Jean-Lou Chameau est un Français influent. Diplômé de l’École nationale supérieure des Arts et Métiers, il a été chargé par l’État de coordonner le projet de l’Institut polytechnique de Paris (IPP). Auparavant, il avait présidé le California Institute of Technology (Caltech) de 2006 à juin 2013, avant de prendre les rênes de la King Abdullah University of Science and Technology, en Arabie saoudite, de juillet 2013 à août 2017.
La matière grise française continue de dessiner des « boucles vertueuses » en partant à l’étranger pour mieux revenir ensuite. Encore faut-il savoir qui part et qui revient, mais là, les chiffres officiels manquent, car ces mouvements ne sont suivis de près ni par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (Mesri), ni par le Quai d’Orsay (ministère des Affaires étrangères).
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« À partir de l’année prochaine, les établissements d’enseignement supérieur et organismes de recherche évalués devront nous fournir des informations sur la mobilité entrante et sortante des chercheurs », affirme Thierry Coulhon, président du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres), autorité administrative indépendante chargée d’évaluer les structures d’enseignement supérieur et de la recherche.
Jean-Lou Chameau est un Français influent. Diplômé de l’École nationale supérieure des Arts et Métiers, il a été chargé par l’État de coordonner le projet de l’Institut polytechnique de Paris (IPP). Auparavant, il avait présidé le California Institute of Technology (Caltech) de 2006 à juin 2013, avant de prendre les rênes de la King Abdullah University of Science and Technology, en Arabie saoudite, de juillet 2013 à août 2017.
La matière grise française continue de dessiner des « boucles vertueuses » en partant à l’étranger pour mieux revenir ensuite. Encore faut-il savoir qui part et qui revient, mais là, les chiffres officiels manquent, car ces mouvements ne sont suivis de près ni par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (Mesri), ni par le Quai d’Orsay (ministère des Affaires étrangères).
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« À partir de l’année prochaine, les établissements d’enseignement supérieur et organismes de recherche évalués devront nous fournir des informations sur la mobilité entrante et sortante des chercheurs », affirme Thierry Coulhon, président du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres), autorité administrative indépendante chargée d’évaluer les structures d’enseignement supérieur et de la recherche.
Les ingénieurs formés dans les grandes écoles (Télécom Paris, Ensta, Isae-Supaero, etc.) continuent d’avoir la cote auprès des grandes firmes internationales qui s’implantent dans l’Hexagone notamment en raison de la disponibilité de ces cadres techniques hautement qualifiés.
La francophonie booster d’influence académique ?
Près de 300 millions de locuteurs français dans le monde, cela devrait a priori contribuer à un rayonnement puissant de la France. L’Organisation internationale de la francophonie (OIF) réunit 88 États et gouvernements partageant une même langue, le français.
Polytechnique joue cette carte de la francophonie pour renforcer ses liens avec d’autres établissements de premier plan. En 2015, « l’X » a rejoint Rescif, le réseau d’excellence des sciences de l’ingénieur de la francophonie.
La structure comprend 17 universités francophones dans 13 pays d’Afrique, Amérique, Asie, Europe et Moyen-Orient. Toutefois, dans leur rapport « La diplomatie culturelle et d’influence de la France : quelle stratégie à dix ans ? », les députés et co-rapporteurs Michel Herbillon et Sira Sylla, recommandaient, fin 2018, de redonner du sens à la francophonie multilatérale en la recentrant sur quelques grandes priorités, dont le développement d’un espace intégré de recherche et d’enseignement supérieur.
Le directeur du laboratoire de recherche en intelligence artificielle de Facebook est un Français : Yann Le Cun, diplômé de l’Esiee Paris et de l’université Pierre et Marie Curie. Antoine Bordes, directeur du centre européen de recherche en IA du réseau social installé à Paris, a étudié à l’ESPCI ParisTech.
« Que nous cultivions une belle interdisciplinarité dans nos établissements d’enseignement supérieur et de recherche me rend plutôt confiant en l’avenir et en notre pouvoir d’attraction d’étudiants et d’investissements en R & D et en innovation », poursuit Thierry Coulhon.
Éco-mots
Recherche et développement (R&D)
La recherche et le développement regroupent les activités qui améliorent les connaissances et compétences ainsi que leur utilisation pour de nouvelles applications dans l'entreprise.
Flux et reflux de la matière grise
Une chose est sûre : pour prospérer, ce soft power intellectuel a besoin d’un écosystème de formation et de recherche performant bien irrigué financièrement, ainsi que de réseaux et d’agents de promotion efficaces.
« La diplomatie française offre encore un très beau réseau que beaucoup de pays ne peuvent plus s’offrir, même si nous constatons une certaine réduction de la voilure dans ce domaine. Mais rendre intelligibles les spécificités de l’enseignement supérieur français à l’étranger n’est pas toujours aisé. La constitution récente, dans notre pays, de grandes universités de recherche de classe mondiale est de nature à faciliter les choses », ajoute Thierry Coulhon.
Éco-mots
Soft power (pouvoir de convaincre)
Théorisé dans les années 1990 par Joseph Nye, ancien secrétaire adjoint à la Défense de Bill Clinton, désigne l’aptitude d’un État à obtenir ce qu’il souhaite de la part d’un autre État sans que celui-ci n’en soit même conscient, par opposition au hard power, qui repose sur la capacité à déployer des forces militaires.
Dominique Guellec, ancien responsable des politiques de recherche et d’innovation à l’OCDE, renchérit : « La politique adoptée par le Collège de France est efficace. Elle s’appuie pleinement sur les réseaux et la circulation des cerveaux. »
Esther Duflo, professeure au MIT, à Boston, prix Nobel d’économie 2019, avait été élue à la chaire « Savoirs contre pauvreté » du Collège, en partenariat avec l’AFD, pour l’année académique 2008-2009. La vénérable institution parvient ainsi régulièrement à attirer ces savants français de haute volée en pleine carrière internationale.
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Citons aussi Jean-Marie Tarascon, spécialiste de la chimie du solide qui, après une longue carrière américaine, dispense cette année un cours intitulé « Techniques de diagnostic et d’auto-réparation pour des batteries plus performantes » ou encore le paléoanthropologue Jean-Jacques Hublin, qui a enseigné dans les plus grandes universités américaines comme Berkeley (1992), Harvard (1997) et Stanford (1999 et 2011).
Des signes de dégradation
Mais certains voyants sont au rouge. Pour Dominique Guellec, le décrochage de l’innovation et de la R & D en France est patent par rapport à l’Allemagne. En 2019, la dépense intérieure de recherche et développement en France s’élevait à 51 milliards d’euros contre 105 milliards d’euros en Allemagne, soit plus du double chez nos voisins d’outre-Rhin.
En Chiffres
51 milliards
C'est en euros le montant des dépenses intérieures en R&D de la France en 2019. En Allemagne, ce sont 105 milliards d'euros qui ont été utilisés cette même année.
« Le contexte géopolitique n’arrange rien. Avec l’essor de la Chine, des pays comme le nôtre, mais aussi le Royaume-Uni et l’Allemagne, ont perdu de leur influence et de leur puissance », souligne l’expert.
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L’État, malgré un discours de façade positif, est conscient des risques de déclin. Dans le cadre de sa stratégie nationale concernant les infrastructures de recherche 2018-2020, le Mesri a retenu 99 infrastructures opérant dans différentes disciplines allant de l’énergie aux sciences de la matière et l’ingénierie en passant par la recherche en sciences du numérique et mathématiques.
En 2018, pour la première fois, les pouvoirs publics se sont penchés sur le calcul des coûts complets et l’origine des ressources de ces structures afin d’améliorer le pilotage par leurs responsables, les opérateurs et le ministère.
On apprend ainsi qu’une dépense d’un euro du Grand Équipement national de calcul intensif (Genci) a généré 1,93 euro de production et 0,87 euro de valeur ajoutée dans l’économie française. Signe que le retour sur investissement est plus que jamais surveillé.