Statistiquement, les politiques tiennent-ils leurs promesses ?

L’idée que les politiciens ne tiendraient pas les promesses contenues dans les programmes présentés aux électeurs fait partie de celles qui alimentent la défiance vis-à-vis des élus. Pourtant, à l’occasion de la dernière élection présidentielle, des journalistes de Radio France ont établi que sur les 100 promesses phares du programme présidentiel présenté par Emmanuel Macron en 2017, 47 ont été tenues, et 28 partiellement tenues. Les élus tiennent donc bien certaines de leurs promesses. Mais lesquelles ?

L’équipe de recherche Partipol¹ s’est penchée sur cette question. Elle montre elle aussi que les engagements électoraux sont mieux tenus qu’on ne le pense généralement. En France, en moyenne et depuis 1995, plus de 60 % des promesses faites par la majorité gouvernementale sont tenues.

Au Royaume-Uni, ce chiffre monte à 86 %. Ces taux de réalisation des promesses, bien supérieurs à la perception qu’en ont les citoyens, s’expliquent notamment par la teneur des programmes présentés aux électeurs : ils comportent de moins en moins de discours généraux et de plus en plus de mesures opérationnelles.

Pour Nicolas Sarkozy, il a été plus facile d’opérer la fusion de l’ANPE et des Assedic pour donner naissance à Pôle emploi que d’atteindre une cible de taux de chômage précise, de 5 %, comme il l’avait également promis.

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Avantage aux engagements opérationnels

Plus précisément, une promesse électorale a d’autant plus de chances d’être tenue qu’elle est opérationnelle, peu coûteuse, largement acceptée par la majorité et considérée comme stratégique sur le plan électoral. Ce caractère stratégique d’une promesse est lié à son importance pour l’image du candidat. Il est aussi lié au groupe ciblé par la mesure.

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Par exemple, si Nicolas Sarkozy a bien relevé l’allocation de solidarité aux personnes âgées (le « minimum vieillesse »), malgré le coût de la mesure, malgré les difficultés liées à la crise de 2008 et bien que son positionnement électoral fût avant tout sécuritaire, c’est en raison du public ciblé : les retraités, qui constituent une population électoralement mobilisée, plutôt orientée à droite et bénéficiant d’une perception sociale positive – surtout les « petits » retraités.

Comment expliquer ce décalage entre le résultat de la recherche en sciences politiques et l’impression des citoyens ? Ce biais de perception découle de deux phénomènes : d’une part, la majeure partie des décisions prises par les majorités gouvernementales n’était pas contenue dans le programme électoral ; d’autre part, quand une promesse a particulièrement marqué les esprits, sa non-réalisation peut déterminer de manière disproportionnée la perception de l’action des gouvernants. C’est notamment le cas de la promesse de Nicolas Sarkozy concernant le retour au plein-emploi, objectif aujourd’hui repris par Emmanuel Macron.

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Pour aller plus loin

1. Isabelle Guinaudeau et Simon Persico, « Les promesses électorales n’engagent-elles que ceux qui les écoutent », AOC, 2 juillet 2018 ; Isabelle Guinaudeau et Simon Persico, dirs., « Promesses électorales », Revue française de science politique, vol. 68, n°2, 2018.