« Il y a trois ans, j’ai commencé mon rapport sur la réforme du lycée. Je me suis demandé ce qui manquait le plus dans le parcours des élèves, pour compléter la boîte à outils des compétences acquises au lycée. C’est ainsi que l’idée d’un grand oral s’est imposée. »
Pierre Mathiot, directeur de Sciences Po Lille, est l’auteur de l’étude qui a inspiré la réforme du lycée et celle du bac.
À lire Pourquoi les Français ne savent pas s'exprimer en public
« Je suis allé observer les pratiques d’autres pays, notamment Il Colloquio italien, mais aussi le Grand O de Sciences Po, explique Pierre Mathiot. Donner un côté solennel à cette nouvelle épreuve me semblait important pour réhabiliter notre bac, lui rendre sa valeur de rite de passage. »
Vecteur d’égalité des chances
C’est ainsi qu’en juin prochain la génération (née en) 2003 sera la toute première à affronter le nouveau bac. Un examen modifié en profondeur, puisqu’il repose sur un contrôle continu à hauteur de 40 % de la note finale et seulement cinq épreuves en juin, dont le fameux grand oral.
« Il y a trois ans, j’ai commencé mon rapport sur la réforme du lycée. Je me suis demandé ce qui manquait le plus dans le parcours des élèves, pour compléter la boîte à outils des compétences acquises au lycée. C’est ainsi que l’idée d’un grand oral s’est imposée. »
Pierre Mathiot, directeur de Sciences Po Lille, est l’auteur de l’étude qui a inspiré la réforme du lycée et celle du bac.
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« Je suis allé observer les pratiques d’autres pays, notamment Il Colloquio italien, mais aussi le Grand O de Sciences Po, explique Pierre Mathiot. Donner un côté solennel à cette nouvelle épreuve me semblait important pour réhabiliter notre bac, lui rendre sa valeur de rite de passage. »
Vecteur d’égalité des chances
C’est ainsi qu’en juin prochain la génération (née en) 2003 sera la toute première à affronter le nouveau bac. Un examen modifié en profondeur, puisqu’il repose sur un contrôle continu à hauteur de 40 % de la note finale et seulement cinq épreuves en juin, dont le fameux grand oral.
C’est Cyril Delhay, professeur à Sciences Po Paris et « père » des programmes Égalité des chances de la grande école, au début des années 2000, qui s’est attelé à dessiner les contours de cette nouvelle épreuve.
À voir : C'est quoi les inégalités ?
Pour ce spécialiste de l’art oratoire, qui a formé à la prise de parole huit membres du gouvernement, l’instauration d’une épreuve orale au bac n’est rien moins qu’une « révolution », une « réforme de société ». Un outil qui doit permettre de faire de l’oral un vecteur de l’égalité des chances.
Dans son rapport sur le grand oral remis au ministre de l’Éducation nationale, en juin 2019, Cyril Delhay recommandait que la dimension orale soit développée dans toutes les disciplines et pas uniquement dans les matières littéraires.
Mathiot et Delay parient sur le fait que la mise en place d’une épreuve orale décisive – coefficient 10 en voie générale et 14 en voie technologique ! – va modifier les pratiques d’enseignement au lycée, en donnant plus de place à l’oral.
Aujourd’hui, un bon élève peut tout à fait avoir le bac avec mention sans avoir jamais ouvert la bouche en cours.
Pierre Mathiot,directeur de Sciences Po Lille
Pour ses défenseurs, le grand oral devrait à terme permettre à tous les jeunes Français, quelles que soient leurs origines familiales et sociales, de mieux maîtriser leur expression en public, et ainsi faciliter leur adaptation à l’enseignement supérieur, mais aussi leur insertion professionnelle.
« Aujourd’hui, un bon élève peut tout à fait avoir le bac avec mention sans avoir jamais ouvert la bouche en cours, affirme Pierre Mathiot. Je suis convaincu que la perspective du grand oral va inciter les professeurs, au lycée, mais aussi au collège, à travailler davantage la prise de parole avec leurs élèves. Et dans 10 ans, nous en verrons les effets sur toute une génération. »
Pas un concours d'éloquence
Qui dit « nouvelle épreuve » dit « formation des professeurs » pour les aider à préparer leurs élèves. Johan Bœuf est professeur d’histoire-géographie, mais aussi formateur : au sein de l’académie de Poitiers, il participe à la formation de ses collègues à la préparation du grand oral.
Concrètement, l’épreuve durera 40 minutes : 20 minutes de préparation et 20 minutes de prise de parole. Au début de l’épreuve, le candidat proposera deux questions, portant sur ses spécialités, c’est le jury qui choisira celle qu’il devra présenter pendant cinq minutes. Suivront 10 minutes de questions-réponses avec le jury, puis cinq minutes d’échange sur le projet d’orientation du futur bachelier.
Le travail de l’Éducation nationale est d’aider les élèves à s’émanciper en allant découvrir des compétences qu’ils ne pensaient pas avoir.
Johann Bœuf,formateur de professeurs pour le grand oral.
L’idée : permettre au candidat de démontrer sa capacité à convaincre à l’oral, d’abord sur un sujet « académique », ensuite sur un sujet plus personnel.
« L’écueil à éviter, prévient Johann Bœuf, est celui du concours d’éloquence, une forme de parole vide qui n’est pas de l’ordre du savoir. Le travail de l’Éducation nationale est d’aider les élèves à s’émanciper en allant découvrir des compétences qu’ils ne pensaient pas avoir. »
Un sacré pari… pas assez accompagné, selon des syndicats enseignants, qui ont déjà dénoncé la faiblesse du nombre d’heures consacrées à la préparation de ce nouveau « Grand O ».
Pour aller plus loin
« Faire du grand oral un levier d’égalité des chances », rapport de Cyril Delhay remis au ministère de l’Éducation nationale ; en juin 2019.
La pédagogie Freinet a été développée par un enseignant, Célestin Freinet, revenu mutilé de la Première Guerre mondiale. Il a développé toute une série de techniques pédagogiques, les « invariants », qui ont pour objectif de favoriser l’expression libre des enfants.