prix, ne fonctionne plus. Les marchandises vont désormais aux premiers qui se présentent ou à ceux qui ont des liens personnels avec les vendeurs. Mais le gouvernement ne peut pas se contenter de cette sélection d’acheteurs.
Il veut que tout le monde ait les biens à des prix inférieurs [au prix de marché] et souhaite éviter les situations dans lesquelles certaines personnes ne sont pas servies. Par conséquent, (…) il doit recourir au rationnement. La quantité de marchandises arrivant sur le marché n’est plus laissée à la discrétion des vendeurs et des acheteurs. Le gouvernement distribue maintenant l’offre disponible et donne à chacun ce à quoi il a droit selon les procédures de rationnement.
Mais ces mesures s’avèreront également insuffisantes. (…) Quand l’offre disponible sera épuisée, les stocks vides ne seront pas reconstitués parce que la production ne couvre plus ses coûts. Si le gouvernement veut assurer l’approvisionnement des consommateurs, il devra donc prononcer une obligation de production.
Si nécessaire, il devra fixer les prix des matières premières et des produits semi-finis, et éventuellement les salaires, et forcer les hommes d’affaires et les ouvriers à produire et à travailler à ces prix. On peut donc facilement voir qu’il est inconcevable de recourir au contrôle des prix en tant qu’intervention isolée dans l’ordre de la propriété privée. Le gouvernement ne peut atteindre le résultat escompté et, par conséquent, il est nécessaire de passer de la tarification isolée au contrôle complet du travail, des moyens de production, de ce qui est produit, comment il est produit et comment il est distribué. (…)
L’histoire du socialisme de guerre l’a clairement illustré. Les gouvernements qui cherchaient à s’ingérer dans les opérations de marché jugeaient nécessaire, étape par étape, de passer de l’interférence isolée des prix à la socialisation complète de la production. »
Cette citation de Ludwig von Mises résume la méfiance qu’ont généralement les économistes à l’égard des politiques de contrôle des prix. Mises souligne l’inefficacité de ces politiques ainsi que la menace qu’elles représentent pour la liberté individuelle. Inefficace, car engendrant un déséquilibre entre l’offre et la demande, de sorte que, dans le cas d’un prix plafond, tout le monde ne peut pas acheter le bien au prix fixé par la réglementation. Menaçante pour les libertés, si le gouvernement s’obstine à poursuivre les objectifs incompatibles de fixation des prix et d’élimination de la pénurie créée par sa propre politique.
Malgré ces avertissements, les gouvernements, de tout temps, se sont obstinés à vouloir prémunir leurs citoyens contre les conséquences négatives des fluctuations de prix en imposant un contrôle de ces derniers, sans se préoccuper des causes profondes de ces fluctuations ni du rôle important joué par les prix dans l’allocation des ressources.
Et les dérives autoritaires observées par Mises sont monnaie courante : dès 301, l’empereur Dioclétien impose des plafonds sur les prix de diverses denrées, sous peine d’exécution. Plus récemment, des décennies de contrôle des prix au Venezuela ont accru les pénuries de biens alimentaires ou de consommation courante comme le papier-toilette ou les couches jetables.
L’effondrement de la production agricole locale a conduit à de sévères problèmes de malnutrition. La violence et la corruption ont explosé et le Venezuela est devenu le premier exportateur de demandeurs d’asile de l’Amérique latine. Pour éviter les passe-droits inhérents à toute situation de pénurie administrée, le gouvernement du Venezuela a mis en place un système biométrique de surveillance des achats de toute la population, afin d’empêcher certains d’acheter plus que leur quota légal. Les craintes de Mises restent donc bien d’actualité : à Caracas, du fait des nouvelles technologies de l’information, elles atteignent une dimension orwellienne.
Plus proche de nous, en France, la hausse des loyers et la pénurie de logement ont entraîné des nouvelles mesures d’encadrement des loyers (loi Alur), soutenues par des politiques coercitives réduisant la liberté des propriétaires : taxe sur les logements vides et les résidences secondaires, interdiction des locations meublées de moins d’un an dans les grandes villes, etc.
Cet épisode, bien que moins saillant que l’expérience vénézuélienne, illustre tout aussi bien l’actualité des principes énoncés par Ludwig von Mises. Ces mesures ont peu de chances d’améliorer le sort des locataires : l’évidence empirique montre que le contrôle des loyers réduit la quantité et la qualité des logements mis sur le marché. De fait, un article de L’Express montre qu’entre 2015 et 2017, le nombre de baux a chuté de 8 % et, qu’en 2017, les travaux d’amélioration étaient au plus bas depuis vingt ans.
Contrôle des prix : intentions et conséquences
► Ma théorie en un dessin
Ce qui engendre la guerre, c'est la philosophie économique du nationalisme : embargos, contrôle des échanges et des changes, dévaluation monétaire. La philosophie de la protection est une philosophie de la guerre.Ludwig von Mises