S’il fallait résumer d’un mot le métier de chief happiness officer (CHO), ce serait : l’humain. C’est le cœur de cette fonction qui consiste à développer la qualité de vie au travail au sein d’une organisation. Apparu dans les années 2000 chez Google, ce job s’est rapidement répandu dans les start-up, aux États-Unis et ailleurs dans le monde, avant de conquérir de plus grandes entreprises. L’hébergeur français de sites web OVH et le leader mondial du petit équipement domestique SEB ont ainsi tous deux leur CHO.
La montée en puissance de cette fonction n’a pas été exempte de polémiques. Certains, comme Mathilde Ramadier dans son livre Bienvenue dans le nouveau monde (Premier Parallèle, 2017), ont dénoncé l’injonction au bonheur dans les start-up comme une façon de masquer des conditions de travail parfois déplorables. Traduit littéralement en français – directeur du bonheur – ce métier peut aussi faire sourire. S’agit-il simplement d’installer un baby-foot ou une salle pour faire la sieste ?
En réalité, le chief happiness officer coiffe de multiples casquettes.
« Il est fédérateur car il crée du lien, de la convivialité, et améliore les conditions de travail des collaborateurs, explique Angelika Mleczko, consultante et formatrice CHO. Mais c’est aussi un facilitateur, qui met en place de nouvelles méthodes de collaboration, et un révélateur de talents, qui aide les employés à développer leur potentiel. » Le chief happiness officer est également un « relais du chef d’entreprise pour porter et animer la culture d’entreprise », ajoute Olivier Toussaint, cofondateur du Club des CHO, un réseau qui réunit chief happiness officer et fonctions équivalentes de quelque 250 entreprises.
Entre cohésion et culture partagée
C’est exactement la mission pour laquelle Thu-Thuy Trinh a été recrutée, il y a un an, au sein du cabinet de conseil Inspearit. Tout l’enjeu était de « développer et entretenir une culture partagée dans une organisation où les consultants sont chez nos clients et non au siège, afin de susciter un sentiment d’appartenance et de prévenir les risques de démotivation et de renouvellement trop fréquent du personnel », explique-t-elle. Pour créer de la cohésion entre les consultants, elle a notamment facilité l’organisation de conférences au siège parisien du cabinet où ces derniers peuvent échanger sur leurs expériences respectives chez les clients.
Une grande force mentale
À mi-chemin entre la communication interne et les ressources humaines, le CHO doit posséder un certain nombre de qualités humaines, comme la bienveillance, l’empathie et l’écoute, et porter une attention particulière aux situations personnelles. « C’est aussi le rôle du CHO que de déceler les problèmes sous-jacents, qu’ils soient professionnels, comme un burn out, ou personnels, comme une maladie ou un deuil. Il pourra alors faire le relais avec les professionnels de santé », poursuit Angelika Mleczko. Le CHO est aussi chargé « d’accompagner tous les changements qui peuvent être anxiogènes pour les collaborateurs », ajoute Thu-Thuy Trinh, comme la mise en place d’un nouveau logiciel, un déménagement, un rachat par une autre entreprise ou même un plan de restructuration.
Voilà pourquoi le métier de CHO requiert « une grande force mentale, prévient Olivier Toussaint. De nombreux étudiants me contactent enthousiasmés par ce métier qui peut faire rêver. Mais il ne faut pas cacher que ce n’est pas toujours évident car lorsqu’on est confronté à l’humain, c’est pour le meilleur et pour le pire. » Le CHO doit d’ailleurs aussi être doté d’une bonne dose de diplomatie car il peut être appelé à jouer le médiateur entre deux ou plusieurs employés en conflit. Enfin, une certaine créativité est requise, souligne Thu-Thuy Trinh : « Il faut être créatif et force de proposition pour se renouveler et toujours intéresser les collaborateurs. ».