
Cet article est extrait de notre magazine consacré aux super-pouvoirs économiques des politiques. À retrouver en kiosque et en ligne.
Les exposés ci-dessous s’inscrivent dans un cours de rhétorique, ils ne reflètent en rien les idées et opinions personnelles des étudiants concernés.
Bien sûr que non, l’inflation ronge l’économie comme un cancer
Baptiste Gillot, étudiant en 1re année à l’IPAG Business School
L’inflation naît d’un déséquilibre économique qui se manifeste par une baisse du pouvoir d’achat de la monnaie accompagnée d’une hausse générale des prix. En d’autres termes, l’inflation nous appauvrit.
Elle paupérise les travailleurs et les épargnants, car la valeur des rémunérations salariales et celle de l’épargne décroît. À titre d’illustration : en France, en 2019, le taux d’inflation s’élevait à 1,1 % ; c’est-à-dire que la valeur de l’argent économisé par les agents économiques a baissé de 1,1 %… avec des conséquences en cascade.
Si le pouvoir d’achat des ménages diminue, leur consommation de biens et services va être impactée. Or la consommation est la principale source de croissance d’une économie comme celle de la France. Par ailleurs, il est important de souligner que si les ménages s’appauvrissent, ils vont puiser dans leur épargne, ce qui réduira d’autant les ressources disponibles des banques.
Ensuite, ce n’est pas seulement au-dessus du portefeuille des ménages que se dresse une épée de Damoclès, mais aussi au-dessus des entreprises nationales. Si les prix des biens domestiques augmentent, s’ils deviennent trop chers, la liste des pays importateurs menace de s’atrophier.
Pourquoi acheter mes produits en France quand je peux les trouver moins chers et de qualité similaire ailleurs ? L’inflation est donc à l’origine d’une baisse de la demande extérieure, qui peut à son tour provoquer un déclin de l’activité intérieure.
Si ce déclin n’est pas vite maîtrisé, certaines entreprises des secteurs les plus concurrentiels réduiront leurs effectifs et le chômage repartira à la hausse. En outre, certaines multinationales ayant fragmenté leurs chaînes de valeurs pourraient partager le même sort en perdant plusieurs de leurs partenaires commerciaux réticents à payer plus cher.
In fine, on peut parler de sphère inflationniste. Chaque conséquence de l’inflation est suivie de répercussions en cascade. Elle ronge, comme un cancer. En outre, l’inflation ne sert que les agents économiques très endettés, par exemple l ’État : en dévalorisant la monnaie, on réduit le montant de la dette.
Or les ménages sont les principaux martyrs de cette politique égoïste. L’utopie d’une croissance toujours plus importante est réduite à néant. Une économie où règnent les politiques d’inflation est condamnée. Alors, pourquoi poursuivre dans cette voie inepte ?
Éco-mots
Fragmentation de la chaîne de valeur
Délocalisation des opérations de conception d’un produit final qui sont disséminées dans plusieurs pays dans une logique de mondialisation.
Mais si, car elle vient avec la croissance
Amaury Bellanger de Rebourseaux, étudiant en 1re année à l’IPAG Business School
Notre système économique repose sur un équilibre fragile. L’inflation est la clef de voûte de ce système, bien que produisant une hausse des prix et donc une baisse du pouvoir d’achat. Commençons par expliquer grossièrement la manière dont se crée l’inflation avant d’expliquer en quoi cette dernière peut être une bonne chose.
La somme de l’ensemble des crédits accordés par une banque dépasse les réserves monétaires de cette dernière. Le patrimoine des clients fait la richesse de la banque et permet ces crédits. De l’argent est injecté dans le circuit économique, permettant son bon fonctionnement et créant un cercle vertueux.
Les ménages disposent de moyens et peuvent consommer, les entreprises en profitent, embauchent et versent des salaires. L’inflation résulte du déséquilibre entre une demande plus forte (due à la hausse du pouvoir d’achat lié à la croissance) et une offre trop faible pour satisfaire l’ensemble des consommateurs. L’inflation est donc le compagnon de route de la croissance.
Mais attention : avec l’inflation, la monnaie perd de sa valeur, ce qui diminue le chiffre d’affaires des entreprises et fragilise finalement une économie jusqu’à la détruire de l’intérieur.
Ce phénomène a été observé de manière tragique en Allemagne dans les années 1920, quand une hyperinflation (inflation d’extrême intensité) a fait exploser les prix. Par exemple, un timbre valant un mark en 1913 coûtait 750 milliards de marks en 1923 !
Cette dérive a favorisé le rachat d’entreprises allemandes par des firmes américaines, qui disposaient alors d’une monnaie plus fiable et mieux valorisée. L’inflation doit donc être surveillée de près. Aujourd’hui, en France, son taux se contient (hors crise) entre 1 % et 1,5 %.
Les banques centrales imposent un taux directeur aux banques (taux d’intérêt à court terme) pour contrôler la masse monétaire et réguler l’activité économiques des pays de leur périmètre. Les banques centrales cherchent l’équilibre entre le pouvoir d’achat des ménages, une monnaie viable et un circuit économique actif.
Il peut paraître contradictoire de dire que le maintien du pouvoir d’achat passe d’abord par une augmentation des prix, mais le système économique fonctionne ainsi. Il est évident que ce mécanisme cause des problèmes touche de plein fouet les ménages les plus modestes. La crise des « gilets jaunes » est liée à ces problèmes.
Éco-mots
Sphère inflationniste
Appellation donnée à l’enchaînement en cascade des répercussions négatives de l’inflation.
Jean-Paul Sartre déclarait : « L’utilitarisme était la philosophie de l’épargne : il perd tout sens quand l’épargne est compromise par l’inflation. » Si l’inflation a des qualités, l’absence d’inflation n’est pas bon signe, mais elle comporte des dangers que les banques centrales doivent contenir.