Invitation aux sorties et aux activités, livraison de repas à domicile ou accueil dans son restaurant, assistance administrative personnalisée… « Nos Ehpad sont devenus un lieu ressource plus ouvert qu’avant », affirme Saverio Monferrato, chef de projet sur le dispositif Seniors Connect développé par le Groupe SOS depuis 2016.
Cet organisme à but non lucratif a mis en place, dans quatre de ses établissements de Moselle, plusieurs services pour les personnes âgées souhaitant rester à domicile mais ayant besoin d’un accompagnement.
Sur demande, la personne coordinatrice présente dans chaque Ehpad évalue leurs besoins et les soutient pour trouver une aide à domicile ou recréer du lien social en les incluant dans les ateliers organisés par l’établissement. L’Ehpad devient alors une véritable plateforme multiservice, à la fois pour ses résidents et pour les personnes extérieures.
Le think tank Matières Grises, qui rassemble plusieurs experts et professionnels du grand âge, souhaiterait que cette forme d’Ehpad aille encore plus loin en ouvrant « espaces de coworking, boutique éphémère, galerie, espace de vente de produits locaux, bibliothèque… Nous avons dix ans pour essayer et tester, pour réfléchir à construire les tiers-lieux de demain », avancent-ils dans un rapport sur l'Ehpad du futur, publié en juin.
Invitation aux sorties et aux activités, livraison de repas à domicile ou accueil dans son restaurant, assistance administrative personnalisée… « Nos Ehpad sont devenus un lieu ressource plus ouvert qu’avant », affirme Saverio Monferrato, chef de projet sur le dispositif Seniors Connect développé par le Groupe SOS depuis 2016.
Cet organisme à but non lucratif a mis en place, dans quatre de ses établissements de Moselle, plusieurs services pour les personnes âgées souhaitant rester à domicile mais ayant besoin d’un accompagnement.
Sur demande, la personne coordinatrice présente dans chaque Ehpad évalue leurs besoins et les soutient pour trouver une aide à domicile ou recréer du lien social en les incluant dans les ateliers organisés par l’établissement. L’Ehpad devient alors une véritable plateforme multiservice, à la fois pour ses résidents et pour les personnes extérieures.
Le think tank Matières Grises, qui rassemble plusieurs experts et professionnels du grand âge, souhaiterait que cette forme d’Ehpad aille encore plus loin en ouvrant « espaces de coworking, boutique éphémère, galerie, espace de vente de produits locaux, bibliothèque… Nous avons dix ans pour essayer et tester, pour réfléchir à construire les tiers-lieux de demain », avancent-ils dans un rapport sur l'Ehpad du futur, publié en juin.
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Autant de propositions qui montrent que le modèle de l’Ehpad « hors les murs » a un gros potentiel, sans être encore « stabilisé », note Louis Braverman, sociologue à l’Université Sorbonne Paris Nord. « Il n’existe pas de recensement exhaustif de ces divers projets, car ils se développent dans des contextes différents avec des ressources humaines et des institutions variées, ce qui rend une évaluation globale difficile. » Cet éparpillement des initiatives ne permet pas non plus aux dispositifs de profiter d’aides financières durables.
Crise des recrutements
D'employé de supermarchés à aide-soignant ?
Privés ou publics, les Ehpad manquent de bras : « 81 % de ces établissements déclarent avoir des postes vacants », relevait en 2019 le rapport El Khomri sur l’attractivité des métiers du grand âge. Les besoins sont particulièrement criants et l’important turnover sur les postes d’aides-soignants affecte le taux d’encadrement des résidents davantage dans le privé que dans le public.
Le recrutement est devenu une priorité et les initiatives originales se multiplient. Le groupe privé Korian, leader français et européen des services de soins et d’accompagnement aux personnes âgées dépendantes, a créé des passerelles avec Monoprix pour favoriser la reconversion d’employés de supermarchés volontaires vers le métier d’aide-soignant. Le groupe compte en former une partie via son propre centre de formation d’apprentis avec le soutien du gouvernement.
Une mauvaise image aggravée par la crise
Dans le cas de Seniors Connect, les résultats sont donc encore modestes, mais prometteurs : une centaine d’abonnés profitent aujourd’hui du dispositif, pour 35 euros par mois, avec « autant de services qu’ils le souhaitent ».
Financé par le Groupe SOS et des caisses de retraite, chaque établissement participant reçoit 30 000 euros par an pour financer le travail de la personne coordinatrice. Une étude d’impact réalisée en 2020 a conclu que « Seniors Connect réduit le sentiment d’isolement, renforce l’autonomie et la connaissance des aides et services », souligne Saverio Monferrato.
Ces établissements sont de plus en plus perçus comme des mouroirs.
Valentine Trépied,sociologue et docteure à l’EHESS.
Pour changer leur image, les Ehpad auraient tout intérêt à créer du lien avec les personnes souhaitant rester à domicile mais ayant besoin d’un accompagnement. La séparation entre le domicile et l’Ehpad serait ainsi moins stricte et cela rassurerait les personnes âgées et leurs familles. L’entrée en Ehpad intervient à un âge de plus en plus avancé (85 ans en moyenne, pour une durée de deux ans et demi), les résidents arrivent donc avec un niveau élevé de dépendance et de soins.

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« Ces établissements sont de plus en plus perçus comme des mouroirs et font face à une image très stigmatisante », relève Valentine Trépied, sociologue et docteure à l’EHESS. Cet « Ehpad bashing » s’est encore accentué durant la crise sanitaire. En 2020, selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), les trois quarts des Ehpad ont eu au moins un résident infecté par le Covid-19. Au total, 38 % des résidents ont été contaminés et 5 % en sont décédés, soit 29 300 morts au total.
Il faudrait 15 milliards d’euros
Cette période a aussi mis en lumière le manque de moyens dont disposent les Ehpad. Selon le dernier rapport de Matières Grises, 15 milliards d’euros seraient nécessaires pour rénover 150 000 places. Et selon les projections de la Drees, il faudrait doubler dans la durée le rythme d’ouverture de places en Ehpad pour accueillir 108 000 résidents supplémentaires d’ici à 2030.
Côté politique, cependant, on prévoit plutôt un « effort de plus de 400 millions d’euros » pour financer la prise en charge de l’aide et de soin à domicile, a annoncé le Premier ministre fin septembre dans le cadre du Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

L’embauche de 10 000 soignants pour les 7 500 Ehpad que compte la France est également prévue dans les mois à venir. Une aide bien faible au regard des besoins et qui, surtout, selon Valentine Trépied, accentue la dichotomie entre « autonomie pour les personnes à domicile » et « dépendance pour les personnes en Ehpad », autrement dit « la vieillesse qu’on ne veut pas voir ».
Alors qu’en réalité, « les inégalités entre personnes âgées sont plus fortes au domicile qu’en établissement, car elles n’ont pas toutes les mêmes ressources à mobiliser », note la sociologue. Un constat que souhaitent justement combattre les « Ehpad plateformes », sans en avoir encore les moyens à grande échelle.
La domotique pour sécuriser les seniors ? Pas si simple…
« Il existe trois statuts d’Ehpad : public, privé lucratif (marché de plus en plus concentré autour de gros groupes comme Korian ou Orpea) et privé non lucratif (marché dominé par des associations qui tend aussi vers la concentration) », explique Ilona Delouette, chercheuse à l’Institut Mines Télécom Nord Europe.
« Le statut d’Ehpad a été créé en 1997. Il permet à tous les établissements d’avoir les mêmes types de financement de la part des départements pour le volet dépendance et de l’Agence régionale de santé pour les soins. L’hébergement est à la charge du résident et de sa famille. »
C’est sur ce dernier volet que les privés lucratifs tentent de se distinguer en mettant davantage de moyens que le public dans l’animation, le marketing et les nouvelles technologies. Mais le privé non lucratif n’est pas en reste. Plusieurs établissements gérés par des associations ou des fondations sont ainsi cités en exemple dans l’étude du think tank Matières Grises, « L’Ehpad du futur ».
Leur principal point commun : l’usage de la technologie au cœur du fonctionnement de leurs multiples services « hors les murs ». C’est le cas du dispositif renforcé de soutien à domicile pour les personnes âgées développé notamment par les Ehpad de la Croix-Rouge française.
Manque de vision à long terme
Sept territoires sont concernés par l’expérimentation pour 175 bénéficiaires, avec « un socle commun qui comprend entre autres une offre domotique », détaille le sociologue Louis Braverman. Ces technologies doivent permettre de « sécuriser davantage l’environnement de la personne en détectant une activité anormale, une chute, avec la possibilité de joindre de l’aide en cas de besoin, etc. »
Toutefois, ces usages ne sont pas encore très développés chez les bénéficiaires : « Il y a beaucoup de freins, surtout éthiques, comme avec la télé-assistance, qui suppose le port d’un bracelet, ce que les personnes âgées ne perçoivent pas toujours d’un bon œil. Il en va de même pour les GPS contre les fugues. Jusqu’à quel point peut-on tracer et limiter la liberté de circulation de quelqu’un ? »
Louis Braverman juge toutefois que le développement de ces technologies est une « belle promesse » faite aux personnes qui souhaitent rester à leur domicile le plus longtemps possible. « Ce type de projet manque tout de même de vision à long terme », estime-t-il. L’expérimentation de la Croix Rouge française est prévue pour durer trois ans avec un budget global de 20 millions d’euros. Impossible, pour le moment, de connaître son avenir au-delà de cette période d’essai.