C’est une composante méconnue, mais essentielle de notre économie. Selon la dernière étude en date pour le cas français, le travail domestique générait en 2010 une valeur égale à un tiers du produit intérieur brut de notre pays.
Pour parvenir à cette estimation, l’économiste Delphine Roy1 a d’abord circonscrit un périmètre intermédiaire du travail domestique, regroupant les activités liées à la cuisine, au ménage, au linge et aux soins des enfants, mais intégrant également les courses, les jeux avec les enfants ou encore le bricolage et le jardinage.
Dans cette acception, 21 heures 30 sont dévolues en moyenne au travail domestique dans l’emploi du temps hebdomadaire des Français. Mais ce volume varie fortement selon le sexe. Les femmes en couple et mères d’au moins un enfant y consacrent en moyenne 34 heures hebdomadaires contre 18 pour les hommes dans la même situation familiale.
Non déclarée, la production domestique est, avec l’économie souterraine, l’un des deux piliers de l’économie informelle. Et sa valeur potentielle est vertigineuse.
C’est une composante méconnue, mais essentielle de notre économie. Selon la dernière étude en date pour le cas français, le travail domestique générait en 2010 une valeur égale à un tiers du produit intérieur brut de notre pays.
Pour parvenir à cette estimation, l’économiste Delphine Roy1 a d’abord circonscrit un périmètre intermédiaire du travail domestique, regroupant les activités liées à la cuisine, au ménage, au linge et aux soins des enfants, mais intégrant également les courses, les jeux avec les enfants ou encore le bricolage et le jardinage.
Dans cette acception, 21 heures 30 sont dévolues en moyenne au travail domestique dans l’emploi du temps hebdomadaire des Français. Mais ce volume varie fortement selon le sexe. Les femmes en couple et mères d’au moins un enfant y consacrent en moyenne 34 heures hebdomadaires contre 18 pour les hommes dans la même situation familiale.
Non déclarée, la production domestique est, avec l’économie souterraine, l’un des deux piliers de l’économie informelle. Et sa valeur potentielle est vertigineuse.
Ne pas confondre : Économie informelle et souterraine
La production domestique est ici située dans l’économie informelle, c'est-à-dire l'ensemble des activités productives s’exerçant sans déclaration à l’État ni régulation de sa part. Elle se distingue de l'économie souterraine : ensemble des activités productives non déclarées et exercées de façon clandestine, qu’elles soient criminelles – trafic de drogue – ou non (travail au noir, évasion fiscale.
Pour l’estimer, Delphine Roy a calculé que les Français avaient consacré 60 milliards d’heures à ce type d’activités en 2010. En retenant un prix de l’heure de travail équivalant au SMIC de l’époque intégrant les cotisations sociales et patronales, elle montrait que la valeur du travail domestique se montait à 635,9 milliards d’euros, soit 32,8 % du PIB français d’alors.
Un arbitrage rationnel, mais pas seulement
Ceci constaté, pourquoi le travail domestique incombe-t-il encore majoritairement aux femmes ? L’explication dominante dans la littérature a été formulée par l’économiste Gary Becker en 19812 : les couples effectuent un arbitrage rationnel conduisant à réduire en priorité l’offre de travail dit « professionnel », c’est-à-dire déclaré et rémunéré, du membre du couple qui dispose du plus faible niveau de salaire. Or, en 2019, le revenu salarial moyen des femmes travaillant dans le secteur privé était inférieur de 22 % à celui des hommes3.
L’inégalité salariale entre femmes et hommes renforce donc la division sexuée des tâches. Plus encore, les chercheuses Catherine Sofer et Claire Thibout ont prouvé empiriquement la persistance d’une conception patriarcale de la répartition des tâches au sein du couple4. Elles établissent en effet qu’en France les hommes dont les compagnes ont un niveau de salaire supérieur au leur augmentent moins leur temps de travail domestique que les femmes dans la même situation.
Ce comportement contribue à accentuer les inégalités en termes de suivi de carrière et d’exposition à l’inactivité. Toutes choses égales par ailleurs, en France, une femme mariée a ainsi 1,7 fois plus de chances d’être inactive qu’un homme marié selon l’Insee. Logiquement, 57 % des femmes inactives en 2019 déclaraient l’être pour des raisons familiales contre seulement 7 % des hommes inactifs.
1. « Le travail domestique : 60 milliards d’heures en 2010 », Delphine Roy, Insee Première, 2012.
2. A Treatise on the Family, Gary Becker, 1981.
3. « Femmes et hommes, l’égalité en question », Insee Références, 2022.
4. « La division du travail selon le genre est-elle efficiente ? Une analyse à partir de deux enquête Emploi du temps », Catherine Sofer, Claire Thibout, Économie et statistique, 2015. Sont mobilisées essentiellement des données de 2010 pour la France, car l’enquête « Emploi du temps » ne publiera sa prochaine livraison qu’en 2025.