Dans un entretien à nos confrères du Parisien ce 14 mars, la ministre de la Transformation et de la Fonction publique Amélie de Montchalin annonçait le dégel du point d’indice des fonctionnaires. Point de base pour calculer le salaire brut d’un fonctionnaire, ce point d’indice n’avait pas été revu depuis 2017.
Geste refusé jusqu’ici par le gouvernement, cette annonce intervient alors qu’il ne reste que quelques semaines avant la présidentielle. Justifiée par une hausse de l’inflation, « très différente de ce qu’elle a été les huit, dix dernières années », cette proposition devrait voir ses premiers effets apparaître à l’été, soit après l’élection présidentielle.
« La décision est prise aujourd’hui, nous allons lancer les discussions avec toutes les parties prenantes […] afin de permettre qu’elle soit effective tel que nous le voulons avant l’été », confie Amélie de Montchalin au Parisien.
Mais comment cette rémunération fonctionne-t-elle ? Qu’est-ce que le point d’indice ? Pour l’Éco vous explique tout en 3 questions.
Le point d’indice, c’est quoi ?
Le point d’indice est une valeur fixe utilisée pour calculer le salaire brut d’un fonctionnaire. Le salaire des fonctionnaires augmente donc mécaniquement lorsque les pouvoirs publics décident de revaloriser le point d’indice.
Afin de tenir compte de l’inflation, la valeur du point d’indice devrait normalement être revalorisée tous les ans. Mais pour des raisons budgétaires, son évolution est rare, la dernière date de février 2017. Un point d’indice actuellement à 4,68 euros.

Le salaire brut pour le fonctionnaire se résume donc à un calcul simple : indice majoré multiplié par la valeur du point d’indice.
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Comment se calcule vraiment la rémunération d’un fonctionnaire ?
Pour mieux comprendre la rémunération d’un fonctionnaire, il est important de savoir qu’il y a trois types d’agents de la fonction publique : la fonction publique d’État, la fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale (départements, régions…).
La fonction publique d’État, la plus importante (près de 2,5 millions d’agents en 2019), regroupe les administrations centrales de l’État, les enseignants et les services déconcentrés tels que les rectorats ou les directions départementales.
Dans la fonction publique hospitalière, depuis la loi de décentralisation dans les années 1980, certains hôpitaux disposent d’une autonomie administrative, avec leur propre organe de décision et un budget autonome. Ils peuvent donc gérer les salaires à leur façon.
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Décentralisation
Processus d’aménagement de l’État unitaire qui consiste à transférer des compétences administratives de l’État vers des entités (ou des collectivités) locales distinctes de lui.
L’indice brut est appelé « indice de carrière ». Chaque fonctionnaire est situé à un grade, et à l’intérieur de ce grade, dans un échelon, qui donne droit à un nombre de points d’indice. Pour avoir davantage de points d’indice, le fonctionnaire doit changer d’échelon.

Exemple avec une grille pour un professeur des écoles
Mais attention, le gel du point d’indice ne signifie pas pour autant un gel de la rémunération des fonctionnaires.
Des mesures dites « catégorielles », c’est-à-dire celles qui sont prises, au niveau ministériel ou interministériel, peuvent être prises pour revaloriser les rémunérations de catégories particulières d’agents, tout comme des mesures dites « individuelles », qui correspondent à l’augmentation des rémunérations résultant de l’avancement à l’ancienneté et des promotions. L’ancienneté permet par exemple d’être mieux rémunéré de façon quasi automatique.
D’ailleurs en dépit du gel du point d’indice, la masse salariale de la fonction publique continue de progresser (+ 1,1 % en 2019) plus vite que l’augmentation des effectifs.
Source : Insee ; FIPECO. Masse salariale brute (hors cotisations des employeurs publics).
En principe, les fonctionnaires ont chaque année accès une prime, la GIPA (garantie individuelle du pouvoir d’achat). Depuis 2008, chaque agent public gagnant moins de 5 000 euros brut par mois et qui n’a pas été augmenté durant 4 ans à la hauteur de l’inflation peut prétendre à ce coup de pouce financier. Une prime, visant à conserver le pouvoir d’achat, qui est augmentée chaque année et extérieure au point d’indice.
Combien de hausse pour les fonctionnaires ?
Une progression de 1 % de la valeur du point correspond à une augmentation d’une dizaine d’euros mensuels pour les agents rémunérés au Smic.
Pour l’heure, aucun chiffre n’a été dévoilé, les négociations avec les syndicats n’ayant pas encore eu lieu. Mais déjà, ces derniers fixent leurs demandes. Le secrétaire général de FSU (Fédération Syndicale Unitaire) Benoît Teste a récemment déclaré sur France info : « Tout ce qui sera en dessous de 3 % pour nous ce ne sera pas acceptable ».
Dans un communiqué commun, sept syndicats demandent une revalorisation « a minima à hauteur de l’inflation soit, en ce moment, autour de 4 % , avec des clauses en fonction de l’évolution des prix ».
Mais le coût ne sera pas neutre pour les finances publiques. Chaque augmentation de 1 % du point de la fonction publique coûte 800 millions d’euros à la fonction publique d’État, 600 millions d’euros aux administrations locales, 100 millions d’euros à ses opérateurs et 500 millions d’euros aux administrations sociales (surtout les hôpitaux), soit un total de 2 milliards d’euros.