Géopolitique
Black Panther. Pourquoi le Wakanda ne pourrait pas exister dans la réalité
Dans le film Black Panther (2018), un royaume secret d’Afrique de l’Est jouit d’une immense richesse grâce à un métal précieux, tout en vivant en marge du monde. Une bonne idée scénaristique. Économiquement, elle ne vaut pas un clou.
Clément Rouget
© DR
« Il y a des milliers d’années, une météorite composée de vibranium, la substance la plus puissante de l’univers, s’est écrasée sur le continent africain, sur une terre appelée le Wakanda, narre, en incipit du film, T’Challa alias Black Panther, le souverain du territoire. Les habitants ont utilisé le vibranium pour développer les technologies les plus avancées de la planète. »
Le précieux métal magique permet en effet au pays d’Afrique de l’Est d’atteindre un développement technologique et économique inégalé, en particulier en comparaison de ses voisins (l’Éthiopie, le Soudan, l’Ouganda et le Kenya).
Ses usages et applications sont multiples. C’est à la fois un métal quasiment indestructible, une substance qui permet de soigner, développer des transports futuristes ou produire des armes qui font passer les pistolets pour « primitifs »…
La malédiction des ressources
Seulement, dans le monde réel, avoir un sous-sol riche en minerai est loin d’être une garantie de richesse pour un pays. Pire, les ressources naturelles représentent souvent une menace pour la croissance.
Ce paradoxe a un nom : la maladie hollandaise (ou malédiction des ressources). Ses causes sont multiples (captation de la rente par une caste oligarchique, corruption généralisée…) et les exemples nombreux (Algérie, Angola, Venezuela…).
Cette malédiction est loin d’être inévitable, le meilleur exemple étant la Norvège, qui a placé les bénéfices issus de l’exploitation de ses ressources gazières et pétrolières dans un fonds souverain. En Afrique, le pays qui se rapprocherait le plus de la réussite du Wakanda est sans doute le Botswana, qui a su utiliser la richesse issue de l’exploitation des diamants présents dans son sol pour se développer de façon relativement efficace. Oui, mais voilà, ces deux pays sont des démocraties, ce qui est loin d’être le cas du Wakanda.
Coûteux isolement
Au Wakanda, les précieuses ressources naturelles du pays sont gérées par le roi et quelques conseillers. Le souverain ne peut être démis de ses fonctions que s’il est vaincu par un rival lors d’un combat tribal.
Et ce n’est pas tout. Pour protéger son trésor naturel, le Wakanda a fait le choix de vivre caché et de se couper du monde durant des siècles.
Le pays est le seul fournisseur de vibranium et ses habitants les seuls consommateurs, un peu comme si les Botswanais étaient les seuls à porter des colliers de diamants.
Bref, un environnement politique et économique loin d’être idéal pour favoriser la création de richesse et l’innovation technologique… Le Wakanda, c’est vraiment du cinéma !
Pour aller plus loin
Lessons from Marvel’s Black Panther : Natural resource management and increased openness in Africa, Mariama Sow et Amadou Sy, Brookings, 2018
“The Political Economy of Black Panther : Who Benefits from Wakanda’s Mineral Resources ?”, Thomas Lassourd, Natural Resource Governance Institute, 2018
Dans le programme de SES
Terminale. « Quels sont les sources et les défis de la croissance économique ? »
Terminale « Quels sont les fondements du commerce international et de l'internationalisation de la production ? »
- Accueil
- Politique économique
- Croissance
Black Panther. Pourquoi le Wakanda ne pourrait pas exister dans la réalité