Début juillet, alors que les députés européens s’apprêtent à déserter Bruxelles pour quelques semaines de congé, des cartes postales aux tons pastel atterrissent sur leurs bureaux. Au recto, des coquillages, des étoiles de mer et des tubes de crème solaire.
Au verso, ce court message de la Confédération européenne des Syndicats : « C’est la période des vacances et nous méritons toutes et tous une petite pause – en particulier les travailleuses qui fournissent un travail essentiel chaque jour. Pourtant, nombre d’entre elles sont sous-payées. […] Nous comptons sur votre soutien pour obtenir une directive solide sur la transparence salariale à votre retour. »
À la rentrée, la directive en question est entrée dans sa toute dernière phase de négociation. Les eurodéputés, très favorables à l’initiative, et les États membres, un peu plus frileux, tenteront de s’accorder sur les derniers détails.
Dévoiler, évaluer, corriger
Globalement, le texte entend renforcer le « droit à l’information » des travailleurs et travailleuses : ces derniers pourront ainsi s’enquérir, auprès de leur employeur, du salaire moyen de certains collègues ou des critères retenus pour établir leur progression de carrière. Nombre d’entreprises seront par ailleurs contraintes de publier chaque année les écarts de rémunération entre leurs travailleurs féminins et masculins – écarts correspondant aux salaires mais aussi aux « composantes complémentaires » (Ticket Restaurant, voitures de société, ordinateurs, etc.).
Début juillet, alors que les députés européens s’apprêtent à déserter Bruxelles pour quelques semaines de congé, des cartes postales aux tons pastel atterrissent sur leurs bureaux. Au recto, des coquillages, des étoiles de mer et des tubes de crème solaire.
Au verso, ce court message de la Confédération européenne des Syndicats : « C’est la période des vacances et nous méritons toutes et tous une petite pause – en particulier les travailleuses qui fournissent un travail essentiel chaque jour. Pourtant, nombre d’entre elles sont sous-payées. […] Nous comptons sur votre soutien pour obtenir une directive solide sur la transparence salariale à votre retour. »
À la rentrée, la directive en question est entrée dans sa toute dernière phase de négociation. Les eurodéputés, très favorables à l’initiative, et les États membres, un peu plus frileux, tenteront de s’accorder sur les derniers détails.
Dévoiler, évaluer, corriger
Globalement, le texte entend renforcer le « droit à l’information » des travailleurs et travailleuses : ces derniers pourront ainsi s’enquérir, auprès de leur employeur, du salaire moyen de certains collègues ou des critères retenus pour établir leur progression de carrière. Nombre d’entreprises seront par ailleurs contraintes de publier chaque année les écarts de rémunération entre leurs travailleurs féminins et masculins – écarts correspondant aux salaires mais aussi aux « composantes complémentaires » (Ticket Restaurant, voitures de société, ordinateurs, etc.).
Les entreprises concernées devront également dévoiler en interne l’écart de rémunération entre les travailleurs féminins et masculins occupant des postes similaires ou accomplissant un « travail de valeur égale ».
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En Chiffres
379 euros à 890 euros
C’est le coût que devront assumer les entreprises de plus de 250 salariés pour assurer la communication des informations de rémunération.
Source : Commission européenne
De possibles sanctions
Ce principe n’étant pas encore bien encadré, chaque État membre devra se doter d’outils permettant d’évaluer la valeur d’un travail – selon la formation, l’expérience professionnelle, le niveau d’efforts, de responsabilités.
Tout écart de rémunération constaté « pour un même travail ou un travail de même valeur » devra donc être justifié. Sans justification valable, les employeurs devront, avec les représentants des travailleurs, se livrer à une évaluation approfondie des rémunérations et définir des mesures pour rectifier le tir, sous peine de sanctions.
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Transparence, pour quoi faire ?
Pour la Confédération européenne des syndicats, la transparence salariale reste l’outil idéal pour révéler « la sous-évaluation systématique du travail des femmes », leur ségrégation professionnelle, ainsi que pour mieux lutter contre les bas salaires.
« On a besoin de la transparence pour coaliser un maximum, prendre conscience des irrégularités. Surtout dans un contexte où les entreprises connaissent une explosion des statuts : CDI, CDD, intérimaires, free-lances… », appuie Gaëlle Demez, responsable de la section Femmes de la CSC, principale organisation syndicale belge.
Cette dernière suit de près les négociations sur la future directive. « D’abord parce que les syndicats belges sont traditionnellement très mobilisés – le pays affiche l’un des plus forts taux de syndicalisation européens, avec 50 % de salariés syndiqués, contre 10 % seulement en France. Ensuite, et surtout, parce que cette directive aura « des bénéfices directs », assure Gaëlle Demez. Et pas seulement dans les 13 États n’ayant encore jamais légiféré sur le sujet.
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En Chiffres
10
États membres avaient déjà introduit des mesures obligatoires en matière de transparence salariale lorsque la Commission européenne a commencé à travailler sur le projet de directive, en 2020.
Une plus-value
Même en Belgique – dotée depuis 10 ans d’une loi sur l’écart salarial – Gaëlle Demez s’attend à des retombées positives. « Les rémunérations des cadres belges ne sont pas systématiquement publiées. Pour les femmes cadres, la directive pourra donc être bénéfique », assure-t-elle. Son organisation salue également l’introduction des sanctions.
Elle souligne, par ailleurs, que « pour un petit pays, la transparence peut être une plus-value » vis-à-vis des voisins. « La même législation pour tous, c’est aussi moins de concurrence déloyale », conclut-elle.
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Les trois craintes des employeurs
De leur côté, on ne voit pas la future directive, et la transparence salariale de manière générale, d’un aussi bon œil. En témoigne l’étude réalisée au printemps 2022 auprès de 250 employeurs et responsables des ressources humaines belges, à la demande du groupe Indeed. Pour 36 % d’entre eux, le salaire devrait simplement rester entre l’employeur et le travailleur, 30 % redoutent que leurs concurrents y aient accès et 15 % craignent que la transparence engendre des tensions entre collègues.
Ces arguments font écho à ceux de BusinessEurope, lobby européen des employeurs privés. Quoique « pleinement en faveur d’une participation plus égale au marché du travail », l’association fustige l’approche « trop détaillée et prescriptive » de l’UE. « Au vu des obligations très strictes fixées dans la directive, nous craignons qu’il soit assez facile pour les entreprises de se retrouver en situation de non-conformité sans le vouloir », détaille Maxime Cerutti, chargé des affaires sociales chez BusinessEurope.
Une charge trop lourde pour les PME ?
L’association craint, en outre, que les nouvelles règles impliquent une charge administrative et financière trop lourde pour les PME. Maxime Cerutti juge donc « crucial » que les entreprises de moins de 250 salariés n’aient pas à collecter et publier les informations sur les écarts de rémunération. Les négociations en cours devront permettre de trancher.
BusinessEurope peut compter sur les gouvernements européens pour défendre ce seuil de 250 salariés. Mais de l’autre côté de la table, les eurodéputés, en phase avec les revendications des syndicats, batailleront eux pour que seules les entreprises de moins de 50 employés soient exemptées.