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En ces temps d’inflation record, doit-on taxer les surprofits ?
Politique économique
En ces temps d’inflation record, doit-on taxer les surprofits ?
TotalEnergies enregistre le meilleur bénéfice de son histoire : 20,5 milliards de dollars sur l’ensemble de l’année 2022 (+ 28 % par rapport à 2021). À l’origine de ces surprofits et de cette crise : l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la pénurie d’énergie et une inflation record. Il est tentant de vouloir taxer les « profiteurs », mais dans le contexte actuel, quelle la meilleure carte à jouer pour l’État ?
Pages animées par Mehdi Ounis, professeur de sciences de gestion en TST 1 et TST 2 Négociation et digitalisation de la relation client au lycée CARREL, à Lyon
© Stephane AUDRAS/REA
Les exposés ci-dessous s’inscrivent dans un cours de rhétorique, ils ne reflètent en rien les idées et opinions personnelles des étudiants concernés.
Non, l’État ne doit pas devenir confiscatoire
Valentin Sanchez et Léo Nunezsilva, étudiants en deuxième année de STS NDRC au lycée Carrel, à Lyon.
Malgré les profits records de TotalEnergies, les taxer davantage serait une grave erreur. Une grande partie de la population souhaiterait que de grands groupes énergétiques comme Engie ou TotalEnergies s’acquittent d’une contribution symbolique supplémentaire, mais ils savent aussi qu’une politique fiscale confiscatoire serait contreproductive.
Oui, les superprofits pourraient donner lieu à des supertaxes, mais attention, les bénéfices servent à financer les investissements de l’entreprise, à sécuriser ses approvisionnements, à se construire une marge de sécurité.
Les profits des entreprises servent aussi à créer d’autres sociétés et donc des emplois, par exemple dans le cadre de la planification énergétique et financent aussi la recherche et la création de nouvelles technologies viables et pérennes dans un contexte climatique incertain.
Nous savons également que le secteur de l’énergie est pourvoyeur d’emplois, dans le cadre de la construction de terminaux flottants, indispensables si la France veut remplacer le gaz russe arrivant par gazoduc par du gaz liquéfié, qui arrive par bateau.
De plus, si l’État taxait les entreprises dès qu’elles engrangent des bénéfices records, ces entreprises pourraient quitter le pays (sachant qu’elles ne rencontreront aucune difficulté à le faire, puisqu’elles sont déjà des multinationales).
Sans ces entreprises, l’économie française plongerait dans un cercle vicieux qui aurait que des effets bien plus délétères. Bien sûr, la joute politique est de mise : les critiques – parfois virulentes – d’une partie de la classe politique (Nupes) de ces superprofits est une façon de dénoncer le capitalisme et l’ultralibéralisme.
Enfin, compte tenu de la crise énergétique à venir, il est indispensable de soutenir le secteur de l’énergie pour qu’il puisse faire face aux enjeux à venir. Toutefois, ce secteur ne peut plus se développer comme par le passé. Il doit se transformer pour favoriser un modèle de développement durable où l’énergie sera accessible au plus grand nombre.
Éco-date
En 1916, le gouvernement d’Aristide Briand met en place une « contribution extraordinaire sur les bénéfices de guerre », qui va venir taxer les bénéfices réalisés par certaines entreprises grâce aux commandes militaires. Taxer les « profiteurs de guerre » devient alors un marqueur de l’économie de guerre.
Oui, face à une telle flambée des prix, c’est légitime
Emma Garcia et Marie Issartel, étudiantes en deuxième année de STS NDRC au lycée Carrel, à Lyon
Dans un monde où les prix flambent, certaines entreprises en profitent et la taxation des superprofits est un moyen de lutter contre la pauvreté. Taxer plus les entreprises qui font d’énormes bénéfices, cela peut donner une bouffée d’oxygène au pays en attendant que la situation s’améliore et que l’État trouve d’autres ressources. Ces entreprises participeront ainsi à l’effort collectif et un rééquilibrage apparaîtra aux yeux de tous.
De nombreux pays européens comme l’Italie, l’Espagne ou la Grèce se sont déjà prononcés en faveur d’une taxation des superprofits. Il serait temps que la France suive le mouvement !
Bien sûr, cette solution doit faire partie d’une politique au niveau national (il faudrait que la gauche et la droite s’entendent), mais aussi, peut-être, au niveau diplomatique : trouver un accord au niveau européen pour créer une taxe commune, car tous les pays traversent la crise économique.
Au cours des deux dernières années, des entreprises des secteurs pharmaceutiques, de l’énergie, de l’alimentation ou des nouvelles technologies ont réalisé des superprofits. Pendant ce temps, en France et dans le monde, les prix flambent.
Sur 2022, en France, selon UFC-Que Choisir, les prix de l’alimentation augmentent de 7 %, l’électricité de 8 % et les dépenses en grande surface de 7 %. À cause de cette hausse exceptionnelle, 11 % des Français sautent parfois des repas et 13 % préfèrent repousser certains soins médicaux.
Les ménages français sont contraints de choisir entre remplir le plein de leur voiture ou se chauffer. Telle est la question si épineuse et combien complexe. Les recettes d’un large impôt sur les bénéfices exceptionnels des multinationales pourraient permettre de s’assurer que ce ne sont pas les plus pauvres qui paient le prix fort.
Enfin, l’utilisation des jets privés, énergivores et coûteux, devrait être lourdement sanctionnée, au moins pour dénoncer cette ineptie. Heureusement, des initiatives pionnières ont été prises, comme le Solar Impulse. Elles encouragent à construire un monde plus propre et durable grâce aux investissements permis par leurs bénéfices exceptionnels. Une alternative à la taxation ?
Éco-mots
Solar impulse
Innovation technologique au service des défis environnementaux. Programme d’aviation à l’énergie solaire mis en place par les Suisses Bertrand Piccard et André Borschberg.